Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 juillet 2014, et des pièces complémentaires enregistrées le 24 juillet 2014, Mme C..., représentée par Me Berry, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 24 avril 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 novembre 2013 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation aux fins de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros à Me Berry, avocate désignée au titre de l'aide juridictionnelle, en application des dispositions combinées des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été entendu préalablement à la prise de décision ;
- le préfet s'est estimé tenu par la décision de la cour nationale du droit d'asile ;
- la décision de refus de séjour porte à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard de ses buts, au sens des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et au sens du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle ne pouvait pas légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'elle pouvait bénéficier d'un titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale et au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement est entachée de l'illégalité entachant l'obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 février 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Une ordonnance du 17 février 2015 a fixé la clôture de l'instruction le 27 mars 2015 à 12h00, en application des dispositions de l'article R. 613-du code de justice administrative.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille du 18 juin 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport M. Argoud,
- et les observations de Me D... pour Mme C....
1. Considérant que Mme C..., de nationalité russe, née en 1982, a présenté une demande de titre de séjour le 25 juillet 2013, fondée sur les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par une décision du 12 novembre 2013, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour aux motifs que l'intéressée ne justifiait pas de l'ancienneté et de la stabilité des liens personnels et familiaux invoqués et ne faisait valoir aucun motif ou considérations justifiant son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par la même décision, le préfet a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, sa situation personnelle ne justifiant pas qu'un délai supérieur lui soit accordé, et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement ; que Mme C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : /-restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; " ; qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; qu'il résulte de l'examen même de la décision en litige qu'elle indique les dispositions normatives, et notamment les articles L. 511-1 à L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, applicables à la situation de la requérante, et mentionne les circonstances de fait caractérisant la situation singulière de la requérante, et notamment celles relatives à sa situation familiale et à celle de son époux, faisant également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que la décision attaquée, qui comporte donc les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est, par suite, suffisamment motivée ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort pas des pièces du dossier et il ne résulte notamment pas de l'examen de la décision attaquée qui ne comporte aucune mention relative, ni à la demande d'asile formée par la requérante en 2005 ni à la décision de la cour nationale du droit d'asile rejetant cette demande en 2007, à la suite de laquelle l'intéressée avait d'ailleurs déjà fait l'objet d'une décision de refus de séjour le 20 juin 2007, que le préfet se serait estimé tenu par une décision rendue par la cour nationale du droit d'asile ;
4. Considérant, en troisième lieu, que la décision en litige est intervenue sur sa demande ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, elle a donc été mise à même d'être entendue lors du dépôt de cette demande et donc préalablement à l'intervention de la décision ;
5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 du même code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la requérante fait valoir qu'elle est entrée en France en 2005 avec son époux, et qu'elle est mère de trois enfants, nés sur le territoire français en 2005, 2010 et 2012, il ressort également des pièces du dossier que, d'une part, la requérante s'est vu refuser le statut de réfugié en 2007, et qu'elle a fait l'objet d'une décision de refus de titre de séjour avec obligation de quitter le territoire français en 2007 ; que, d'autre part, elle ne justifie du caractère habituel de sa présence en France qu'à compter, au plus tôt, du mois de juillet 2012, date à laquelle elle a pris à bail un logement à Marseille, et alors que, pour la période comprise entre 2005 et 2012, elle se borne à verser au dossier principalement des attestations d'hébergement au caractère faiblement probant, et quelques documents de nature médicale n'attestant que d'une présence ponctuelle en France et ne témoignant en tout état de cause pas d'une insertion durable dans la société française ; qu'en outre, la requérante ne justifie d'aucune activité économique ; que, par ailleurs, l'intéressée n'établit ni même ne soutient être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine, où elle a vécu l'essentiel de son existence ; que la requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la décision en litige porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, les circonstances invoquées par Mme C... ne sauraient être regardées comme répondant à des considérations humanitaires ou constituant des motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'une titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que, comme il vient d'être dit, le refus de titre de séjour n'est pas entaché d'illégalité ; que, par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de cette décision pour contester la légalité de la décision obligeant la requérante à quitter le territoire français ne peut qu'être écarté ; qu'il résulte, en outre, du point qui précède que l'intéressée ne pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour ni au titre de sa vie privée et familiale ni sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressée n'est donc, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre serait illégale au motif qu'elle pouvait se voir délivrer de tels titres ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C...épouse B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 5 février 2016, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- M. Argoud, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 février 2016.
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N° 14MA03051