2°) à titre principal, d'annuler la décision de l'OFII du 18 mai 2015, en tant qu'elle porte sur la somme de 30 000 euros réclamée au titre de la contribution spéciale et de la contribution forfaitaire ;
3°) de mettre à la charge de l'OFII la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 8251-1 du code du travail dès lors qu'il n'a pas employé les deux ressortissants marocains qui ne lui ont apporté qu'une aide ponctuelle et non rémunérée ;
- il y a lieu de faire application des dispositions du II de l'article R. 8253-2 du code du travail ;
- les deux ressortissants marocains séjournaient en France depuis moins de trois mois de sorte que la contribution forfaitaire n'est pas justifiée.
Par un mémoire, enregistré le 27 juin 2018, l'office français de l'immigration et de l'intégration conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'appelant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par l'appelant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les conclusions de M. C....
1. A l'occasion d'un contrôle effectué le 24 juillet 2014 dans l'exploitation agricole de M. F..., située chemin du Bondavin à Redessan (Gard), les services de police ont constaté l'emploi de deux ressortissants étrangers, titulaires de titres de séjour espagnols, non déclarés et démunis d'autorisation de travail en France. Au vu du procès-verbal établi lors de ce contrôle, également transmis au procureur de la République, l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a avisé M. F... par courrier du 8 janvier 2015, qu'indépendamment des poursuites pénales susceptibles d'être engagées, il était susceptible de se voir appliquer, d'une part, la contribution spéciale prévue par l'article L. 8253-1 du code du travail et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en l'invitant à faire valoir ses observations. L'OFII a mis à la charge de M. F..., par une décision du 18 mai 2015, la contribution spéciale à hauteur de 35 100 euros et, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement pour un montant de 4 248 euros. Par une décision du 12 mai 2017, l'OFII a ramené la contribution spéciale et la contribution forfaitaire à un montant de 30 000 euros en application des dispositions du second alinéa de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un jugement du 15 juin 2017, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé le non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 18 mai 2015 en tant qu'elles portent sur la somme de 9 348 euros et a rejeté le surplus de la demande. M. F... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France (...) ". L'article L. 8253-1 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date des manquements relevés à l'encontre de M. F... dispose : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger sans titre de travail, une contribution spéciale. Le montant de cette contribution spéciale est déterminé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Il est, au plus, égal à 5 000 fois le taux horaire du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. Ce montant peut être minoré en cas de non-cumul d'infractions ou en cas de paiement spontané par l'employeur des salaires et indemnités dus au salarié étranger sans titre mentionné à l'article R. 8252-6. Il est alors, au plus, égal à 2 000 fois ce même taux. Il peut être majoré en cas de réitération et est alors, au plus, égal à 15 000 fois ce même taux. L'Office français de l'immigration et de l'intégration est chargé de constater et de liquider cette contribution. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine (...) ".
3. D'une part, il appartient au juge administratif, saisi d'un recours contre une décision mettant à la charge d'un employeur la contribution spéciale prévue par les dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail, pour avoir méconnu les dispositions de l'article L. 8251-1 du même code et la contribution forfaire prévue par l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile de vérifier, salarié par salarié, la matérialité des faits reprochés à l'employeur et leur qualification juridique au regard de ces dispositions. D'autre part, il résulte des dispositions précitées que les contributions qu'elles instituent ne peuvent être légalement infligées qu'aux personnes ayant embauché, conservé à leur service ou employé un ou plusieurs travailleurs étrangers démunis de titre les autorisant à exercer une activité salariée sur le territoire français. Cette condition n'est remplie que s'il est établi, au regard des éléments produits tant par l'administration que par le requérant, l'existence d'un lien salarial entre l'employeur et le ressortissant étranger dépourvu d'autorisation de travail qu'il emploie, caractérisé notamment par un lien de subordination.
4. Il est constant que lors du contrôle effectué le 24 juillet 2014, il a été constaté que MM. I... A...G...et A...J...B..., ressortissants marocains, dépourvus d'autorisation de travail en France, étaient occupés à cueillir des courgettes aux côtés de M. F... sur son exploitation agricole. Il ressort des énonciations des procès-verbaux dressés le 24 juillet 2014 par un agent de police judiciaire à la suite du contrôle d'identité, que MM. A... G...et B...ont reconnu au cours de leur audition, travailler pour M. F..., le premier déclarant notamment que ce dernier désigné comme " le patron " était successivement passé à leur domicile respectif pour les conduire en voiture jusqu'au lieu de son exploitation, que le travail devait durer quelques heures et qu'il recevrait en contre partie des courgettes provenant de l'exploitation. Il ressort également du procès-verbal d'audition de M. F... qu'il a reconnu faire appel à des personnes ponctuellement afin de l'aider sur l'exploitation et que s'agissant des deux ressortissants marocains en cause, il envisageait de leur " donner quelque chose pour les remercier " de leur travail. Il résulte de ces circonstances, que les intéressés ont été ainsi soumis à des obligations précises quant aux lieu, horaire et méthode de travail pour effectuer leur tâche en contrepartie soit d'une somme d'argent d'un montant imprécis soit d'une rémunération en nature. Ainsi, M. F... doit être regardé comme ayant entretenu avec MM. A... G...et B...des relations de travail constitutives d'un lien de subordination à son égard. Il s'ensuit que le directeur général de l'OFII pouvait légalement infliger à M. F..., en qualité d'employeur de deux ressortissants étrangers en situation irrégulière de travail, la contribution spéciale prévue par les dispositions de l'article L. 8253-1 du code du travail et la contribution forfaire prévue par l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Aux termes de l'article R. 8253-2 du code du travail : " I.- Le montant de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 est égal à 5 000 fois le taux horaire, à la date de la constatation de l'infraction, du minimum garanti prévu à l'article L. 3231-12. II.- Ce montant est réduit à 2 000 fois le taux horaire du minimum garanti dans l'un ou l'autre des cas suivants : 1° Lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne pas d'autre infraction commise à l'occasion de l'emploi du salarié étranger en cause que la méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 ; 2° Lorsque l'employeur s'est acquitté des salaires et indemnités mentionnés à l'article L. 8252-2 dans les conditions prévues par les articles R. 8252-6 et R. 8252-7. III.- Dans l'hypothèse mentionnée au 2° du II, le montant de la contribution spéciale est réduit à 1 000 fois le taux horaire du minimum garanti lorsque le procès-verbal d'infraction ne mentionne l'emploi que d'un seul étranger sans titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France. ".
6. Il résulte des mentions du procès-verbal d'audition dressé le 24 juillet 2014, qui font foi jusqu'à preuve du contraire, que les deux employés de M. F... étaient dépourvus d'autorisation de travail et non déclarés à l'URSSAF. Dans ces conditions, M. F... ne peut prétendre à une minoration des contributions mises à sa charge.
7. M. F... ne justifie pas son allégation selon laquelle les deux étrangers séjournaient en France depuis moins de trois mois à la date du contrôle ainsi qu'ils y étaient autorisés par leur titre de séjour délivré par les autorités espagnoles. Par suite, c'est à bon droit que la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui a été appliquée.
8. Il résulte de ce qui précède que M. F... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'OFII qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. F... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. F... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'OFII et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : M. F... versera à l'OFII la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F...et à l'office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré après l'audience du 28 juin 2019, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme D..., première conseillère,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 juillet 2019.
N° 17MA03346
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