Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 4 juillet 2017, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 mai 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 mai 2015 du maire de la commune de Montner ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Montner la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle établit avoir déposé en mairie le 18 avril 2014 une déclaration préalable ;
- le silence gardé par le service instructeur sur cette déclaration préalable pendant le délai d'un mois a fait naître, en application de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme, une décision de non-opposition tacite à la déclaration préalable ;
- les travaux en litige ont donc été entrepris légalement ;
- la décision en litige est entachée de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2018, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- elle s'en rapporte aux écritures de première instance du préfet des Pyrénées-Orientales ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carassic,
- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... est propriétaire d'une parcelle cadastrée Y n° 0380 située au lieu dit le Roc Blanc à Montner dans un secteur classé en zone agricole du plan local d'urbanisme de la commune. Les travaux entrepris de construction d'un "garage" d'une superficie de 40 m² par Mme B... ont fait l'objet le 20 mai 2015 d'un constat d'infraction par le maire, officier de police judiciaire. Par l'arrêté du même jour en litige, le maire de Montner, agissant au nom de l'Etat, a mis en demeure Mme B... de cesser tous travaux de réalisation de cette construction sans permis de construire, dans l'attente de la décision du tribunal correctionnel saisi par le maire. La requérante a demandé l'annulation de cet arrêté au tribunal administratif de Montpellier. Par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande.
Sur le bien fondé du jugement :
2. La requérante ne conteste pas que les travaux en litige étaient en cours de réalisation à la date de l'arrêté en litige, mais elle soutient que ces travaux ont été légalement réalisés dès lors qu'elle détenait une décision de non-opposition tacite née du silence gardé par le maire sur la déclaration préalable qu'elle aurait déposée le 18 avril 2014 auprès des services municipaux de la commune de Montner.
3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-3 du code de l'urbanisme, relatif à l'enregistrement des demandes de permis et des déclarations préalables : " Le maire affecte un numéro d'enregistrement à la demande ou à la déclaration et en délivre récépissé dans des conditions prévues par arrêté du ministre chargé de l'urbanisme. " . Aux termes de l'article R. 423-4 de ce code : " Le récépissé précise le numéro d'enregistrement et la date à laquelle un permis tacite doit intervenir, en application du premier alinéa de l'article L. 424-2, ou, dans le cas d'une déclaration préalable, la date à partir de laquelle les travaux peuvent être entrepris. ". Aux termes de l'article R. 423-5 de ce code : " Le récépissé précise également que l'autorité compétente peut, dans le délai d'un mois à compter du dépôt du dossier : / a) Notifier au demandeur que le dossier est incomplet ; (...) ". Aux termes de l'article R. 423-19 du même code : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. ". L'article R. 423-23 de ce code prévoit que le délai d'instruction de droit commun est d'un mois pour les déclarations préalables. L'article R. 424-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée, dispose que : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : a) Décision de non-opposition à la déclaration préalable ; (...) ".
