3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence "vie privée et familiale" d'un an, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;
4°) de mettre à la charge de 1'État le paiement de la somme de 2 000 euros au titre des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
1°) s'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :
- ont été méconnues les stipulations de l'article 6, 7) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- il a été hospitalisé durant neuf mois, entre le 26 juillet 2013 et le 23 janvier 2015 ;
- il souffre d'une affection psychiatrique extrêmement grave ;
- il doit impérativement suivre la totalité de son traitement médicamenteux ;
- il doit poursuivre la relation de soin existante avec son médecin traitant ;
- il ne pourra bénéficier de l'intégralité de son traitement dans son pays d'origine, puisqu'ainsi qu'en atteste la direction générale de la pharmacie et des équipements de santé du ministère de la santé, de la population et de la réforme hospitalière de la République algérienne démocratique et populaire, le médicament Seresta (Oxazepam) n'existe pas en Algérie ;
- enfin, la prise en charge des soins psychiatriques souffre d'importantes lacunes en Algérie ;
- il ne pourra y faire l'objet d'un traitement approprié dès lors que son état de santé exige régulièrement des hospitalisations de longue durée ;
- la décision attaquée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
2°) s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- le refus de titre de séjour étant illégal, cette décision l'est également ;
- ont été méconnues les dispositions de l'article L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
3°) s'agissant de la décision fixant le pays de destination : le refus de titre de séjour étant illégal, cette décision l'est également.
Par ordonnance du 23 juillet 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 30 août 2015, à 12 heures.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 juin 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Baux.
1. Considérant que M.C..., ressortissant algérien, relève appel du jugement du
29 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 mai 2014 du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant l'Algérie comme pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé d'office ;
Sur la légalité de l'arrêté du 9 mai 2014 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : ...7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays.(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile applicable aux demandes de titre de séjour formées par les ressortissants algériens en application des stipulations précitées : " (...) Le préfet délivre la carte de séjour temporaire, au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...). L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé.(...) Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 pris en application de l'article R. 313-22 du code précité : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. " ;
3. Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage sur leur fondement de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande, de vérifier que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement décider l'éloignement vers l'Algérie que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans ce pays ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
4. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'attestation établie le 19 juillet 2012, par le consul général de la République algérienne démocratique et populaire, à Marseille, que M.C..., qui souffre de troubles psychologiques sévères, ne s'est vu délivrer aucun document de voyage lui permettant de quitter le territoire national ; qu'ainsi, le séjour de l'appelant présentait, le 9 mai 2014, date de l'arrêté litigieux, un caractère d'ancienneté suffisant pour permettre de regarder l'intéressé comme résidant habituellement en France au sens des stipulations précitées de l'article 6, 7) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; que, d'autre part, les différentes attestations médicales produites à l'instance établissent, non seulement que l'état de santé de M. C...nécessite la prise d'un traitement médicamenteux complexe, composé de sept molécules différentes, mais également l'exceptionnelle gravité de cet état de santé ; qu'enfin, dès lors qu'il est attesté, le 28 mai 2014, par la direction générale de la pharmacie et des équipements de santé du ministère de la santé, de la population et de la réforme hospitalière de la République algérienne démocratique et populaire que l'oxazepam (Seresta), médicament dont l'arrêt pourrait engendrer un risque suicidaire, n'est pas enregistré en Algérie et, qu'à cet égard, le préfet des Bouches-du-Rhône ne démontre pas, par la seule production d'une liste de médicaments existant en Algérie et publiée au journal officiel de la République algérienne, sur laquelle, au demeurant, l'oxazepam ne figure pas, qu'eu égard à la complexité du traitement que M. C...suit, celui-ci puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié et complet en Algérie ; qu'ainsi, en rejetant la demande de l'appelant tendant à la délivrance de son certificat de résidence mention " vie privée et familiale ", le préfet des Bouches-du-Rhône a fait une inexacte appréciation de la situation de M. C...et a, de ce fait, méconnu les stipulations susvisées de l'article 6, 7) de l'accord franco-algérien ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que la présente décision implique que le préfet des Bouches-du-Rhône délivre à M. C...le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale", en application des stipulations susmentionnées de l'article 6, 7) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ; qu'il y a lieu d'ordonner cette délivrance dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à la part contributive de l 'Etat accordée au titre de l'aide juridictionnelle obtenue par l'appelant ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 29 décembre 2014 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 9 mai 2014 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à M. C...un certificat de résidence, d'un an, portant la mention "vie privée et familiale", dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à MeA..., la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part contributive de l'Etat accordée au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à Me A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 12 janvier 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Gonzales, président de chambre,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme Baux, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 2 février 2016.
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N° 15MA01316