Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2017, et un mémoire, enregistré le 5 novembre 2018, M. B... A..., représenté par MeE..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 février 2017 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) de condamner la communauté d'agglomération du Grand Alès à lui verser la somme globale de 99 200 euros au titre de ses différents préjudices avec intérêts au taux légal et capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération du Grand Alès une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a été victime d'un harcèlement moral ;
- ses conditions de travail se sont dégradées et son état de santé s'en est ressenti ;
- l'administration a commis de nombreuses fautes de nature à engager sa responsabilité ;
- il a subi des préjudices liés à la dégradation de son état de santé, au trouble dans ses conditions d'existence, dans le déroulement de sa carrière ainsi qu'un préjudice moral.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2018, la communauté d'agglomération du Grand Alès, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. A...la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 n'ont pas été méconnues ;
- M. A...n'a fait l'objet d'aucun harcèlement moral ;
- le travail fourni par ce dernier ne répondait pas aux critères d'attribution de la prime de service et de l'indemnité spécifique de service ;
- le retrait d'un véhicule de service ne constitue, en tout état de cause, pas un acte de harcèlement moral ;
- l'intéressé n'a jamais présenté de bilan de son activité et de ses interventions ;
- le service habitat et logement dans lequel M. A...a été affecté est dans le même pôle que son ancien service ;
- il n'est pas titulaire de son emploi et n'avait pas de droit acquis au maintien du service économie ;
- l'appelant n'est pas le seul agent n'ayant pas eu d'évaluation depuis la fin de l'année 2012 ;
- M. A...a été réintégré financièrement en décembre 2013 à la suite de sa disponibilité mais n'a réintégré physiquement son poste que fin janvier 2014 en raison de problèmes de locaux ;
- l'intéressé ne démontre pas en quoi sa fiche de poste est erronée ;
- l'incident qui s'est déroulé le 12 mars 2014 n'excède pas ce qu'est en droit de demander un agent dans le cadre de son pouvoir hiérarchique ;
- cet incident ne constitue pas un accident de service ;
- les préjudices allégués ne sont pas justifiés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné Mme Simon en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Slimani,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant la communauté d'agglomération du Grand Alès.
1. Considérant que M.A..., ingénieur territorial, relève appel du jugement du 2 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation formés à l'encontre de la communauté d'agglomération du Grand Alès ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires la même loi : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. " ; qu'aux termes de l'article 11 de cette même loi : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions et conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales, d'une protection organisée par la collectivité publique qui les emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire au fonctionne. (...) La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. (...) " ; que ces dispositions établissent à la charge de l'administration une obligation de protection de ses agents dans l'exercice de leurs fonctions, à laquelle il ne peut être dérogé que pour des motifs d'intérêt général ; que cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles l'agent est exposé, mais aussi d'assurer à celui-ci une réparation adéquate des torts qu'il a subis ; que la mise en oeuvre de cette obligation peut notamment conduire l'administration à assister son agent dans l'exercice des poursuites judiciaires qu'il entreprendrait pour se défendre ; qu'il appartient dans chaque cas à l'autorité administrative compétente de prendre les mesures lui permettant de remplir son obligation vis-à-vis de son agent, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ; qu'en revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui ; que le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé ;
4. Considérant que M. A...fait valoir que 6 mois après sa titularisation en qualité d'ingénieur territorial au sein de la communauté d'agglomération du Grand Alès, il a subi une baisse de son régime indemnitaire, a vu le retrait de son véhicule de service, n'était plus invité à participer au rapport d'activité, a été muté brutalement au sein du " service logement et habitat ", n'a plus été noté et évalué par son administration, a dû donner des explications à son employeur quant à ses absences alors qu'il était en arrêt maladie ou en congés, a été réintégré 2 mois après la fin de sa disponibilité pour convenances personnelles, a signé une fiche de poste erronée, a dû partager son bureau avec un collègue et s'est vu refuser des congés cadre par la suite en 2014 ;
5. Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que la baisse de la prime de rendement et de service de l'intéressé a pour origine uniquement le non-respect des objectifs qui lui avaient été assignés par sa hiérarchie tel que cela ressort du rapport non sérieusement contesté du 17 septembre 2012 du directeur du pôle développement, alors même qu'il n'est pas établi, comme il le soutient, qu'une partie desdits objectifs auraient été irréalisables ; que le retrait de son véhicule de service a été motivé par le changement de service de M. A...qui a été muté au sein du service " habitat et logement " dont les impératifs ne nécessitaient pas le maintien de ce véhicule ; ; que si la communauté d'agglomération du Grand Alès ne fait valoir aucun élément de nature à justifier l'éviction de l'intéressé du rapport d'activité au moins à compter de l'année 2012 et reconnaît ainsi l'absence de l'intéressé dans la rédaction de ce même rapport, cette éviction ne peut, à elle-seule, dans les circonstances de l'espèce, être considérée comme un indice de harcèlement moral ; qu'il ressort des pièces du dossier que le changement de service de M. A...a pour origine une réorganisation interne des services de la communauté d'agglomération et n'a entraîné aucun aucune perte de responsabilité ni de rémunération pour l'intéressé ; que si celui-ci n'a pas été noté et évalué depuis sa titularisation, d'une part, cette omission n'a pas eu d'effet sur l'évolution de sa carrière et, d'autre part, il n'est pas contesté qu'un certain nombre de ses collègues n'ont également pas été notés par l'administration pendant la même période ; que la circonstance qu'une convocation à contrôle médical lui a été adressée ne peut laisser présumer l'existence d'un harcèlement moral dès lors que l'administration peut faire procéder à tout moment à la contre-visite par un médecin agréé d'un agent ayant demandé un congé de maladie, le fonctionnaire devant se soumettre, sous peine d'interruption du versement de sa rémunération, à cette contre-visite ; que le fait que son employeur lui ait demandé, après la fin de sa période de congés pour convenances personnelles, de ne réintégrer ses fonctions que le 29 janvier 2014, sans perte de traitement, alors qu'il aurait dû réintégrer physiquement son service au 16 décembre 2013, a pour origine la réorganisation des locaux de l'administration ; que si M. A...soutient que sa fiche de poste est erronée dès lors qu'elle présente un périmètre élargi d'action et impose des missions impossibles à remplir, il n'établit pas par les pièces versées au dossier de cette impossibilité ; que le choix de la date du bénéfice de jours cadres ne constitue pas un droit pour l'intéressé ; qu'enfin, les reproches de son supérieur hiérarchique le 10 mars 2014 lors de son emménagement dans le bureau à partager avec un de ses collègues n'excèdent pas les limites de l'exercice du pouvoir hiérarchique ; que, dès lors, eu égard à ce qui vient d'être dit et quand bien même il aurait effectivement connu d'importants problèmes de santé et se serait vu refuser la reconnaissance d'un accident de service, M. A...ne peut être regardé comme ayant été victime d'agissements répétés pouvant être qualifiés de harcèlement moral au sens des dispositions précitées de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 ;
6. Considérant qu'en l'absence d'agissements constitutifs de harcèlement moral, M. A... n'est pas fondé à demander la condamnation de la communauté d'agglomération du Grand Alès à lui verser une indemnité de 99 200 euros en réparation des préjudices subis ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté l'ensemble de ses conclusions ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et à la communauté d'agglomération du Grand Alès.
Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018, où siégeaient :
- Mme Simon, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- MmeC..., première conseillère,
- M. Slimani, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 novembre 2018.
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N° 17MA01001