Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 février 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 21 novembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2017 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle, sous réserve que son conseil renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
s'agissant de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
- cette décision est insuffisamment motivée et le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 6 alinéa 1-5 de l'accord franco-algérien ;
- en lui opposant le défaut de justification d'un visa long séjour, le préfet de l'Hérault a commis une erreur de droit.
s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et sérieux de sa situation ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er août 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 janvier 2018.
Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la prorogation d'autorisation provisoire de séjour qui a été délivrée à M. A... par le préfet de l'Hérault le 20 août 2018, valable jusqu'au 19 novembre 2018, a implicitement mais nécessairement eu pour effet d'abroger les décisions du 23 janvier 2017 portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi prises à l'encontre de l'intéressé, rendant sans objet les conclusions de la requête dirigées contre ces décisions.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Coutier a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 21 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination pour l'exécution de la mesure d'éloignement.
Sur l'étendue du litige :
2. Il ressort des pièces du dossier que le 20 août 2018, soit postérieurement à l'introduction de la requête, le préfet de l'Hérault a délivré à M. A... une prorogation d'autorisation provisoire de séjour, valable jusqu'au 19 novembre 2018. La délivrance de ce document a eu implicitement mais nécessairement pour effet d'abroger les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi prises à l'encontre du requérant. Dans ces conditions, les conclusions de la requête tendant à l'annulation de l'arrêté contesté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et qu'il fixe le pays de renvoi sont devenues sans objet et les moyens dirigés contre ces décisions sont inopérants. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur ces conclusions.
3. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault aurait délivré à M. A..., qui séjourne sur le sol français sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour, le titre sollicité. Ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour ont donc conservé leur objet.
S'agissant de la légalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
4. L'arrêté querellé indique que M. A... est séparé de son épouse, entrée en France le 11 avril 2013 avec qui il a eu un enfant né en Algérie le 27 décembre 2007 et qui a donné naissance à des jumeaux le 24 mai 2013 dont l'un est suivi au CHU La Timone et que l'intéressé a sollicité son admission au séjour en qualité de parent d'enfant mineur malade. Cet arrêté précise que l'accord franco-algérien, qui régit de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent s'établir en France et dont relève M. A..., ne prévoit pas la délivrance d'un titre ou d'une autorisation provisoire de séjour en qualité de " de parent d'enfant mineur malade ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault n'aurait pas tenu compte des liens qu'il entretient avec ses trois enfants et notamment avec le jeuneB..., ni qu'il n'aurait pas tenu compte de l'intérêt supérieur de ces enfants, protégé par l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Dans ces conditions, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que ledit arrêté serait insuffisamment motivé ni qu'il serait entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5) au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".
6. Si M. A..., qui est séparé de son épouse et vit à Montpellier, fait valoir qu'il entretient des liens forts avec ses trois enfants à qui il rend visite à Marseille et qu'il héberge lors des vacances scolaires, qu'il participe à leur éducation et leur entretien et qu'il accompagne son jeune fils à chaque consultation médicale et qu'ainsi, le centre de sa vie privée et familiale se situe en France, il ressort des pièces du dossier que la dernière entrée de l'intéressé en France, le 9 décembre 2014, est récente, et est intervenue un an et demi après celle de sa femme, laquelle, au demeurant, ne bénéficie que d'une autorisation provisoire de séjour d'une durée de validité de six mois renouvelable et n'a donc pas vocation à rester sur le territoire français. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de l'enfant qui bénéficie d'un suivi médical rende indispensable la présence de M. A... auprès de lui. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'intéressé se trouverait empêché de rendre visite à ses enfants où qu'il les accueille s'il résidait en Algérie. Enfin, l'appelant n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans ce pays où résident ses parents et sa fratrie et où il a vécu lui-même jusqu'à l'âge de 39 ans. Cet arrêté ne méconnaît, dans ces conditions, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6 alinéa 1-5 de l'accord franco-algérien.
7. Si l'article 9 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié dispense les étrangers mentionnés à l'article 6 du même accord de produire un visa de long séjour lorsqu'ils sollicitent la délivrance d'un certificat de résidence temporaire, il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision de refus de séjour s'il n'avait pas fait état du motif tiré de l'absence de visa long séjour. Dès lors, le moyen tiré d'une erreur de droit dont serait entachée l'arrêté querellé doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande, en tant qu'elle était dirigée contre le refus de séjour pris à son encontre.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".
10. Le présent arrêt, qui constate qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté contesté en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et qu'il fixe le pays de renvoi et qui rejette ses conclusions à fin d'annulation de cet arrêté en tant qu'il porte refus de délivrance d'un titre de séjour, n'appelle aucune mesure particulière d'exécution au sens des articles L. 911-1 ou L. 911-2 du code de justice administrative. Dès lors, les conclusions présentées aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 janvier 2017 du préfet de l'Hérault en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et qu'il fixe le pays de renvoi.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 30 novembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 décembre 2018.
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N° 18MA00929
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