4. Si la requérante soutient avoir déposé en mairie une déclaration préalable à la réalisation des travaux en litige, elle ne l'établit pas par la seule production, en première instance comme en appel, de la copie de son dossier de déclaration, qui ne porte pas le numéro d'enregistrement de sa demande prévu par l'article R. 423-3 du code de l'urbanisme. La circonstance que cet imprimé Cerfa porte, sous la mention "la présente demande a été reçue en mairie", le tampon pré-apposé de la mairie sans comporter le visa de l'agent d'accueil de la mairie, qui vérifie que le dossier de demande est complet avant l'instruction du dossier par le service compétent, ne permet pas d'établir que cette demande a été effectivement déposée à la mairie. La requérante ne produit pas le récépissé de dépôt prévu par l'article R. 423-4 du code de l'urbanisme. Ses allégations selon lesquelles le maire aurait fait preuve de négligence, voire de malveillance à son égard en ne lui délivrant pas ce récépissé ne sont corroborées par aucune pièce du dossier. La commune de Montner a produit pour sa part en première instance le registre de tous les dossiers de déclaration préalable déposés en 2014 auprès de ses services, lequel ne comporte pas la demande de Mme B.... D'ailleurs, par courrier du 18 janvier 2016 postérieur à la décision en litige, la requérante a demandé à la commune de Montner un formulaire de "déclaration rétroactive de travaux" afin de régulariser sa situation au regard des constructions non déclarées, à savoir notamment des pièces d'habitation, une véranda close, un premier "garage" dont la construction avait déjà fait l'objet le 24 mai 2012 d'une demande de régularisation restée vaine par le maire, ainsi que des panneaux photovoltaïques, une clôture, un portail et le second "garage" en litige. Sa déclaration de ces constructions au service des impôts fonciers ne vaut pas dépôt de la demande d'autorisation exigée par le code de l'urbanisme. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle serait titulaire en application de l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme d'une décision tacite de non-opposition à déclaration préalable, qui l'autorisait à entreprendre légalement les travaux en litige.
5. En deuxième lieu, et d'une part, l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme prévoit que les constructions même ne comportant pas de fondations, doivent être précédés de la délivrance d'un permis de construire. Le a) de l'article R. 421-14 de ce code, dans sa rédaction applicable, prévoit que sont soumis à permis de construire les travaux ayant pour effet la création d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol supérieure à 20 m². D'autre part, aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Les infractions aux dispositions des titres Ier, II, III, IV et VI du présent livre sont constatées par tous officiers ou agents de police judiciaire ainsi que par tous les fonctionnaires et agents de l'Etat et des collectivités publiques commissionnés à cet effet par le maire ou le ministre chargé de l'urbanisme suivant l'autorité dont ils relèvent et assermentés. Les procès-verbaux dressés par ces agents font foi jusqu'à preuve du contraire. / (...) Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 160-1 et L. 480-4, ils sont tenus d'en faire dresser procès verbal. / Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public. (...) ". Aux termes de l'article L. 480-2 de ce code dans sa rédaction applicable : " Dès qu'un procès-verbal relevant l'une des infractions prévues à l'article L. 480-4 a été dressé, le maire peut également, si l'autorité judiciaire ne s'est pas encore prononcée, ordonner par arrêté motivé l'interruption des travaux. Copie de cet arrêté est transmise sans délai au ministère public.(...) Dans le cas de constructions sans permis de construire ou d'aménagement sans permis d'aménager, ou de constructions ou d'aménagement poursuivis malgré une décision de la juridiction administrative suspendant le permis de construire ou le permis d'aménager, le maire prescrira par arrêté l'interruption des travaux ainsi que, le cas échéant, l'exécution, aux frais du constructeur, des mesures nécessaires à la sécurité des personnes ou des biens ; copie de l'arrêté du maire est transmise sans délai au ministère public.(...) ". L'article L. 480-4 de ce code vise le fait d'exécuter des travaux en méconnaissance des obligations imposées par les titres I1er à VII du code de l'urbanisme.
6. Les travaux litigieux de construction d'un "garage" d'une superficie de 40 m² exigeaient, en application des articles L. 421-1 et R. 421-14 a) du code de l'urbanisme, l'obtention d'un permis de construire. Mme B... ayant entrepris ces travaux sans aucune autorisation, le maire était tenu, en application du dernier alinéa de l'article L. 480-2 du code de l'urbanisme, de prescrire l'interruption des travaux litigieuse. Par suite, l'autre moyen invoqué par la requérante est sans incidence sur la légalité de la décision en litige.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 mai 2015 du maire de la commune de Montner, agissant au nom de l'Etat. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, en tout état de cause, être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
Copie pour information en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales et à la commune de Montner.
Délibéré après l'audience du 12 mars 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, président-assesseur,
- Mme Carassic, première conseillère.
Lu en audience publique, le 26 mars 2019.
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N° 17MA02835