Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 7 août 2017, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes du 6 juillet 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés du 2 juin 2017 du préfet de Vaucluse ;
3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer dans un délai de quinze jours, sous peine d'astreinte de 100 euros par jours de retard, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, l'autorisation provisoire de séjour prévue par l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assortie le cas échéant d'une autorisation de travail ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- son signataire n'était pas compétent ;
- la décision est entachée d'un défaut de motivation ;
- il a été porté atteinte au principe du contradictoire ;
- le préfet a commis un détournement de pouvoir ;
- Il a commis une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- Le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur d'appréciation en estimant qu'il existait un risque de fuite ;
- cette décision est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
S'agissant des décisions fixant le pays de destination et de maintien en rétention :
- elles sont illégales du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet de Vaucluse qui n'a pas produit de mémoire.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'incompétence du juge administratif pour connaître de la contestation de la mesure de rétention.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Simon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par deux arrêtés du 2 juin 2017, le préfet de Vaucluse a, d'une part, obligé M. C..., sur le fondement du 3° du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à quitter sans délai le territoire français et fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et, d'autre part, ordonné son placement en rétention. M. C...fait appel du jugement du 6 juillet 2017 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne l'arrêté décidant le placement en rétention de M.C...:
2. Il résulte du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le juge administratif n'est pas compétent pour statuer sur les contestations portant sur les décisions de placement en rétention. Les conclusions de M. C...tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juin 2017 ordonnant son placement en rétention doivent donc être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître.
En ce qui concerne l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français :
3. En premier lieu, les moyens tirés de l'incompétence du signataire de l'acte, du non-respect de la procédure contradictoire, du défaut de motivation et du détournement de pouvoir ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif par M.C.... Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge.
4. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L.311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République.". L'article R.313-21 du même code dispose : " Pour l'application du 7º de l'article L.313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ".
5. D'une part, il ressort du jugement de divorce de M. C...que, si celui-ci est entré en France à l'âge de 27 ans en 2003 afin de rejoindre son épouse de nationalité française, la vie commune des époux a cessé dès l'année suivante, le divorce ayant été prononcé en 2008. Par ailleurs, l'intéressé est célibataire et sans enfant. D'autre part, l'intéressé n'établit pas par les seules pièces produites la réalité de sa présence habituelle en France depuis 2003 et en particulier au titre des années 2014 à 2016, période durant laquelle il n'a d'ailleurs jamais cherché à régulariser sa situation administrative. En outre, si l'appelant a exercé ponctuellement depuis 2003 une activité dans des emplois manuels dans l'agriculture, le bâtiment, et l'alimentation, il ressort du procès-verbal d'interpellation qu'il travaillait à la date de l'arrêté en litige sans être déclaré dans un abattoir clandestin. Dans ses conditions, le préfet de Vaucluse, en prenant l'obligation contestée de quitter le territoire français, n'a pas, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle. Enfin, l'arrêté en litige ayant pour seul objet d'obliger le requérant à quitter le territoire français, le requérant ne peut utilement invoquer pour contester cet arrêté la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'un titre de séjour. En tout état de cause, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, M.C..., eu égard à sa situation personnelle, ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour de plein droit au titre de sa vie privée et familiale. En conséquence, le préfet a pu légalement prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans méconnaître les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne le refus d'accorder à M. C...un délai de départ volontaire :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit que M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire.
7. En second lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). / (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ;/ f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) ".
8. Il est constant que M. C...s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement. Dans ces conditions, et alors même que le préfet a commis une erreur de fait en estimant qu'il n'était pas titulaire d'un passeport en cours de validité, le préfet de Vaucluse n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
9. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dès lors, M. C...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie pour information en sera adressée au préfet de Vaucluse.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2018, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, président-assesseur,
- MmeD..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 23 octobre 2018.
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N° 17MA03534