Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n°18NC00062 le 8 janvier 2018, M. B..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 9 novembre 2017 ;
2°) d'annuler l'avis de sommes à payer en date du 1er décembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au Trésor Public de rembourser toutes les sommes prélevées en remboursement de la somme de 4 622,30 euros ;
4°) de condamner solidairement le centre social d'Argonne et l'Etat à lui verser une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;
5°) de condamner solidairement le centre social d'Argonne et l'Etat aux entiers dépens ;
6°) à titre subsidiaire : d'appliquer l'article 2 du jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 10 novembre 2016, d'annuler la " décision " du 25 février 2015 prise par le centre social d'Argonne réclamant le remboursement de la somme de 4 622,30 euros et d'enjoindre au Trésor Public de rembourser toutes les sommes prélevées en remboursement de la somme de 4 622,30 euros.
M. B... soutient que :
- le titre de recette du 1er décembre 2016 n'est pas suffisamment motivé ;
- il n'y a plus deux titres émis, mais un seul ;
- il n'y a aucun document prouvant que le centre social a réellement payé les cotisations sociales réclamées ;
- le montant de 4 622,30 euros est erroné dans la mesure où il n'a pas été tenu compte de la somme de 221,74 euros déjà prélevée sur le salaire de juin 2015 ;
- l'obligation de payer procédant du titre de recettes n° 105 du 1er décembre 2016 est atteinte par la prescription en application de la loi n°2011-1978 du 28 décembre 2011.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2018, le centre social d'Argonne, représenté par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 800 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Le centre social d'Argonne soutient que :
- la requête est irrecevable ;
- les conclusions subsidiaires sont irrecevables ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée notamment par la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Favret, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., pour le centre social d'Argonne.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a été recruté par le centre social d'Argonne, le 21 septembre 2000, en qualité d'agent des services hospitaliers contractuel, pour y exercer les fonctions de gardien de nuit. Il a bénéficié d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2007. Le directeur du centre social a prononcé son licenciement pour inaptitude physique, par une décision du 15 février 2011, que la cour administrative d'appel de Nancy a annulée par un arrêt du 7 mai 2014. Le centre social d'Argonne a, en exécution de cet arrêt, versé à M. B... la somme de 53 567,95 euros correspondant à la réparation du préjudice patrimonial subi par l'intéressé au titre de la période du 21 février 2011 au 30 septembre 2014, en raison de l'illégalité de son licenciement. Il a également émis à l'encontre de M. B..., les 31 janvier et 10 juin 2015, deux titres de recettes, pour des montants respectifs de 3 310,80 euros et de 1 311,50 euros, correspondant au remboursement de cotisations sociales non prélevées sur l'indemnité de réparation versée à l'intéressé. Le tribunal administratif de Nancy a, par un jugement en date du 10 novembre 2016, prononcé l'annulation des deux titres de recettes des 31 janvier et 10 juin 2015, pour insuffisance de motivation, et a enjoint au centre social d'Argonne de reverser à M. B..., dans le délai d'un mois, la somme de 4 622,30 euros, sous réserve qu'il n'émette pas, dans le même délai, un titre exécutoire à l'encontre de l'intéressé dans des conditions régulières. Par un avis de sommes à payer en date du 1er décembre 2016, le centre social d'Argonne a réclamé à M. B... la somme de 4 622,30 euros. Par le jugement attaqué en date du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Nancy a réduit à 4 400,56 euros le montant de la somme due par M. B... au centre social d'Argonne et rejeté le surplus des conclusions de l'intéressé.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'avis de sommes à payer du 1er décembre 2016 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 37-1 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 tel qu'issu de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. (...) ".
3. Sauf dispositions spéciales, les règles fixées par l'article 37-1 précité sont applicables à l'ensemble des sommes indûment versées par des personnes publiques à leurs agents à titre de rémunération, y compris les avances et, faute d'avoir été précomptées sur la rémunération, les contributions ou cotisations sociales. En l'absence de toute autre disposition applicable, les causes d'interruption et de suspension de la prescription biennale instituée par les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont régies par les principes dont s'inspirent les dispositions du titre XX du livre III du code civil. Il en résulte que, tant la lettre par laquelle l'administration informe un agent public de son intention de répéter une somme versée indûment qu'un ordre de reversement ou un titre exécutoire interrompent la prescription à la date de leur notification. La preuve de celle-ci incombe à l'administration.
