Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 18NC03499 le 21 décembre 2018, complétée par un mémoire enregistré le 19 mars 2019, M. C... A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 8 août 2018 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Jura du 14 mars 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Jura de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à renouveler dans l'attente du réexamen du droit au séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sa demande de première instance n'était pas tardive et était donc recevable ;
- si la cour annulait l'arrêté du 14 mars 2018 du préfet du Jura portant refus de renouvellement du titre de séjour de son épouse, obligeant celle-ci à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, il devrait être également autorisé à séjourner en France, en application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'autant plus que le couple est parent de deux enfants en bas-âge, nés respectivement en 2009 et 2013 ;
- l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnus, car sa famille est impliquée dans une vendetta depuis 2009 ;
- le préfet n'est pas lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2019, complété par des mémoires enregistrés les 21 février et 25 mars 2019, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.
Le préfet du Jura fait valoir que :
- la requête de première instance était tardive, et donc irrecevable, et le tribunal aurait dû statuer sur la fin de non-recevoir soulevée devant lui, dès lors qu'il s'agit d'une question d'ordre public ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 22 novembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Favret, premier conseiller a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant albanais, né en 1983, est entré irrégulièrement en France le 25 avril 2015, selon ses déclarations, accompagné de son épouse. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 15 janvier 2016, confirmée, le 28 juillet 2016, par la Cour nationale du droit d'asile. Son épouse a obtenu, le 31 juillet 2017, une carte de séjour temporaire pour raison de santé, mais, par un arrêté en date du 14 mars 2018, le préfet du Jura a refusé de renouveler ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un arrêté du même jour, ce préfet a pris à l'encontre de M. A... un arrêté l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination. Par le jugement attaqué du 27 septembre 2018, le tribunal administratif de Besançon a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. M. A... se borne à soutenir que, si la cour annulait l'arrêté du 14 mars 2018 du préfet du Jura portant refus de renouvellement du titre de séjour de son épouse, obligeant celle-ci à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi, il devrait être également autorisé à séjourner en France, en application de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ce d'autant plus que le couple est parent de deux enfants en bas-âge, nés respectivement en 2009 et 2013. Toutefois, par un arrêt n° 18NC03495 rendu ce jour, la cour administrative de Nancy a rejeté la requête de Mme A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 mars 2018 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi. L'arrêté obligeant M. A... à quitter le territoire français n'a, en outre, dans ces conditions, ni pour objet ni pour effet de séparer les deux enfants de leurs parents et il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas se reconstituer en Albanie et que les deux enfants du couple ne pourraient pas poursuivre leur scolarisation dans ce pays. Par suite, les moyens tirés de l'éventuelle méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
Sur la légalité de la décision fixant le pays d'éloignement :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Et aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des traitements inhumains ou dégradants ".
4. Si le requérant soutient que sa famille serait impliquée dans une vendetta depuis 2009, les documents qu'il produit ne démontrent pas qu'il risquerait d'être personnellement exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Albanie. Au surplus, ainsi qu'il a été dit au point 1 du présent arrêt, la demande d'asile de M. A... a été rejetée par une décision de l'OFPRA en date du 15 janvier 2016, confirmée par une décision de la CNDA en date du 28 juillet 2016. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées ne peut qu'être écarté.
5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se serait estimé lié par les décisions de l'OFPRA et de la CNDA.
6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Jura du l'arrêté du 14 mars 2018. Ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées, par voie de conséquence.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
8. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Jura.
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N° 18NC03499