Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 août 2015, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 10 mars 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer le titre de séjour qu'elle a sollicité, dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, cette somme devant, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, être versée à Me D... qui renoncera alors à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- elle est en droit de prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des stipulations de l'article 6 1. et de l'article 6 5. de l'accord franco-algérien ;
-les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues.
Mme A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 9 juillet 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Anne Menasseyre, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme A..., de nationalité algérienne, est entrée régulièrement en France le 23 décembre 2001, munie d'un passeport revêtu d'un visa Schengen de type C à entrées multiples d'une validité de trente jours, et soutient qu'elle s'y maintient depuis lors ; qu'elle s'est présentée à la préfecture des Bouches-du-Rhône, le 23 juin 2014, afin d'y solliciter son admission au séjour en invoquant sa vie privée et familiale et une durée de présence de plus de dix ans ; que, par un arrêté en date du 29 septembre 2014, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle était susceptible d'être éloignée d'office ; qu'elle relève appel du jugement du 10 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;
3. Considérant que si Mme A... est entrée de manière régulière en France le 23 décembre 2001 et déclare s'être maintenue sur le territoire depuis lors, et si elle était bien présente en France en 2002, année au cours de laquelle elle a déposé une demande d'asile, ainsi qu'en 2003, et vraisemblablement, ponctuellement au cours de la période concernée, les éléments produits par l'intéressée qui sont essentiellement constitués de documents de nature médicale sont insuffisants à démontrer le caractère continu de sa présence durant certaines périodes, notamment en 2004 et 2005 ; que des courriers adressés par le tribunal administratif de Marseille à l'occasion d'une affaire la concernant ne sauraient justifier de sa présence habituelle, pas plus que la production de lettres de la commission d'accès aux documents administratifs ; que Mme A... ne s'explique pas sur le fait qu'au cours des douze années au cours desquelles elle soutient qu'elle était présente sans discontinuer sur le sol français, elle n'a pris contact avec les services préfectoraux qu'à trois reprises, en avril 2002, avril 2009 et juin 2014 ; que dans ce contexte et eu égard à l'insuffisance de documents probants présentés, Mme A... ne peut être regardée comme justifiant du caractère habituel de son séjour en France depuis plus de dix ans ; que, par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône pouvait légalement prendre à son encontre l'arrêté attaqué sans méconnaître les stipulations conventionnelles précitées ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;
5. Considérant que Mme A... était âgée de cinquante-sept ans à la date de l'arrêté attaqué ; qu'elle a vécu dans son pays d'origine, à tout le moins, jusqu'à l'âge quarante-quatre ans ; qu'elle a indiqué, à l'occasion d'une précédente demande de certificat de résidence, être la troisième d'une fratrie de neuf enfants ; qu'ainsi la circonstance que trois de ses soeurs sont françaises ne fait pas par elle-même de la France le lieu où se trouvent ses attaches familiales essentielles ; qu'ainsi qu'il a été vu ci-dessus, alors même qu'elle soutient séjourner en France depuis de nombreuses années, les seuls documents que Mme A... est en mesure de produire pour justifier des liens qui l'unissent à la France sont des courriers adressés à l'adresse de sa soeur jumelle, des prescriptions médicales et des feuilles de soins ; que ces pièces, même nombreuses, ne permettent pas de considérer que les liens personnels et familiaux unissant l'intéressée à la France seraient tels qu'une atteinte excessive y aurait été portée et ce, même si la soeur jumelle de Mme A... est française, la gémellité avec une française ne conférant pas à Mme A... de droit particulier au séjour ; qu'il en résulte que les stipulations précitées n'ont pas été méconnues ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que les conclusions à fins d'injonction qu'elle présente ainsi que celles qui tendent à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au ministre de l'intérieur et à Me D....
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2016, où siégeaient :
- M. Lascar, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 8 décembre 2016.
N° 15MA03299 2
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