Procédure devant la Cour :
Par un recours et un mémoire, enregistrés le 13 mai 2016 et le 7 mars 2017, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 mars 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Nice.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- la décision du 6 février 2013 est suffisamment motivée ;
- en tout état de cause, un refus de délivrance d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public n'a pas à être motivé ;
- la décision de refus querellée est légalement fondée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 février 2017, M. et Mme B..., représentés par Me A..., concluent à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à l'annulation des décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 6 février 2013 et du 12 juin 2013 et à ce qu'il soit enjoint à cette autorité de reprendre l'instruction de leur demande d'autorisation d'occupation temporaire dans le délai de deux mois et demandent, en outre, qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B... ont acquis, le 3 octobre 1992, une propriété dénommée " Villa Tahiti ", cadastrée section A n° 1066 à Théoule-sur-Mer au lieudit " La Figueirette ". Par lettre du 12 janvier 2012, le directeur départemental des territoires et de la mer des Alpes-Maritimes les a informés que des ouvrages leur appartenant étaient implantés sur le domaine public maritime et qu'ils occupaient ce domaine sans droit ni titre, et les a invités à régulariser leur situation, soit en présentant une demande d'autorisation d'occupation temporaire, soit en procédant à la démolition de ces ouvrages. Par courrier du 11 avril 2012, les époux B...ont adressé à l'administration une demande d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public, accompagnée d'un dossier technique. Par décision du 6 février 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté cette demande et a mis les intéressés en demeure de démolir, dans le délai maximum de trois mois, les constructions édifiées sur le domaine public maritime. Les époux B...ont formé un recours gracieux contre cette décision que le préfet a rejeté par décision du 12 juin 2013. Par jugement du 29 mars 2016, le tribunal administratif de Nice, saisi par M. et Mme B..., a estimé que la décision du 6 février 2013 était entachée d'un défaut de motivation et l'a annulée, ainsi que celle du 12 juin 2013. La ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En estimant, pour annuler la décision du préfet des Alpes-Maritimes du 6 février 2013, qu'elle ne contenait aucune motivation en droit et que l'imprécision de la formulation retenue ne permettait pas de connaître les considérations de droit et de fait qui en constituaient le fondement, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 211-2 du code des relations entre l'administration et les administrés, doivent être motivées les décisions qui " refusent une autorisation ". L'article 3 de cette même loi, désormais codifié à l'article L. 211-5 du même code dispose que la motivation doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.
4. Pour rejeter la demande d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public présentée par M. et Mme B..., le préfet a indiqué, dans la décision contestée, que " les ouvrages sis sur la plage (...) s'intègrent mal dans l'environnement " et que le refus se justifie " dans un souci d'intérêt général que présente la protection du domaine public maritime ". Alors que cet acte constitue une décision refusant une autorisation au sens des dispositions précitées, il ne mentionne aucun des textes législatifs ou règlementaires qui le fonde, notamment aucune des dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives aux prescriptions dont doivent tenir compte les décisions d'utilisation du domaine public maritime. Cette décision n'est ainsi pas assortie de l'énoncé suffisamment précis des considérations de droit sur lesquelles elle est fondée et méconnaît donc les dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979.
5. Il résulte de ce qui précède que la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé les décisions du préfet des Alpes-Maritimes du 6 février 2013 et du 12 juin 2013.
Sur les frais liés au litige :
6. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. et Mme B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le recours de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de M. et Mme B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et à M. et Mme B....
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 27 avril 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Maury, premier conseiller,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 11 mai 2018.
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N° 16MA01880