Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2015, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2014 du préfet de Vaucluse ;
3°) d'annuler l'arrêté du 10 novembre 2015 du préfet de Vaucluse ;
4°) d'enjoindre au préfet de Vaucluse de lui délivrer un titre de séjour dès notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État le paiement à Me C... de la somme
de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de
l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de séjour du 13 février 2014 ne lui ayant pas été notifiée, sa requête en annulation de cette décision est donc recevable ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de son droit d'être entendu ;
- elle est entachée d'une erreur de fait ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale et privée ;
- la décision d'obligation de quitter le territoire en litige du 10 novembre 2015 n'est pas suffisamment motivée ;
- cette décision est illégale du fait de l'illégalité de la décision du 13 février 2014 lui servant de fondement ;
- cette décision est entachée d'erreur de fait ;
- contrairement à ce que soutient l'administration, il est entré régulièrement sur le territoire français ;
- cette décision porte atteinte à sa vie familiale et privée ;
- elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision lui refusant un délai de départ volontaire se fonde à tort sur l'inexécution d'une précédente obligation de quitter le territoire et n'a pas respecté son droit d'être entendu ;
- la décision portant placement en rétention a également méconnu son droit d'être entendu ; elle est entachée d'une erreur de fait, comme la décision refusant le délai de départ volontaire.
Une mise en demeure a été adressée le 6 décembre 2016 au préfet de Vaucluse.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive n° 2008/115/CE ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutel,
- et les observations de MeC..., représentant M. B....
1. Considérant que M. B..., ressortissant marocain né le 1er novembre 1980, a été interpellé le 10 novembre 2015, en possession de résine de cannabis, et placé en garde à vue ; que, le même jour, il a été placé en rétention administrative en vue de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire sans délai prononcée par le préfet de Vaucluse ; qu'il a demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nîmes d'annuler, d'une part, l'arrêté du 13 février 2014 par laquelle cette autorité l'avait précédemment obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et, d'autre part, l'arrêté du 10 novembre 2015 par lequel le préfet de Vaucluse l'a désormais obligé à quitter le territoire français, lui a refusé un délai de départ volontaire et l'a placé en rétention administrative ;
2. Considérant que M. B... a été placé en rétention administrative sur le fondement de l'obligation de quitter le territoire du 10 novembre 2015 ; qu'ainsi, le magistrat désigné n'était compétent que pour statuer sur la légalité de cette dernière décision, en application de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en l'espèce, M. B... ne peut être regardé que comme invoquant le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire du 13 février 2014, notifié le lendemain, ayant servi de fondement à l'obligation de quitter le territoire en litige ;
3. Considérant que la recevabilité d'un moyen s'apprécie à la date à laquelle il est soulevé devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'ainsi que l'a relevé le premier juge, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis de réception postal de cette décision, que l'arrêté contesté du 13 février 2014 a été régulièrement notifié à M. B... le 14 février 2014 ; que l'intéressé n'apporte sur ce point aucun commencement de preuve ni aucun argument probant de nature à réfuter sérieusement les pièces versées sur ce point au dossier par l'administration ; qu'il s'ensuit que, à la date d'introduction de la requête devant le premier juge, ce moyen, présenté au-delà du délai de recours contentieux d'un mois ouvert contre cette décision, n'était pas recevable ;
4. Considérant que la décision attaquée vise les textes applicables et les éléments de la situation du requérant ; que par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige obligeant ce dernier à quitter le territoire doit être écarté ;
5. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne selon lequel un administré a le droit d'être entendu avant l'édiction de toute mesure individuelle défavorable, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge, dès lors que la réponse du tribunal est elle-même suffisante et n'appelle pas de nouvelles précisions en appel ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'ainsi qu'il vient d'être dit,
M. B... a fait l'objet d'une précédente décision d'obligation de quitter le territoire en date du 13 février 2014, régulièrement notifiée ; qu'en outre, l'intéressé n'était titulaire d'aucun titre de séjour en cours de validité délivré par un État membre de l'Union européenne ni d'aucun visa de type Schengen lui permettant d'entrer régulièrement sur le territoire ; que, par suite, la décision du 10 novembre 2015 portant obligation de quitter le territoire n'est entachée d'aucune erreur de fait ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans enfants à charge, a déclaré être en France depuis quatre ans environ à la date de la décision attaquée, alors qu'il était titulaire d'un titre de séjour espagnol valable jusqu'en septembre 2012 ; qu'en tout état de cause, l'intéressé ne conteste pas, ainsi qu'il résulte des mentions de la décision attaquée, qu'il a quitté le Maroc à l'âge de 29 ans au moins ; qu'il ressort de ses propres déclarations qu'il n'est pas démuni de toute attache dans son pays d'origine où il a déclaré avoir un demi-frère et une soeur cadette ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'âge de l'intéressé qui a passé l'essentiel de son existence au Maroc, des conditions de son séjour en France et des effets d'une mesure d'obligation de quitter le territoire, le préfet de Vaucluse, en prenant la décision contestée, n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
8. Considérant qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'en prenant la décision en litige, le préfet de Vaucluse aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B... ;
Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire et de la décision de placement en rétention administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) " ; qu'aux termes de son article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. (...) ; qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du même code : " (...) Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) " ;
10. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne selon lequel un administré a le droit d'être entendu avant l'édiction des décisions en litige, doit également être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge dès lors que la réponse du tribunal est suffisante et n'appelle pas de nouvelles précisions en appel ;
11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... s'est maintenu sur le territoire en dépit d'une précédente mesure d'éloignement ; qu'ayant été interpellé en situation irrégulière, il a déclaré vouloir se maintenir sur le territoire national ; que par suite, c'est sans erreur d'appréciation que le préfet de Vaucluse a refusé à M. B... un délai de départ volontaire en application du 3°) de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
12. Considérant qu'ainsi que l'a relevé le premier juge, l'intéressé, sans charge de famille, alors même qu'il justifierait d'une adresse connue de l'administration et compte tenu de ses conditions d'existence, ne présentait pas les garanties de représentation suffisantes propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à la mesure d'obligation de quitter le territoire prononcée à son encontre ; qu'il se trouvait dans le cas prévu par les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile citées, qui permettaient à l'administration de prononcer son placement en rétention administrative ; qu'il suit de là, que le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation, en évitant une assignation à résidence, doit être écarté ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
14. Considérant que les dispositions susmentionnées font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante, le remboursement des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ; qu'ainsi les conclusions présentées à ce titre par ce dernier doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressé au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2017, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- M. Coutel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2017.
N° 15MA04818 2