Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 8 janvier 2021, M. B... A..., représenté par Me Cheballe, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2004145 du tribunal administratif de Strasbourg du 8 octobre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans les deux cas dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision à intervenir, et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à verser à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- c'est à tort que la préfète a refusé de l'admettre au séjour sur le fondement des stipulations du paragraphe 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, dès lors qu'il ne pourra pas effectivement bénéficier, dans son pays d'origine, d'un traitement approprié à son état de santé ;
- en refusant de l'admettre au séjour, la préfète a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- il ne peut pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il peut prétendre de plein droit à la délivrance d'un titre de séjour ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour.
Par ordonnance du 7 juillet 2021, l'instruction a été close le 22 juillet 2021.
La préfète du Bas-Rhin, à laquelle la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience
Le rapport de M. Rees, président, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur la légalité du refus de séjour :
1. En premier lieu, aux termes du paragraphe 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays ".
2. Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...)". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. " et aux termes de l'article 6 du même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis (...). Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".
3. Dans son avis du 26 septembre 2019, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. A..., qui souffre d'importants troubles dépressifs, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que ce dernier peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, l'Algérie. Contrairement à ce que soutient le requérant, il ne ressort pas des pièces du dossier que les principes actifs du traitement médicamenteux qui lui est nécessaire, en particulier la cyamémazine, ne seraient pas disponibles en Algérie. Dans ces conditions, en l'absence, au dossier, d'éléments de nature à remettre en cause l'appréciation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que la préfète s'est appropriée, et qui fait présumer que l'état de santé de M. A... n'est pas de nature à justifier son admission au séjour en France sur le fondement des stipulations précitées, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. A supposer que M. A..., ressortissant algérien né en 1982, soit, comme il le soutient, entré en France en 2013 et s'y soit depuis maintenu, il ne démontre, ni même n'allègue y avoir tissé le moindre lien familial ou personnel, et ne justifie pas d'une intégration particulière sur le territoire national. De plus, il n'est pas dépourvu de toute attache en Algérie, où résident ses parents, frères et sœurs. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la préfète du Bas-Rhin a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a refusé de l'admettre au séjour en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.
6. En troisième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 3 et au point précédent, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 3, M. A... ne remplit pas les conditions pour se voir attribuer de plein droit le titre de séjour mentionné par le paragraphe 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ".
9. Pour les mêmes raisons que celles énoncées au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
10. En troisième lieu, pour les mêmes raisons que celles indiquées aux points 5 et 6, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour.
12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.
N° 21NC00058 5