Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 février 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2016 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- l'arrêté querellé ne vise pas la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 ;
- le préfet aurait dû saisir la commission du titre ;
- il n'a pas examiné en tout premier lieu si une carte de séjour " vie privée et familiale " pouvait lui être délivrée ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 ;
- cet arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative à la circulation et au séjour des personnes entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin, signée à Cotonou le 21 décembre 1992 ;
- l'accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin, signé à Cotonou le 28 novembre 2007 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,
- et les observations de M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité béninoise, relève appel du jugement du 28 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 août 2016 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.
2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".
3. Si le passeport de M. B... fait effectivement apparaître qu'il est entré en France le 28 août 2006, les pièces qu'il produit concernant l'année 2007, constituées exclusivement d'un relevé de compte bancaire arrêté au 8 janvier 2007 ne comportant aucun mouvement, d'une facture datée du 16 août 2007 établie à son nom ainsi que d'une autre facture non nominative, ne permettent pas d'établir qu'il aurait résidé continuellement en France au cours de cette période. M. B... ne justifie ainsi pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans à la date de la décision querellée. Dès lors, le préfet des Alpes-Maritimes n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour.
4. La circonstance selon laquelle l'arrêté en litige ne vise pas la circulaire ministérielle du 28 novembre 2012 est sans incidence sur sa légalité dès lors qu'elle ne présente pas un caractère réglementaire.
5. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants béninois : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. ".
6. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
7. Il ressort des termes de la décision querellée que, après avoir fait mention des conditions dans lesquelles M. B... est entré et a séjourné en France, du fait que celui-ci a déjà fait l'objet en 2014 d'une décision de refus de titre de séjour assorti d'une mesure d'éloignement, le préfet des Alpes-Maritimes a indiqué que " le requérant n'a produit aucun élément de nature à établir que son séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels ". Il ressort en outre des énonciations de cette décision que le préfet a expressément examiné la situation de l'intéressé au regard des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ainsi, l'autorité préfectorale a effectivement procédé aux vérifications qui lui incombaient en présence de la demande présentée par l'intéressé.
8. Si M. B... justifie avoir exercé une activité professionnelle entre 2010 et 2014, en contrat à durée déterminée ou pour de courtes périodes d'intérim, qu'il dispose d'une promesse d'embauche et peut se prévaloir d'une présence en France depuis plus de cinq ans, ni ces circonstances, ni aucun des faits évoqués par l'intéressé ne relèvent de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels tels qu'ils puissent révéler que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui délivrant pas un titre de séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Le requérant ne peut utilement se prévaloir des orientations générales que, par sa circulaire du 28 novembre 2012, le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation.
10. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ".
11. Si M. B... fait valoir qu'il a exercé une activité professionnelle entre 2010 et 2014, cette activité est toutefois restée ponctuelle et l'intéressé ne démontre pas une insertion particulière dans la société française. Alors même que des membres de sa famille sont français, il n'est cependant pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, où réside sa fille, certes majeure, et où il a vécu lui-même au moins jusqu'à l'âge de 35 ans. M. B... a déjà fait l'objet d'une décision préfectorale d'éloignement et n'y a pas déféré. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée, au regard des buts poursuivis par l'administration, porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Cette décision ne méconnaît, par suite, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 28 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique le 12 octobre 2018.
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N° 17MA02935
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