Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 28 août 2014, Mme A..., représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 3 juillet 2014 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler la décision précitée du 23 mars 2012 et la décision implicite par laquelle son recours gracieux a été rejeté ;
3°) d'enjoindre à la commune de Nîmes de prendre une nouvelle décision sur sa notation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Nîmes la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est adjoint technique territorial de deuxième classe, affectée en qualité d'auxiliaire de puériculture à la crèche des Alisiers ; le 8 novembre 2010, la note de 18,75 lui a été attribuée ;
- elle a reçu le 6 janvier 2012 sa fiche de notation au titre de 2011, lui attribuant une note de 17,54 au titre de l'année 2011 ;
- suite à son recours, la commission administrative paritaire a émis, le 27 février 2012, un avis favorable à la révision de sa note ; par lettre du 23 mars 2012, M. E... a décidé de maintenir sa note de 17,54 ; elle a formé un recours administratif contre cette décision, qui a été implicitement rejeté ;
- en méconnaissance de l'article 76 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, sa fiche de notation a été signée par le chef de service, le directeur général des services, et le maire, sans que les signataires aient disposé d'une compétence à cet effet ; en particulier, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le maire de Nîmes ne pouvait pas s'approprier la position du supérieur ; le chef de service n'avait pas compétence pour signer la feuille de notation ;
- M. E..., qui a signé la décision de maintenir la notation, ne justifiait pas d'une délégation à cette fin ;
- en méconnaissance de l'article 2 du décret du 4 mars 1986, il n'a pas été demandé à Mme A... quels étaient ses voeux relatifs à ses fonctions et affectations ;
- elle n'a pas bénéficié d'un entretien préalable à la notation avec le chef de service de la crèche ; l'entretien, intervenu le 18 octobre 2011, n'était pas un entretien préalable à la notation mais avait pour objet la contestation d'un nouveau planning ; les reproches qui lui ont été adressés dans la feuille de notation n'ont pas été abordés à cette occasion ; la notation est donc intervenue sans qu'elle ait été convoquée pour discuter de son avancement ; et il n'est pas justifié que la commune de Nîmes ait eu recours à la procédure expérimentale et dérogatoire en ce qui concerne la notation ;
- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ; le chef de service a reconnu que Mme A... appliquait les compétences acquises en formation ; et les manquements reprochés en matière d'assiduité et de travail en équipe ne sont pas établis ; les problèmes de ponctualité relevés sont dus à un problème de gestion du personnel et au manque d'effectifs au sein de la crèche, qui ne lui sont pas imputables ; d'ailleurs, la commission administrative paritaire a émis un avis défavorable au maintien de sa note ; elle n'a jamais reçu de rappel à l'ordre pour absence injustifiée ;
Par un courrier du 17 septembre 2015, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date à partir de laquelle la clôture de l'instruction sera susceptible d'être prononcée et de la date prévisionnelle de l'audience.
Par un mémoire, enregistré le 14 octobre 2015, et un mémoire complémentaire, enregistré le 30 novembre 2015, la commune de Nîmes, représentée par le cabinet d'avocats Maillot Associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante de la somme de 1 500 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la feuille de notation a été signée par des autorités disposant d'une compétence pour ce faire ; et le signataire de la décision qui a rejeté le recours de Mme A..., M. E..., disposait d'une délégation à cet effet ;
- l'administration n'était pas tenue de recueillir les voeux de l'agent, eu égard au dispositif expérimental d'évaluation mis en place ;
- l'agent étant en congé maladie à compter du 18 octobre 2011, aucun entretien préalable ne pouvait être organisé, alors que, par ailleurs, l'administration avait l'obligation de noter Mme A... ;
- la notation attribuée à Mme A... n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Un avis d'audience portant clôture immédiate de l'instruction a été émis le 8 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-473 du 14 mars 1986 relatif aux conditions générales de notation des fonctionnaires territoriaux ;
- le décret n° 2010-716 du 29 juin 2010 ;
- le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 relatif à l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Portail,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., pour la commune de Nîmes.
