Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2018, et par un mémoire, enregistré le 4 décembre 2018, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 novembre 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler les délibérations des 23 septembre et 30 septembre 2016 des conseils de l'université de Perpignan en tant qu'elles classent Mme A... au premier rang au poste de maître de conférence à pourvoir ;
3°) de mettre à la charge de l'université de Perpignan la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les délibérations en litige sont entachées d'un vice de procédure, dès lors que la présence de la vice-présidente de l'université de Perpignan chargée de la formation lors du la séance du comité de sélection et du conseil académique a privé les candidats des garanties d'indépendance et d'impartialité auxquelles ils avaient droit ;
- le comité de sélection, et par suite, le conseil académique et le conseil d'administration auraient dû procéder au réexamen intégral des candidatures, prévu par l'article 9-2 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984, en exécution de l'ordonnance n° 1603841 du 17 août 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier suspendant l'exécution des délibérations des 23 et 27 mai 2016 ;
- le rejet de sa candidature par le conseil d'administration est entaché d'une " erreur manifeste d'appréciation " au regard de la parfaite adéquation entre ses compétences et le profil du poste à pourvoir ;
- les manoeuvres de l'université destinées à privilégier la candidate inscrite en première place sur la liste entachent les délibérations en litige de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2018, l'université de Perpignan, représentée par la SCP d'avocats HG§C, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-12 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le décret n° 84-430 du 6 juin 1984 relatif au statut des enseignants-chercheurs, des professeurs des universités et des maîtres de conférences ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carassic,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., maître de conférence section espagnol à l'université de Nice, a présenté sa candidature par voie de mutation pour le recrutement sur un poste de maître de conférence en espagnol, langue et littérature hispano-américaine, ouvert par l'université de Perpignan à la rentrée universitaire 2016-2017. Par un avis du 13 mai 2016, le comité de sélection réuni à ce titre a établi la liste de candidats classés par ordre de préférence. Mme B... a été classée en deuxième rang parmi les cinq candidats. Par délibération du 23 mai 2016, le conseil académique de l'université de Perpignan siégeant en formation restreinte a proposé au ministre en vue de sa nomination la candidature de la candidate classée en premier rang sur la liste arrêtée par le comité de sélection. Par délibération du 27 mai 2016, le conseil d'administration de l'université de Perpignan a émis un avis favorable sur le nom de la candidate classée au premier rang. Par une ordonnance n° 1603841 du 17 août 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a suspendu l'exécution des délibérations précitées des 23 et 27 mai 2016 au motif que les moyens tirés, d'une part, du vice de procédure entachant la délibération du conseil académique et par voie de conséquence celle du conseil d'administration et, d'autre part, de " l'erreur manifeste d'appréciation " des compétences de la requérante au regard du profil du poste à pourvoir étaient de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de ces délibérations et a enjoint à l'université de Perpignan de réexaminer les candidatures au poste de maître de conférence en langue et littérature hispano-américaine dans un délai de 15 jours. En exécution de cette ordonnance, par un avis du 22 septembre 2016, le comité de sélection a établi la liste de candidats classés par ordre de préférence. Mme B... a été à nouveau classée en deuxième rang parmi les cinq candidats. Par les délibérations en litige du 23 et du 30 septembre 2016, le conseil académique et le conseil d'administration de l'université de Perpignan siégeant en formations restreintes ont respectivement à nouveau proposé la candidature de Mme A..., candidate classée au premier rang sur la liste arrêtée par le comité de sélection. Saisi par Mme B..., le juge de l'exécution a estimé que l'ordonnance du 17 août 2016 avait été exécutée et a procédé au classement de la demande d'exécution. Par ordonnance du 25 octobre 2016, le juge des référés de ce tribunal administratif a rejeté pour défaut d'urgence la demande de la requérante aux fins de suspension de ces délibérations. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les délibérations précitées du 23 et 30 septembre 2016 en tant qu'elles classaient Mme A... au premier rang de cette liste pour pourvoir le poste en litige. Mme B... relève appel du jugement qui a rejeté sa demande.
