Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 novembre 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 avril 2019 du préfet du Gard ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte, et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, sous astreinte, et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- les premiers juges ont méconnu le principe du contradictoire ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- sa situation et l'existence d'une vie commune doivent être appréciées à la date du 16 juin 2016 et non à une date postérieure ;
- l'arrêté querellé méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2020, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 2 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 avril 2019 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.
Sur la régularité du jugement :
2. Ayant relevé que, pour rejeter sa demande de renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, le préfet du Gard s'était notamment fondé sur une enquête de gendarmerie réalisée les 22 et 24 juin 2016 dans le cadre de l'instruction de cette demande, M. C... a demandé, dans les écritures qu'il a présentées devant le tribunal, à ce qu'il soit enjoint au préfet du Gard de produire cette l'enquête. La circonstance que les premiers juges ont expressément refusé de faire droit à cette demande ainsi qu'il ressort des énonciations du point 5 du jugement attaqué, n'est pas de nature à entacher leur jugement d'une irrégularité. Au demeurant, il ressort des énonciations de ce jugement que, pour estimer que l'intéressé ne satisfaisait plus à la condition d'absence de rupture de la communauté de vie depuis son mariage, posée par le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les premiers juges n'ont pas tenu compte de cette enquête, ne prenant en considération que les seuls autres éléments retenus par l'autorité préfectorale pour fonder le refus de renouvellement contesté, soit le courrier du 21 février 2017 adressé au préfet par l'épouse de l'intéressé indiquant que son mari avait quitté le domicile conjugal et qu'une procédure de divorce était en cours ainsi que le constat, par les services de la gendarmerie de Roquemaure lors de l'enquête réalisée le 7 mars 2019, de l'absence de communauté de vie des époux, en y ajoutant notamment le courrier émis par l'épouse en juillet 2018 ainsi que celui du 2 août 2018, qui sont de même teneur.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ". Selon l'article L. 313-12 du même code : " (...) / Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé, sauf si elle résulte du décès du conjoint français. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 313-5-1 de ce code : " L'étranger titulaire d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle doit être en mesure de justifier qu'il continue de remplir les conditions requises pour la délivrance de cette carte. L'autorité administrative peut procéder aux vérifications utiles pour s'assurer du maintien du droit au séjour de l'intéressé et, à cette fin, convoquer celui-ci à un ou plusieurs entretiens. / Si l'étranger cesse de remplir l'une des conditions exigées pour la délivrance de la carte de séjour dont il est titulaire, fait obstacle aux contrôles ou ne défère pas aux convocations, la carte de séjour peut lui être retirée ou son renouvellement refusé par une décision motivée. (...)".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... s'est marié le 25 avril 2012 à Oujda au Maroc avec une ressortissante française. Ce mariage a été transcrit sur les registres de l'état civil français le 21 août suivant. L'intéressé est entré en France le 6 mai 2013, sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale ", valable du 28 mars 2013 au 28 mars 2014. Il s'est vu délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de Français sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, titre renouvelé, une fois, jusqu'au 22 avril 2016 et dont il a sollicité le renouvellement le 16 juin 2016.
5. La légalité d'une décision administrative frappée d'un recours pour excès de pouvoir s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise. Ainsi, il appartient, en principe, au préfet d'apprécier si les conditions posées par les dispositions législatives et réglementaires applicables à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour sont remplies à la date à laquelle il se prononce sur la demande.
6. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 21 février 2017, l'épouse de M. C... a informé le préfet du Gard que son mari avait quitté le domicile conjugal et qu'une procédure de divorce était en cours. Elle a ultérieurement signalé à la gendarmerie de Rocquemaure, le 2 août 2018, que son époux avait de nouveau quitté le domicile conjugal, précisant qu'elle entendait également informer les services préfectoraux de ces faits au motif que l'intéressé bénéficiait de titres de séjour provisoires. L'enquête de gendarmerie réalisée au domicile de Mme C... le 6 mars 2019 a, par ailleurs, révélé que le requérant n'y résidait plus depuis environ deux ans et qu'il n'y possédait plus aucune affaire. Le requérant ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir du délai anormalement long mis par le préfet du Gard pour se prononcer sur sa demande de renouvellement de son titre de séjour dès lors qu'à supposer même que la condition tenant à l'absence de rupture de la communauté de vie depuis le mariage aurait été satisfaite à la date à laquelle il avait déposé sa demande, elle ne l'était plus quelques mois plus tard et le préfet, qui pouvait, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 313-5-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, procéder à toutes vérifications utiles pour s'assurer du maintien du droit au séjour de l'intéressé, aurait été fondé à lui opposer alors un refus de renouvellement d'un tel titre, voire à lui retirer son titre de séjour temporaire dans l'hypothèse où il en aurait été détenteur.
7. Enfin, M. C..., qui admet ne plus vivre sous le même toit que son épouse, soutient toutefois que les dispositions du 4° de l'article L. 313-11 n'exigent pas une cohabitation entre les époux mais seulement le maintien d'une vie commune. Si, certes, une absence de cohabitation n'est pas, à elle seule, de nature à faire regarder la communauté de vie comme ayant cessé, les allégations des deux époux selon lesquelles ils auraient recommencé à se fréquenter et auraient pour projet de reprendre une vie commune ne sont assorties d'aucun élément probant. La nature de la relation qu'ils entretiennent effectivement n'est pas établie par les pièces du dossier qu'alors qu'ils justifient leur séparation par les relations conflictuelles entre M. C... et les enfants de son épouse, l'intéressé étant hébergé par un ami à Avignon et celle-ci étant présentée dans les écritures de l'appelant comme hébergée par son fils, qui est âgé de vingt-huit ans.
8. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme E..., présidente de la Cour,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 décembre 2020.
2
N° 19MA04882
bb