Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 juillet 2017 et le 24 novembre 2017, le SIVOM Val de Banquière, représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2017 du tribunal administratif de Nice ;
2°) de rejeter la demande de Mme D... ;
3°) de mettre à la charge de Mme D... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la lettre de licenciement et l'arrêté sont suffisamment motivés ;
- Mme D... n'a pas fait l'objet d'une double sanction ;
- le licenciement est intervenu au terme d'une procédure régulière ;
- le principe du secret des correspondances personnelles ne peut être invoqué s'agissant d'une télécopie trouvée sur le bureau de l'agent ;
- le licenciement est fondé sur des faits matériellement exacts ;
- la sanction prononcée est proportionnée à la gravité des faits reprochés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 octobre 2017 et 5 décembre 2017, Mme D... conclut au rejet de la requête et demande, en outre, que le SIVOM Val de Banquière lui verse une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- la requête qui se borne à reprendre intégralement les écritures produites par le SIVOM en première instance est irrecevable ;
- les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... D...épouse A...a été recrutée par contrat à durée déterminée du 11 mai 2015 au 31 décembre 2015 par le SIVOM Val de Banquière en qualité de rédacteure territoriale assurant les fonctions de responsable pédagogique du centre de formation " Inter'Val ". Par une décision du 6 août 2015 et un arrêté du 17 août 2015, le président du SIVOM Val de Banquière a prononcé la sanction disciplinaire du licenciement. Par décision du 26 août 2015, il a refusé de supprimer le motif disciplinaire du licenciement des documents transmis à l'intéressée. Mme D... demande au tribunal d'annuler lesdites décisions. Le SIVOM Val de Banquière relève appel du jugement du 16 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé ces décisions.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Il ressort de la motivation de la décision de licenciement du 6 août 2015 confirmée par l'arrêté du 17 août 2015 que le SIVOM Val de Banquière a licencié Mme D... aux motifs tirés de l'utilisation du matériel public à des fins personnelles, du détournement de projets et actions menés par la collectivité à des fins personnelles et de tentatives de discrédit de son employeur auprès de partenaires extérieurs.
3. Pour annuler les décisions contestées, le tribunal s'est fondé sur le fait que seul le grief tiré de l'utilisation du télécopieur du service par Mme D... le 23 juillet 2017 pour réaliser l'envoi d'un fax à caractère personnel à la Caisse d'allocation familiales des Alpes-Maritimes pouvait être retenu à son encontre et qu'un tel motif ne pouvait fonder la mesure de licenciement en litige. Le SIVOM Val de Banquière conteste ce jugement en soutenant que le contenu de cette télécopie révèle les deux autres griefs ayant fondé la mesure de licenciement.
4. En premier lieu, cette télécopie à caractère privé, dont les pièces du dossier ne permettent pas de déterminer les conditions réelles dans lesquelles la supérieure hiérarchique de l'intéressée en a pris connaissance et par conséquent de savoir dans quelle mesure le principe du respect de la vie privée aurait été méconnu, a pour objet la présentation d'une société dénommée " A côté de vous " proposant des prestations d'aide à domicile aux personnes vivant en zone rurale. Mme D..., qui s'identifie dans ce document comme la responsable pédagogique du centre " Inter'val " formation géré par le SIVOM Val de Banquière, est la fondatrice de cette société. Ce document expose que ce sont les difficultés personnelles rencontrées par l'intéressée dans le parcours de prise en charge de sa grand-mère atteinte d'une maladie neurologique et de sa fille non encore scolarisée, qui l'ont conduite à créer cette société ayant vocation à compléter l'offre des services d'aide à la personne proposée par ailleurs par le SIVOM Val de Banquière sur les territoires des douze communes qu'il regroupe. Si Mme D... explique dans ce texte que le SIVOM Val de Banquière n'arrive pas à lui seul à couvrir tous les besoins de la population notamment dans les domaines de la petite enfance et de l'aide à domicile aux personnes âgées dépendantes, une telle affirmation, qui repose sur des termes aucunement vindicatifs et dénués de tout jugement de valeur, ne peut être regardée comme portant le discrédit sur cet établissement public intercommunal. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme D... aurait caché à son employeur la création de sa société privée à but lucratif, la copie du mail personnel adressé le 1er juin 2015 à sa supérieure hiérarchique par lequel elle lui demande de pouvoir discuter de la mise en place du projet de sa société et le rendez-vous obtenu pour le 7 septembre 2015 auprès de la responsable de la petite enfance au sein du SIVOM en présence du directeur général des services, étant au contraire des éléments de fait permettant de justifier des démarches accomplies par l'intéressé pour l'en informer. Les attestations de deux employées du SIVOM dénonçant des agissements de Mme D... en vue soit de débaucher des agents soit d'obtenir des conseils professionnels en faveur de sa société, postérieurs à la décision de licenciement en litige, ne sauraient être retenues au soutien d'une démonstration d'éventuelles fautes professionnelles de l'intéressée. Enfin, si Mme D... a effectivement prétendu dans son document que les mairies de Tourrettes-Levens et Aspremont étaient partenaires de son projet alors que seuls des contacts avec ces interlocuteurs avaient été pris, cette circonstance ne permet pas pour autant de considérer que l'intimée aurait eu pour intention de dévoyer les actions du SIVOM. Dans ces conditions, et alors que le projet de création d'une société à but lucratif dans le domaine des services à la personne était au demeurant compatible avec la nature des fonctions de Mme D... au sein du SIVOM, il ne saurait lui être reproché d'avoir, à travers ce projet, tenté de détourner des actions et des projets menés par cet établissement public dans ce même domaine. Il suit de là que le SIVOM Val de Banquière n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a estimé que les griefs retenus à l'encontre Mme D... de tentatives de discrédit de son employeur auprès de partenaires extérieurs et de détournement à des fins personnelles de projets et actions menés par la collectivité n'étaient pas établis.
5. En deuxième lieu, si le SIVOM soutient en outre que Mme D... n'a pas respecté ses obligations en matière d'autorisation de cumul d'activités en méconnaissance du IV de l'article 25 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dans sa rédaction alors applicable, ce grief, qui n'est pas au nombre des motifs de la décision de licenciement, ne saurait être substitué aux motifs retenus, dès lors qu'une telle substitution priverait l'intéressée des garanties de la procédure disciplinaire.
6. En troisième lieu, si comme il a été dit précédemment, l'utilisation du télécopieur du service par Mme D... à des fins personnelles est établi, un tel fait isolé qui ne présente aucun caractère de gravité ou d'abus, ne saurait suffire par lui-même à justifier la rupture pour motif disciplinaire du contrat de travail de Mme D....
7. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que le SIVOM Val de Banquière n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 6 août 2015, l'arrêté du 17 août 2015 et la décision du 26 août 2015 de son président.
Sur les frais liés au litige :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme D..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par le SIVOM Val de Banquière au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SIVOM Val de Banquière la somme de 2 000 euros au titre des frais engagés par Mme D... en application de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête du SIVOM Val de Banquière est rejetée.
Article 2 : Le SIVOM Val de Banquière versera à Mme D... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat intercommunal à vocation multiple Val de Banquière et à Mme B... D...épouseA....
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2018, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 26 octobre 2018.
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N° 17MA03300
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