Par un jugement n° 1800851 du 5 avril 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 9 juillet 2018 et le 1er octobre 2018, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 5 avril 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 1er février 2018 ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le versement de la somme de 2 000 euros à Me B..., lequel s'engage dans ce cas à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a pas été précédée d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision limitant à trente jours le délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation avant de prendre la décision fixant le pays de destination ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mai 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Guidal, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 5 avril 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de M. A..., ressortissant de la République démocratique du Congo, tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er février 2018 par lequel le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur la légalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". Aux termes de l'article L. 743-3 du même code : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé (...) et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a sollicité son admission au séjour en France au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 août 2017. Le recours formé contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 5 janvier 2018. Il se trouvait ainsi dans le cas où, en application des dispositions précitées du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider de faire obligation à un étranger de quitter le territoire français.
4. Les dispositions précitées de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obligation au préfet d'examiner d'office si le ressortissant étranger, auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié a été définitivement refusée, serait susceptible de bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement. Il lui est toutefois loisible d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement d'une autre disposition du code. Il lui est aussi possible, exerçant le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant un titre de séjour, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle.
5. Il ressort des pièces du dossier que la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français a notamment pour motif que " l'intéressé n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ". Il ne saurait toutefois résulter de ce seul constat que le préfet se serait refusé à tenir compte des problèmes de santé de M. A... et n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de sa situation au regard des éléments en sa possession. Le moyen tiré du défaut d'un tel examen ne peut, par suite, qu'être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au litige : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...). ".
7. Il ressort des pièces du dossier et notamment des différents certificats médicaux produits que M. A... est atteint d'une déficience auditive moyenne bilatérale avec une perte auditive moyenne de 45dB justifiant un appareillage auditif et un contrôle de l'évolution locale et audiométrique. Ces pièces se bornent toutefois à faire état de deux interventions chirurgicales subies par l'intéressé en France en 2017 et 2018, de la bonne cicatrisation à la suite de ces interventions et de la persistance de cette perte auditive moyenne. S'il soutient également présenter certains troubles psychologiques, l'ensemble de ces éléments n'est pas de nature à établir que le défaut de prise en charge de son état de santé serait susceptible d'entraîner pour M. A... des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, et à supposer même que le contrôle de l'évolution audiométrique ne puisse pas être assuré en République démocratique du Congo, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de ce que l'arrêté en litige serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
Sur la légalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours :
8. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation personnelle de M. A... justifie que lui soit accordé, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui octroyer un tel délai doit être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
10. Selon l'article L. 513-2 du code d'entrée et de séjour des étrangers, un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce dernier texte stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
11. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. A... avant de fixer comme pays d'éloignement celui dont il a la nationalité. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du pour estimer que l'intéressé n'était pas exposé à des risques vitaux dans son pays et n'aurait pas procédé à l'examen de la situation du requérant manque en fait.
12. Il ne ressort pas des pièces du dossier, d'une part, que la situation d'affrontements ponctuels à Kinshasa en République démocratique du Congo, malgré leur gravité, serait caractérisée par un degré de violence tel qu'il existerait des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil renvoyé dans ce pays y serait exposé, du seul fait de sa présence, à un risque réel de traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. D'autre part, si M. A... se présente comme un opposant au régime du président Kabila et soutient avoir été arrêté et emprisonné lors d'affrontements en septembre 2016, il n'assortit d'aucun élément précis ou vérifiable ses affirmations. Notamment, les résultats de l'examen médico-légal en date du 20 octobre 2017 selon lesquels " les lésions objectivées sont compatibles avec des traumatismes au niveau des oreilles, tels qu'allégués " ne suffisent pas à établir le bien-fondé de ses allégations dont ni l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ni la Cour nationale du droit d'asile n'ont d'ailleurs retenu l'existence. Ainsi, le moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été prise en méconnaissance des dispositions et stipulations précitées doit être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019 où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 mars 2019.
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N° 18MA03179
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