Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 27 août 2020 et par un mémoire complémentaire enregistré le 25 janvier 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Germain-Morel, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2020 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 3 octobre 2018 du maire de la commune de Sérignan-du-Comtat, ensemble la décision implicite de rejet de leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Sérignan-du-Comtat la somme de 3 000 euros à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- il n'est pas établi que la décision en litige ait été transmise au préfet en méconnaissance des articles R. 424-12 et A. 424-14 du code de l'urbanisme ;
- la consultation facultative du SDIS aurait permis d'éclairer la commune dans sa prise de décision sur le projet d'un bassin comme mesure de lutte contre l'incendie ;
- l'erreur de visa quant au plan de prévention des risques d'inondation inapplicable est susceptible de créer une confusion sur les motifs de la décision en litige ;
- le maire ne pouvait pas se fonder sur le règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la zone N de la commune, qui prévoit lui-même la primauté du plan de prévention des feux de forêts (PPRIFF) sur le PLU ;
- le maire ne pouvait pas fonder la décision en litige sur les recommandations du PPRIFF relatives aux créations et aménagements nouveaux et non sur celles relatives à un bâtiment existant ;
- le règlement de la zone B3 du PRRIFF autorise le projet litigieux ;
- le refus litigieux, qui aggrave la vulnérabilité au feu des personnes et des biens de la construction existante, méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 octobre 2020, la commune de Sérignan-du-Comtat, représentée par la SCP Territoires Avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des requérants la somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carassic,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Germain-Morel représentant les consorts A... et Me Teles représentant la commune de Sérignan-du-Comtat.
Considérant ce qui suit :
1. Par l'arrêté en litige du 3 octobre 2018, le maire de la commune de Sérignan-du-Comtat s'est opposé à la déclaration préalable présentée le 13 septembre 2018 par M. et Mme A... en vue de la construction d'un bassin semi-enterré de 51 m3 sur un terrain cadastré A n° 301 situé 1385 route de Lagarde, classé en zone N du plan local d'urbanisme de la commune. M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cet arrêté, ainsi que de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire sur leur recours gracieux tendant au retrait de cet arrêté. Par le jugement dont M. et Mme A... relèvent appel, les premiers juges ont rejeté leur demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Pour s'opposer à la déclaration préalable en litige, le maire s'est fondé sur le motif tiré de ce que la création d'un bassin n'était pas autorisée par les articles N1 et N2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune approuvé le 30 janvier 2014.
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement.(...) Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes (...). ".Aux termes de l'article 2131-2 du même code : " Sont soumis aux dispositions de l'article L. 2131-1 les actes suivants : 6° Le permis de construire et les autres autorisations d'utilisation du sol et le certificat d'urbanisme délivrés par le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale, lorsqu'il a reçu compétence dans les conditions prévues aux articles L. 422-1 et L. 422-3 du code de l'urbanisme (...) ".
4. Il résulte de ces dispositions que le défaut de transmission au représentant de l'Etat d'un acte pris par l'autorité communale est sans incidence sur sa légalité et fait seulement obstacle à ce qu'il devienne exécutoire. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige n'aurait pas été transmis au contrôle de légalité est inopérant et doit être écarté. En tout état de cause, il ressort de l'attestation du maire du 3 décembre 2019, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire laquelle n'est pas rapportée en l'espèce, que l'arrêté en litige a été transmis le 12 octobre 2018 au préfet de Vaucluse dans le cadre de son contrôle de légalité, ainsi que le confirme le bordereau d'envoi du 9 octobre 2018 adressé par le maire au préfet.
5. En deuxième lieu, dès lors que la consultation du SDIS de Vaucluse n'était pas exigée, ainsi que le reconnaissent les requérants eux-mêmes, le moyen tiré du vice de procédure dont serait entachée la décision en litige doit être écarté.
6. En troisième lieu, la circonstance que la décision en litige vise à tort le plan de prévention des risques d'inondation du bassin versant de l'Aygues, de la Meyne et du Rieu, applicable sur le territoire communal mais inapplicable au terrain d'assiette du projet, est sans incidence sur la légalité de la décision en litige, qui, en tout état de cause, ne s'est pas fondée sur le plan de prévention des risques d'inondation pour s'opposer aux travaux envisagés par les requérants.
