Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 décembre 2018 et le 10 juillet 2019, la commune de Palavas-les-Flots, représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 octobre 2018 ;
2°) d'annuler l'avis du 19 septembre 2016 du conseil de discipline de recours de la fonction publique territoriale de Midi-Pyrénées ;
3°) de mettre à la charge de M. D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que le raisonnement du tribunal l'est ;
- la sanction d'exclusion temporaire de six mois n'est pas proportionnée à la gravité des fautes reprochées à M. D....
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2019, M. D..., représenté par le Cabinet Maillot, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Palavas-les-Flots d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la commune de Palavas-les-Flots ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la commune de Palavas-les-Flots, et de Me B..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 9 mai 2016, le maire de Palavas-les-Flots a prononcé, à la suite de l'avis favorable à cette mesure émis à la majorité le 1er avril précédent par le conseil de discipline, la révocation de M. D..., agent de police municipale depuis 2011. A la suite de la saisine par cet agent, dans le cadre des dispositions de l'article 91 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, du conseil de discipline de recours, ce dernier a, le 13 septembre 2016, recommandé une exclusion temporaire pour une durée de six mois. La commune de Palavas-les-Flots interjette appel du jugement du 19 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet avis du 13 septembre 2016.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. La commune de Palavas-les-Flots ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché son raisonnement d'irrégularité pour demander l'annulation du jugement attaqué.
3. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : [...] Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans; Quatrième groupe: la mise à la retraite d'office; la révocation ". Aux termes de l'article 91 de cette même loi : " Les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental dans les cas et conditions fixés par un décret en Conseil d'État. L'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours ".
4. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes. Il lui appartient également de rechercher si la sanction proposée par un conseil de discipline de recours statuant sur le recours d'un fonctionnaire territorial est proportionnée à la gravité des fautes qui lui sont reprochées.
5. Il ressort des pièces du dossier que d'une part, lors de la nuit du 14 au 15 juillet 2014, M. D... a refusé d'intervenir lors d'une rixe entre deux bandes de jeunes, malgré l'appel d'assistance de collègues sur place et qu'au cours de cette même nuit, il a commis des violences à l'égard d'un autre agent, sur le site de la fête foraine, entraînant une incapacité temporaire de travail de trois jours. D'autre part, par un courrier du 15 octobre 2014, cet agent a diffusé une lettre ouverte aux médias nationaux et locaux dénonçant des dysfonctionnements du poste de police sur un ton polémique et irrespectueux envers son supérieur hiérarchique et les élus. S'il ressort des mentions figurant sur ce courrier que M. D... a agi non en son nom propre mais en qualité de délégué syndical, les propos tenus par celui-ci dans ce courrier sont particulièrement graves à l'encontre de son supérieur hiérarchique et du maire de la commune qui sont accusés de plusieurs délits et dépassent ainsi l'exercice de ses fonctions syndicales. Ces faits qui constituent un manquement à l'obligation de respect de la hiérarchie, à l'honorabilité des fonctions, à l'image de la ville et un manquement à l'obligation d'exécuter ses missions et une atteinte à l'obligation de réserve constituent des fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire.
6. Toutefois, les fautes retenues à la charge de l'intéressé, tout comme ses deux refus de prendre son service et l'agression verbale qu'il aurait commise à l'encontre d'un de ses collègues le 20 février 2014, ont été commises sur une période brève alors que, d'une part, M. D... avait donné toute satisfaction dans l'exercice de ses fonctions depuis son recrutement par la commune de Palavas-les-Flots en 2011 et que, d'autre part, le service de la police municipale de Palavas-Les-Flots connaissait depuis plusieurs années de graves dysfonctionnements. D'ailleurs, alors que le service de police municipale a fait l'objet d'un signalement du médecin du travail le 30 septembre 2014 mettant en exergue un risque psychosocial dans ce service et des cas de souffrance au travail dont certains ont nécessité une prise en charge médicale et un arrêt de travail, M. D... a lui-même été arrêté le 11 août 2014 par son médecin généraliste, lequel a indiqué que l'intéressé était victime d'une souffrance psychologique au travail, de troubles anxieux, de l'humeur et du sommeil réactionnels à des tensions professionnelles et, par un jugement du 27 octobre 2017 confirmé par la Cour de céans le 18 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 22 mai 2015 par lequel le maire de Palavas-Les-Flots avait refusé de reconnaître son arrêt maladie du 11 août 2014 comme étant imputable au service. Dans ces conditions particulières, la commune de Palavas-les-Flots n'est pas fondée à soutenir que le conseil de discipline de recours aurait entaché son avis d'une erreur d'appréciation en substituant une sanction d'exclusion temporaire de six mois, qui est une sanction du 3e groupe, à celle d'une sanction de révocation, qui est une sanction de 4e groupe.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. D..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à la commune de Palavas-Les-Flots la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'appelante une quelconque somme au titre de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Palavas-Les-Flots est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Palavas-les-Flots, à M. F... D..., au préfet de la région Occitanie, préfet de la Haute Garonne, et au centre de gestion de la fonction publique territoriale de Haute Garonne.
Délibéré après l'audience du 30 mars 2021, où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme C..., président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2021.
N° 18MA05365 2