Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2017, M. C..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 7 décembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision méconnaît la règle de l'examen particulier de la situation personnelle et est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du même code et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celle de l'article 33 de la convention de Genève.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention de Genève ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lopa Dufrénot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., de nationalité nigériane, a sollicité son admission au séjour en France sur le fondement des dispositions de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par une décision du 31 décembre 2015, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, le 7 décembre 2016. Par un arrêté en date du 5 juillet 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour présentée le 14 mars 2017, a assorti sa décision, d'une obligation de quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé faute de satisfaire à cette obligation. Par le jugement dont relève appel M. C..., le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, les moyens tirés du défaut de motivation de l'arrêté contesté du 5 juillet 2017 et du défaut d'examen particulier de la situation de M. C... doivent être écartés par adoption du motif retenu à bon droit par le tribunal administratif au point 5 de son jugement, qui n'appelle pas de précision en appel.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français (...) ". Il résulte de cette disposition que le préfet, s'il a la faculté d'examiner, le cas échéant d'office, le droit d'un étranger demandeur d'asile de demeurer sur le territoire français à un autre titre que l'asile, est en revanche tenu, dès lors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et, le cas échéant, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), ont refusé de reconnaître à l'intéressé la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, de rejeter la demande d'admission au séjour présentée sur ce fondement. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet en se croyant lié par la décision de l'OFPRA et de la CNDA doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. ". Les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels que celui-ci fait valoir.
5. Il est constant que le code pénal nigérian réprime l'homosexualité, infraction punie d'une peine d'emprisonnement. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rendue le 31 décembre 2015 rejetant la demande présentée par M. C... et de celle de la Cour nationale du droit d'asile du 7 décembre 2016 que, eu égard à l'absence de précisions suffisantes par l'intéressé sur les conditions de prise de conscience de son orientation sexuelle, de son environnement notamment social et familial, sur la réalité des liens entretenus avec son employeur et la durée de leurs relations, sur la circonstances de la révélation de son homosexualité auprès des autorités et de sa famille, sur l'agression de son compagnon ainsi que les conditions de son départ de son pays d'origine, les déclarations de M. C... n'ont pas permis de tenir les faits allégués pour établis et fondées les craintes énoncées. En l'absence d'élément nouveau ou probant, le requérant n'établit pas davantage en appel la réalité de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à justifier son admission au séjour. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en tout état de cause, être écarté.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 711-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté ainsi qu'à toute personne sur laquelle le haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu'adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux réfugiés en vertu de la Convention de Genève susmentionnée ". Aux termes de l'article L. 712-1 du même code : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : a) la peine de mort. b) la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants. c) s'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ".
7. Il résulte de ces dispositions qu'il n'appartient qu'à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, à la Cour nationale du droit d'asile, de se prononcer sur le droit des intéressés à l'octroi de la qualité de réfugié ou de la protection subsidiaire. Dès lors, M. C... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de la Convention de Genève à l'encontre de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 5 juillet 2017 refusant son admission au séjour.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Ces dispositions font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement, un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée.
9. Ainsi qu'il a été dit au point 5, M. C... dont la demande d'asile a d'ailleurs été rejetée, par une décision de l'OFPRA, confirmée par une décision de la CNDA qui a estimé les déclarations du requérant lapidaires et peu crédibles concernant son homosexualité alléguée et ses craintes de persécution, en raison de son orientation sexuelle, qu'il présente comme étant à l'origine de son départ du Nigéria, soutient qu'il craint des représailles en cas de retour dans son pays d'origine. Toutefois, il n'établit pas, en produisant un extrait intitulé " police du Nigeria commissariat/extrait du journal criminel " daté du 3 juin 2014 faisant état d'une déclaration d'arrestation le 30 juillet 2012 de M. C... et de son compagnon pour " pratiques sexuelles indécentes " ainsi que des extraits d'articles provenant d'un rapport d'Amnesty International sur la criminalisation des relations entre personnes du même sexe et du site wikipedia sur les droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres au Nigeria, encourir personnellement des risques en cas de retour dans son pays d'origine. En désignant le Nigéria ou tout autre pays pour lequel le requérant établit être légalement admissible comme pays de destination de la mesure d'éloignement, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, présidente-assesseur,
- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 février 2019.
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N° 17MA04906