Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2014 et un mémoire complémentaire, enregistré le 31 janvier 2014, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 17 décembre 2013 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 août 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée.
Une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille en date du 19 mars 2014 a admis Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Une ordonnance du 15 octobre 2015 a fixé la clôture de l'instruction au 2 novembre 2015, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Portail a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que, par arrêté du 20 août 2013, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé à Mme B..., ressortissante tunisienne, la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que, par un jugement du 17 décembre 2013, dont la requérante relève appel, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation dudit arrêté ;
Sur la légalité externe de l'arrêté contesté :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (... ) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. " ; que le refus de titre de séjour litigieux, qui vise les textes dont il est fait application et qui précise que Mme B... a rompu sa vie conjugale avec son mari, qu'elle ne justifie pas mener une vie familiale en France, et que la circonstance qu'elle est mère de deux enfants de nationalité tunisienne ne lui confère pas un droit au séjour, est suffisamment motivé en fait et en droit ; que l'arrêté en litige, qui cite l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est motivé en droit en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français ; qu'en outre, si l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit également être motivée, il précise que cette motivation peut se confondre avec celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du I de cet article ; que le 3° vise le cas où la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ; qu'en l'espèce, Mme B..., à qui un titre de séjour a été refusé, entre dans les prévisions de ce 3° ; que, comme il vient d'être dit, la décision portant refus de séjour est motivée ; que cet énoncé vaut motivation de l'obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français litigieuse serait insuffisamment motivée doit être écarté ;
Sur la légalité interne de l'arrêté contesté :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance - 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ;
4. Considérant que Mme B... est entrée en France en novembre 2010, munie d'un visa valant titre de séjour d'une durée d'un an, en sa qualité de conjoint d'un ressortissant français ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la vie conjugale entre les époux avait été rompue à la date de l'arrêté attaqué ; que si Mme B... justifie du suivi de stages de formation et de promesses d'embauches, ces circonstances ne sont pas de nature à justifier de son insertion dans la société française ; que ses deux enfants sont de nationalité tunisienne ; que si l'un de ses enfants est scolarisé en France, cette circonstance n'est pas de nature à établir que la requérante aurait constitué en France le centre de ses intérêts familiaux ; qu'elle ne peut être regardée comme dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, la Tunisie, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 35 ans ; que, dès lors, les décisions par lesquelles le préfet des Alpes-Maritimes lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ne portent pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale eu égard aux buts en vue desquels elles ont été prises et n'ont méconnu ni les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'au regard des conditions du séjour en France de Mme B..., telles que décrites au point 4, l'intéressée n'établit pas que son admission au séjour répondrait à des motifs exceptionnels et que le préfet des Alpes-Maritimes aurait commis une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences sur sa situation personnelle des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
7. Considérant que si l'enfant Zeineb Briki, fille de la requérante, est scolarisée à Nice, elle était âgée de 8 ans à la date de l'arrêté et a la nationalité tunisienne ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale de Mme B... ne puisse pas être reconstituée en Tunisie et que sa fille ne puisse pas être scolarisée dans ce pays ; que, dès lors, et en tout état de cause, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, et en lui faisant obligation de quitter le territoire français, le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu les stipulations précitées de la convention internationale des droits de l'enfant ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires à fin d'injonction et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais qu'elle a exposés et non compris doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 5 février 2916, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Giocanti, conseiller.
Lu en audience publique, le 26 février 2016.
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N° 14MA00226