1. Considérant que Mme A... est adjoint technique territorial de deuxième classe, affectée en qualité d'auxiliaire de puériculture à la crèche des Alisiers de Nîmes ; qu'elle a demandé, le 6 janvier 2012, la révision de la notation qui lui a été attribuée pour 2011 ; que, le 27 février 2012, la commission administrative paritaire compétente a émis un avis favorable à la révision de sa notation ; que, le 23 mars 2012, le maire de la commune de Nîmes a décidé de ne pas faire droit à la demande de révision et de maintenir la notation attribuée à Mme A... ; que celle-ci a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler cette décision du 23 mars 2012, et la décision implicite par laquelle le maire a rejeté son recours administratif formé contre cette décision ; que, par un jugement du 3 juillet 2014, dont Mme A... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes l'article 76 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, dans sa rédaction applicable à la date des décisions attaquées : " Le pouvoir de fixer les notes et appréciations générales exprimant la valeur professionnelle des fonctionnaires dans les conditions définies à l'article 17 du titre Ier du statut général est exercé par l'autorité territoriale au vu des propositions du secrétaire général ou du directeur des services de la collectivité ou de l'établissement. Les commissions administratives paritaires ont connaissance des notes et appréciations ; à la demande de l'intéressé, elles peuvent en proposer la révision. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. " ; qu'aux termes de l'article 76-1 de cette loi, dans sa rédaction également applicable à la date de ces décisions : " Au titre des années 2010, 2011 et 2012 l'autorité territoriale peut se fonder, à titre expérimental et par dérogation au premier alinéa de l'article 17 du titre Ier du statut général et à l'article 76 de la présente loi, sur un entretien professionnel pour apprécier la valeur professionnelle des fonctionnaires prise en compte pour l'application des articles 39, 78 et 79 de la présente loi. L'entretien est conduit par leur supérieur hiérarchique direct et donne lieu à l'établissement d'un compte rendu. La commission administrative paritaire peut, à la demande de l'intéressé, en proposer la révision(...).Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. " ; que le décret n° 2010-716 du 29 juin 2010, pris pour l'application de l'article 76-1 précité, dispose : " Les dispositions du présent décret sont rendues applicables, à titre expérimental, aux fonctionnaires territoriaux mentionnés à l'article 1er du décret du 14 mars 1986 susvisé par une délibération de l'organe délibérant compétent de la collectivité territoriale ou de l'établissement public local dont ils relèvent. La délibération mentionnée au premier alinéa vise les fonctionnaires territoriaux concernés soit dans leur totalité, soit par cadre d'emplois ou emplois. Dans ce cas, les dispositions du décret du 14 mars 1986 précité cessent d'être applicables à ces fonctionnaires territoriaux. " ;
3. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions précitées du décret du 29 juin 2010 aient été rendues applicables aux fonctionnaires territoriaux relevant de la commune de Nîmes par une délibération du conseil municipal de ladite commune à la date des décisions attaquées ; que, dès lors, la procédure de notation des fonctionnaires territoriaux de cette commune demeurait régie, à cette date, par les dispositions du décret susvisé du 14 mars 1986 ;
4. Considérant, en second lieu, que l'article 2 du décret précité du 14 mars 1986 dispose : " : La notation est établie chaque année au cours du dernier trimestre, après que l'intéressé a fait connaître ses voeux relatifs aux fonctions et affectations qui lui paraîtraient les plus conformes à ses aptitudes, et après avis, le cas échéant, des supérieurs hiérarchiques de l'intéressé. Article 3 La fiche individuelle de notation comporte :1° Une appréciation d'ordre général exprimant la valeur professionnelle de l'agent et indiquant, le cas échéant, les aptitudes de l'intéressé à exercer d'autres fonctions dans le même grade ou dans un grade supérieur ;2° Une note chiffrée allant de 0 à 20 ;3° Les observations de l'autorité territoriale sur les voeux exprimés par l'intéressé. Article 4 La fiche individuelle est communiquée à l'intéressé qui atteste en avoir pris connaissance. Cette communication intervient trois semaines au moins avant la réunion de la commission administrative paritaire compétente. Le fonctionnaire peut demander la révision de l'appréciation et de la note à l'autorité territoriale. Il doit lui faire parvenir cette demande huit jours au moins avant la réunion de la commission administrative paritaire. Article 5 : Les commissions administratives paritaires sont réunies au cours du premier trimestre de l'année pour l'examen des fiches individuelles de notation. L'autorité territoriale informe le fonctionnaire de l'appréciation et de la note définitives(...) " ;
5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées du décret 14 mars 1986 que la notation est établie après que l'intéressé a fait connaître ses voeux relatifs aux fonctions et affectations qui lui paraîtraient les plus conformes à ses aptitudes ; qu'il ressort des pièces du dossier que la feuille de notation de Mme A... a été établie sans qu'elle ait pu préalablement exprimer ses voeux relatifs aux fonctions et affectations qui lui paraîtraient les plus conformes à ses aptitudes ; qu'en s'abstenant de mettre l'intéressée en mesure de formuler de tels voeux avant d'établir sa notation, le maire de Nîmes a commis une erreur de droit; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme A... est fondée à soutenir que la décision du 23 mars 2012 par laquelle le maire de la commune de Nîmes a refusé de réviser sa notation et la décision implicite rejetant son recours gracieux formé contre cette décision sont entachées d'illégalité ; qu'elle est fondée, par suite, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande, et qu'elle est, dès lors, fondée à demander l'annulation de ce jugement ainsi que de ces décisions ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que l'article L. 911-2 du code de justice administrative dispose : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;
7. Considérant que, du fait de l'entrée en vigueur du décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 relatif à l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires territoriaux, qui a remplacé la notation annuelle par l'entretien professionnel, le présent arrêt implique nécessairement que le maire de la commune de Nîmes procède à un entretien professionnel de Mme A... au titre de l'année 2011 dans les conditions prévues au décret précité du 16 décembre 2014; qu'il y a lieu, par suite, de lui enjoindre de procéder à cet entretien professionnel dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
8. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Nîmes une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par contre, Mme A... n'étant ni partie perdante ni tenue aux dépens, les conclusions de la commune de Nîmes tendant à la mise à sa charge d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du 3 juillet 2014 du tribunal administratif de Nîmes est annulé.
Article 2 : La décision du 23 mars 2012 par laquelle le maire de la commune de Nîmes a refusé de réviser la notation de Mme A... au titre de l'année 2011, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint à la commune de Nîmes de procéder à un entretien professionnel de Mme A..., au titre de l'année 2011, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : La commune de Nîmes versera à Mme A... la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la commune de Nîmes fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et à la commune de Nîmes.
Délibéré après l'audience du 22 janvier 2016, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Busidan, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 février 2016.
''
''
''
''
3
N° 14MA03822