Sur la légalité des décisions en litige :
2. En premier lieu, l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation prévoit que le comité de sélection est composé d'enseignants-chercheurs et de personnels assimilés, pour moitié au moins extérieurs à l'établissement d'un rang au moins égal à celui postulé par l'intéressé, choisis en raison de leurs compétences, en majorité parmi les spécialistes de la discipline en cause. La seule circonstance qu'un membre du jury d'un examen ou d'un concours connaisse un candidat ne suffit pas à justifier qu'il s'abstienne de participer aux délibérations de cet examen ou de ce concours. En revanche, le respect du principe d'impartialité exige que, lorsqu'un membre du jury a avec l'un des candidats des liens, tenant à la vie personnelle ou aux activités professionnelles, qui seraient de nature à influer sur son appréciation, ce membre doit s'abstenir de participer aux interrogations et aux délibérations concernant ce candidat. En dehors de ces hypothèses, il incombe aux membres des jurys d'examen de siéger dans les jurys auxquels ils ont été nommés en application de la réglementation applicable.
3. Il ressort des pièces du dossier que, lors de la séance du comité de sélection du 22 septembre 2016 chargé d'examiner les dossiers et d'auditionner des maîtres de conférences postulant à la nomination dans l'emploi en litige, Mme D... était présente en sa qualité d'enseignant chercheur du département des études hispaniques conformément à l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation. La circonstance que Mme D..., en sa qualité de vice-présidente déléguée à la formation, était aussi membre du conseil académique restreint, n'est pas de nature par elle-même à démontrer une atteinte au principe d'impartialité, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ses fonctions de vice-présidente ont été de nature à influer sur son appréciation des mérites des candidats lors de la séance du comité de sélection du 22 septembre 2016. Les sept membres du comité de sélection se sont prononcés à l'unanimité sur le classement des cinq candidats au poste convoité. En tout état de cause, il est constant que Mme D... a quitté la séance du 23 septembre 2016 du conseil académique siégeant en formation restreinte au moment de l'examen des candidatures au poste de maître de conférences en litige pour éviter tout contentieux éventuel ultérieur sur ce point et est revenue après ce vote, qui a réuni à nouveau l'unanimité des seize votants sur le classement des cinq candidats. En outre, il ressort du compte-rendu du comité de sélection du 22 septembre 2016, qui confirme "en l'absence d'éléments nouveau sur le fond" l'ordre de priorité des candidats après leur audition le 13 mai 2016, que ce jury n'a pas entendu prendre en compte une nouvelle contrainte liée au poste à pourvoir qui serait révélée, selon la requérante, par la mention dans la convocation du 12 septembre 2016 adressée par le président de l'université de Perpignan aux membres du comité de sélection de la nécessité pour le candidat retenu d'être "pleinement disponible sur site". Ainsi, cette mention dans la convocation n'a pas influé sur l'appréciation portée par le comité de sélection sur les mérites respectifs des candidats. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la délibération du 23 septembre 2016 du conseil académique, et par voie de conséquence celle du 30 septembre 2016 du conseil d'administration de l'université de Perpignan, seraient entachées d'un vice de procédure de nature à justifier leur annulation.
4. En deuxième lieu, l'ordonnance n° 1603841 du 17 août 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier suspendant l'exécution des délibérations des 23 et 27 mai 2016 et enjoignant de réexaminer les candidatures au poste de maître de conférences sur le poste en litige n'exigeait pas, contrairement à ce que soutient la requérante, que le comité de sélection reprenne la procédure de recrutement au stade de l'examen des demandes et de la sélection des candidatures prévue par l'article 9-2 du décret du 6 juin 1984, à savoir notamment une nouvelle audition des candidats et la rédaction d'un nouvel avis sur chacune des candidatures, mais exigeait que le comité de sélection délibère à nouveau sur ces candidatures et leur ordre de priorité, ce qu'il a fait lors de sa séance du 22 septembre 2016, dans le délai très bref de 15 jours imposé par le juge des référés. Ce comité a pu ainsi légalement "en l'absence d'éléments nouveau sur le fond " confirmer, au demeurant à l'unanimité, les résultats de ses précédentes auditions du 13 mai 2016, sans entacher son avis d'un vice de procédure pour ce motif. D'ailleurs, saisi par Mme B..., le juge du tribunal administratif de Montpellier chargé d'examiner les demandes d'exécution des jugements de ce tribunal, a estimé, au regard des délibérations en litige du conseil académique et du conseil d'administration restreint, que l'ordonnance du 17 août 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier avait été exécutée et a classé le 26 octobre 2016 la demande d'exécution de la requérante. Par suite, les délibérations en litige ne sont pas, en tout état de cause, entachées d'illégalité pour ce motif.
