Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2018, M. D...E..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement no 1700458 du 15 février 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler les décisions du maire de la commune d'Eckwersheim des 16 août et 20 décembre 2016 ;
3°) subsidiairement, d'annuler les mêmes décisions sauf en tant qu'elles interdisent la création d'un nouvel accès à la voie publique, distinct de celui prévu par le permis de construire initial du 14 octobre 2013 ;
4°) d'enjoindre au maire de statuer à nouveau dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) de condamner la commune d'Eckwersheim à lui verser une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. E...soutient que :
- l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme n'est pas applicable dès lors que la commune est dotée d'un plan d'occupation des sols ;
- l'accès à la voie publique prévu par le permis de construire modificatif ne méconnaît pas les dispositions de l'article 3 INAx du règlement du plan d'occupation des sols, alors qu'il traverse la même bande de terrain lui appartenant, et faisant l'objet d'un emplacement réservé, que l'accès autorisé par le permis de construire initial, lequel est devenu définitif ;
- la modalité d'accès ainsi autorisée par le permis de construire initial ne peut pas être remise en cause à l'occasion d'un permis de construire modificatif ;
- le refus de permis de construire modificatif est divisible, la problématique de la régularisation du bâtiment tel qu'il a été construit en application du permis de construire initial étant distincte de celle du nouvel accès à la voie publique ;
- la décision méconnaît le principe d'égalité devant les charges publiques, dès lors que des accès directs sur la route de Brumath ont été accordés à de nombreux voisins alentours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2018, la commune d'Eckwersheim, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. E... à lui verser une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune d'Eckwersheim soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Le 19 novembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées à titre subsidiaire par M. E...et tendant à l'annulation partielle des décisions contestées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me C...pour la commune d'Eckwersheim.
Considérant ce qui suit :
1. Le 14 octobre 2013, M. E...s'est vu délivrer un permis de construire pour la réalisation d'un bâtiment à usage de commerce et de bureaux situé 52, route de Brumath à Eckwersheim. Le 16 juin 2016, il a sollicité la délivrance d'un permis de construire modificatif en vue de régulariser la construction qui n'était pas conforme au permis de construire initial. Par un arrêté du 16 août 2016, le maire de la commune d'Eckwersheim a rejeté sa demande. Le 20 décembre 2016, il a également rejeté le recours gracieux formé par l'intéressé contre ce refus.
Sur les conclusions tendant à l'annulation totale des décisions attaquées :
2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour refuser de délivrer le permis de construire modificatif litigieux, le maire de la commune d'Eckwersheim se soit fondé sur les dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de ce qu'il a commis une erreur de droit en se fondant sur ces dispositions ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 INAx du règlement du plan d'occupation des sols de la commune d'Eckwersheim : " le permis de construire ne peut être accordé sur des terrains qui ne seraient pas desservis, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur fonds voisin (...) par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles qui y sont édifiés, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation, des accès et des moyens d'approche permettant une lutte efficace contre l'incendie ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est desservi par la route départementale n° 263 par l'intermédiaire d'une bande de terrain appartenant à M. E... et faisant l'objet, au profit de l'Eurométropole, d'un emplacement réservé pour la réalisation d'une contre-allée rejoignant par le nord un rond-point, permettant d'accéder à cette route. Le permis de construire délivré le 14 octobre 2013 prévoyait un accès au terrain d'assiette du projet par le nord. M. E...a réalisé cet accès, ainsi qu'un accès direct, non autorisé, sur la route départementale n° 263 depuis le sud du terrain d'assiette du projet. La demande de permis de construire modificatif du 16 juin 2016 ne mentionne ni cet accès irrégulier, ni l'accès initialement autorisé, mais comporte un nouvel accès, situé à quelque 25 mètres au sud de l'accès initialement autorisé.
5. Pour rejeter la demande, le maire s'est fondé sur l'avis défavorable du président du conseil départemental du Bas-Rhin du 11 juillet 2016, qu'il s'est approprié. Outre la nécessité de condamner l'accès " sauvage " au sud de la propriété et de remettre en état les lieux, cet avis indique qu' " aucun accès direct sur la route départementale n° 263 ne sera accordé ", le bénéficiaire devant " se conformer à l'accès validé par le permis de construire initial ".
6. Le requérant soutient que l'accès à la voie publique prévu par le permis de construire modificatif traverse la même bande de terrain, lui appartenant et faisant l'objet d'un emplacement réservé, que l'accès autorisé par le permis de construire initial. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que l'accès prévu par la demande de permis de construire modificatif débouche sur un terrain vague non aménagé. Il est, en outre, constant que la réalisation de la contre-allée sur cet emplacement réservé n'était ni achevée ni même programmée à la date des décisions attaquées. Dans ces conditions, la desserte du terrain d'assiette du projet par le truchement de l'accès prévu par la demande de permis de construire modificatif, qui implique de traverser un terrain vague non aménagé, ne répond pas à l'importance et à la destination de l'immeuble, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation, des accès et des moyens d'approche permettant une lutte efficace contre l'incendie. Par suite, M. E...n'est pas fondé à soutenir que le maire a fait une inexacte application des dispositions de l'article 3 INAx précité en refusant de lui délivrer ce permis de construire modificatif.
7. En troisième lieu, M. E...ne peut pas utilement se prévaloir du caractère définitif du permis de construire initial dès lors que l'accès autorisé n'est pas situé au même endroit que celui prévu par la demande de permis de construire modificatif.
8. En quatrième lieu, les décisions attaquées n'ont ni pour objet ni pour effet de remettre en cause les modalités de desserte et d'accès autorisées par le permis de construire initial.
9. En cinquième et dernier lieu, si le requérant fait valoir que des propriétés voisines bénéficient d'un accès direct sur la route départementale n° 263, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces propriétés présentent, tant du point de vue de la régularité de cet accès que du point de vue de leur configuration au regard de la voie et de leur utilisation, les mêmes caractéristiques que la sienne. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que les décisions attaquées méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques.
Sur les conclusions subsidiaires tendant à l'annulation partielle des décisions attaquées :
10. Le refus de permis de construire contesté et la décision de rejet du recours gracieux formé contre ce refus ne constituent pas des décisions divisibles. Par suite, les conclusions subsidiaires, tendant à leur annulation partielle en tant qu'elles portent sur la modification de l'accès au terrain d'assiette du projet, sont irrecevables.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Eckwersheim qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. E...demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. E...une somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Eckwersheim au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.
Article 2 : M. E...versera à la commune d'Eckwersheim une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune d'Eckwersheim est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...et à la commune d'Eckwersheim.
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N° 18NC01246