4. En l'espèce, M. B... ne conteste pas que le versement indu de cotisations sociales a été effectué par son employeur le 18 novembre 2014. Le délai de deux ans visé par les dispositions précitées de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 a été interrompu, à concurrence de leurs montants respectifs, par la notification, les 23 février et 19 juin 2015, soit avant l'expiration de ce délai, des titres de recettes des 31 janvier et 10 juin 2015, annulés le 10 novembre 2016 par le tribunal administratif. Par suite, et contrairement à ce que soutient M. B..., à la date de la signification, le 7 décembre 2016, de l'avis de sommes à payer du 1er décembre 2016, lequel se borne à reprendre, en les additionnant, les sommes de 3 310,80 euros et de 1 311,50 euros correspondant aux titres de recettes des 31 janvier et 10 juin 2015, la créance du centre social n'était pas prescrite.
5. En deuxième lieu, un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 24 du décret du 7 novembre 2012. En application de ce principe, une personne publique autre que l'Etat ne peut mettre en recouvrement un prélèvement supplémentaire sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge des redevables.
6. L'avis des sommes payer du 1er décembre 2016 comporte les mentions suivantes : " dossier 1501719 notification jugement du 10 novembre 2016/ répétition de l'indu pour insuffisance de cotisations salariales suite à une régularisation de salaires/ pièces jointes courrier csa du 25 février 2015 et ses 2 annexes ". Il résulte de l'instruction que cet avis a été signifié par acte d'huissier le 7 décembre 2016, en même temps qu'une lettre de notification précisant qu'il était accompagné de deux annexes relatives à la répartition des traitements par année et à la régularisation du plafond de la sécurité sociale et de l'IRCANTEC, ainsi que de la lettre du 25 février 2015, qui notifiait à M. B... des éléments de calcul et des bases de liquidation des titres de recettes émis les 31 janvier et 10 juin 2015. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de motivation de l'avis des sommes à payer du 1er décembre 2016 doit être écarté.
7. En troisième lieu, aucune disposition de nature législative ou règlementaire n'interdisait au centre social d'Argonne, après le prononcé du jugement du tribunal administratif de Nancy du 10 novembre 2016 annulant pour défaut de motivation les deux titres de recettes des 31 janvier et 10 juin 2015, d'émettre, cette fois dans des conditions régulières, un titre unique pour recouvrer la somme de 4 622,30 euros.
8. En quatrième lieu, le trésorier du centre des finances publiques de Clermont-en-Argonnes n'a pu émettre l'avis des sommes à payer litigieux, qu'après avoir vérifié au préalable qu'il correspondait au remboursement de cotisations sociales non prélevées sur l'indemnité de réparation versée à M. B... en application de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 7 mai 2014. Par suite, et dès lors que la question du reversement à la sécurité sociale des cotisations est inopérante sur le bien-fondé des sommes réclamées à l'intéressé, M. B... ne saurait utilement soutenir qu'il ne dispose d'aucun document prouvant que le centre social a réellement payé les cotisations sociales qui lui sont réclamées.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le centre social d'Argonne, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'avis de sommes à payer du 1er décembre 2016.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
10. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".
11. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction de M. B... ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les dépens :
12. Aucun dépens n'a été exposé dans la présente instance. Par suite, les conclusions de M. B... présentées sur le fondement de l'article R. 761-1 du code de justice administrative sont sans objet et doivent être rejetées.
Sur les conclusions subsidiaires de M. B... :
13. En premier lieu, si M. B... demande l'exécution de l'article 2 du jugement attaqué enjoignant au directeur du centre social d'Argonne de lui reverser la somme de 4 622,30 euros, il est constant que cette injonction était assortie d'une réserve liée à l'absence d'émission régulière par le centre social d'un nouveau titre exécutoire dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Ce titre ayant été émis et n'étant entaché d'aucune irrégularité, les conclusions subsidiaires de M. B... aux fins d'exécution du jugement doivent être rejetées.
14. En second lieu, la lettre adressée le 25 février 2015 à M. B... par le centre social d'Argonne, lui notifiant les éléments de calcul et les bases de liquidation des titres de recettes émis à son encontre les 31 janvier et 10 juin 2015, n'est pas une décision susceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir. Par suite, les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de cette lettre sont irrecevables et doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
15. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
16. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre social d'Argonne ou de l'Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que demande M. B... au titre des frais non compris dans les dépens.
17. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 800 euros à verser au centre social d'Argonne au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera au centre social d'Argonne une somme de 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au centre social d'Argonne.
Copie en sera adressée au directeur départemental des finances publiques de la Meuse.
2
N° 18NC00062