7. En quatrième lieu, d'une part, le règlement du PLU de la commune approuvé le 30 janvier 2014, accessible au juge comme aux parties sur le site internet de la commune, prévoit que la zone N correspond aux secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur caractère d'espaces naturels soit de leur caractère d'espaces naturels. Il précise que cette zone est concernée par le plan de prévention des risques Incendie de Forêt du massif d'Uchaux, applicable au territoire communal de la commune de Sérignan-le-Comtat, annexé au PLU en tant que servitude d'utilité publique et que, dans les secteurs concernés, le règlement du PPRIF s'applique en plus et prioritairement à celui du PLU. L'article N1 du règlement interdit toute construction et installation à l'exception de celles mentionnées à l'article N2 de ce règlement. L'article N2 autorise uniquement les constructions liées à la gestion des réseaux et des services publics, les travaux d'affouillement ou exhaussement nécessaires à des constructions compatibles avec l'aménagement de la zone et l'aménagement des constructions existantes dans leur volume d'origine et sans changement de destination.
8. D'autre part, le PPRIF dans le massif d'Uchaux approuvé le 30 septembre 2011 définit la zone bleue comme une zone exposée à un alea feu de forêt moyen à très fort, dans les lesquelles les moyens de défense permettent de limiter le risque et le secteur B3, dans lequel se situe le projet, comme une zone d'alea feu de forêt moyen nécessitant uniquement des mesures d'autoprotection des bâtiments qui y sont construits en complément des mesures générales de construction (voirie, défense extérieure contre l'incendie).
9. Les requérants soutiennent que leur projet, qui ne prévoit plus selon eux l'aménagement d'une piscine d'agrément qui avait fait l'objet d'un arrêté d'opposition à déclaration préalable le 30 juillet 2018 du maire, consiste en l'édification d'un bassin semi-enterré qui est un dispositif de lutte contre les incendies, recommandé par le PRIFF de la commune, qui doit être appliqué prioritairement par rapport au plan local d'urbanisme de la commune sur lequel se fonde la décision en litige et qui interdit pour sa part la construction du bassin litigieux. Toutefois, la précision contenue dans le règlement du PLU de la commune selon laquelle le règlement du PPRIF de la commune s'applique "en plus et prioritairement à celui de la zone du PLU" n'implique pas que le règlement du PPRIF s'applique de manière générale, dans tous les cas, prioritairement sur celui du PLU, dès lors que les prescriptions de ce plan de prévention, qui constitue une servitude d'utilité publique annexée au plan local d'urbanisme, qui a pour objet de définir des zones exposées à des risques à l'intérieur desquelles s'appliquent des contraintes d'urbanisme importantes et a ainsi pour effet de déterminer des prévisions et règles opposables aux personnes publiques ou privées au titre de la délivrance des autorisations d'urbanisme qu'elles sollicitent, ne font pas obstacle à ce que le plan local d'urbanisme adopte, le cas échéant, des règles plus contraignantes quant aux possibilités de construction sur le même secteur. En l'espèce, l'autorisation de créer un réservoir, un bassin ou une piscine en tant que dispositifs de protection contre l'incendie au sens du PPRIF ne fait pas obstacle à l'application des règles plus restrictives du règlement du PLU de la commune quant aux droits de construire, mais compatibles avec le PPRIF. Dès lors, le maire a pu à bon droit se fonder sur les articles N1 et N2 du règlement du plan local d'urbanisme, qui interdisent la création d'un bassin en zone naturelle du plan local d'urbanisme, dès lors qu'un bassin ne peut être regardé comme une construction liée à la gestion des réseaux et des services publics au sens de l'article N2 du règlement. Par suite, le moyen tiré de ce que le projet respecterait les dispositions du PPRIF est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision en litige. Les requérants ne sont ainsi pas fondés à soutenir que le maire aurait commis une erreur de droit en s'opposant sur le fondement du règlement du PLU à leur projet.
10. En dernier lieu, dès lors que le projet de création d'un bassin n'est pas de nature à porter atteinte à la salubrité et à la sécurité publique, le maire, qui ne s'est d'ailleurs pas fondé sur ce motif dans la décision en litige, n'a pas méconnu les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en s'opposant aux travaux déclarés par les requérants.
11. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
12. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Sérignan-du-Comtat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par M. et Mme A... et non compris dans les dépens. Il y a lieu de mettre à la charge des requérants la somme de 2 000 euros à verser à la commune de Sérignan-du-Comtat sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : M. et Mme A... verseront la somme de 2 000 euros à la commune de Sérignan-du-Comtat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et à la commune de Sérignan-du-Comtat.
Délibéré après l'audience du 8 février 2022, où siégeaient :
- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carassic, première conseillère,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 février 2022.
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N° 20MA03188