5. En troisième lieu, il résulte des dispositions de l'article L. 952-6-1 du code de l'éducation, telles qu'elles ont été interprétées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 août 2010 les déclarant conformes à la Constitution que, pour le recrutement d'un enseignant-chercheur, le comité de sélection, après avoir dressé la liste des candidats qu'il souhaite entendre puis procédé à leur audition, choisit ceux des candidats présentant des mérites, notamment scientifiques, suffisants, et, le cas échéant, les classe selon l'ordre de leurs mérites respectifs. Par un avis motivé unique portant sur l'ensemble des candidats, il transmet au conseil d'administration la liste de ceux qu'il a retenus, le conseil d'administration ne pouvant ensuite proposer au ministre chargé de l'enseignement supérieur la nomination d'un candidat non sélectionné par le comité. Le conseil d'administration, siégeant dans une formation restreinte aux enseignants-chercheurs et personnels assimilés de rang au moins égal à celui de l'emploi à pourvoir, prend, au vu de la délibération du comité de sélection, une délibération propre par laquelle il établit sa proposition. Il découle de cette interprétation que, dans l'exercice de telles compétences, il incombe au conseil d'administration, d'apprécier l'adéquation des candidatures au profil du poste et à la stratégie de l'établissement, sous le contrôle du juge et sans remettre en cause l'appréciation des mérites scientifiques des candidats retenus par le comité de sélection, lequel a la qualité de jury.
6. La fiche descriptive du poste vacant à pourvoir 14 MCF 0357 en litige, "section 1 Langues et littératures romaines : espagnol" précise que le profil du poste recherché est "Langues et littérature hispano-américaine. Enseignement : LMD (traduction + littérature, théâtre de préférence) métiers traduction (CAPES), Recherche ALC (anglais, lettres et espagnol)". Le comité de sélection a classé la requérante après audition en deuxième position au motif que "le degré de dynamisme et les projets esquissés par rapport au poste ont conduit néanmoins une majorité des membres du comité à la classer en deuxième position". Si la requérante soutient que Mme A..., la candidate retenue en première position par le comité de sélection, ne justifie d'aucune qualification, contrairement à elle, en littérature d'Amérique Latine, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis de deux professeurs spécialistes de littérature latino-américaine et de linguistique hispanique d'autres universités versés au dossier contentieux par l'université, que la candidate retenue en première position a enseigné et pratiqué l'interprétariat, qu'elle a pratiqué l'analyse textuelle dans les cours qu'elle a dispensés et que, si elle n'est pas une "américaniste" du théâtre de l'Amérique Latine, elle a toutefois assuré un certain nombre d'enseignements dans ce domaine, notamment dans le cadre exigeant de la préparation aux concours du CAPES et de l'agrégation. Dans ces conditions, et contrairement à ce que soutient Mme B..., le conseil d'administration de l'université de Perpignan a pu légalement estimer que la qualification de la candidate qu'il a proposée était en adéquation avec le profil du poste à pourvoir. Dès lors, les délibérations en litige, en tant qu'elles classent Mme A... en première position, ne sont pas entachées d'illégalité.
7. En quatrième et dernier lieu, il ressort de ce qui a été dit aux points 3,4 et 6 que le moyen tiré de ce que les manoeuvres de l'université destinées à privilégier la candidate inscrite au premier rang sur la liste entacheraient les délibérations en litige de détournement de pouvoir doit être écarté.
8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'université de Perpignan, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme à verser à Mme B... sur le fondement de cet article. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... la somme que demande l'université de Perpignan au titre des frais qu'elle a engagés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'université de Perpignan sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... B...et à l'université de Perpignan.
Délibéré après l'audience du 30 avril 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Carassic, première conseillère,
- Mme F..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 14 mai 2019.
2
N° 18MA00227