Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 6 décembre 2017 et le 19 juin 2018, M. B..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg ;
2° de rejeter la demande de première instance de Voies Navigables de France ;
3°) de statuer ce que de droit sur les éventuels frais et dépens.
Il soutient que :
- il a omis de faire valoir en première instance qu'il n'était plus propriétaire du bateau depuis le 1er juillet 2015, ce qui exclut qu'il soit condamné à payer une amende et à évacuer le bateau ;
- il n'a pas la garde juridique du bateau et le fait qu'il ait acquitté des redevances d'occupation du domaine public pour le compte du propriétaire ne fait pas de lui le responsable pénal et civil du bateau.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 30 mai et le 20 septembre 2018, Voies Navigables de France conclut :
- au rejet de la requête
- à ce que soit mise à la charge de M. B...une somme de 1 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- dans la mesure où M. B...n'a pas informé le tribunal administratif de la vente de son bateau, il ne peut invoquer sa propre turpitude pour demander l'annulation du jugement attaqué et sa requête doit être rejetée comme irrégulière ;
- à titre subsidiaire, la vente ne s'oppose pas à ce que M. B...soit poursuivi pour contravention de grande voirie, dès lors que le bateau reste sous sa garde ;
- à titre très subsidiaire, M. B...n'a pas satisfait aux formalités de publicité de la vente prévues par l'article L. 4121-2 du code des transports et la cession n'est donc pas opposable aux tiers ;
- la convention d'occupation temporaire du domaine public fluvial autorisant le stationnement de longue durée du bateau de M. B...à Thionville est arrivée à échéance le 1er novembre 2014 ;
- le maire de Thionville a, en application de l'article L. 2124-13 du code général de la propriété des personnes publiques, émis un avis défavorable au renouvellement de la convention d'occupation du domaine public ;
- le stationnement sans autorisation du bateau de M. B...sur la Moselle est ainsi constitutif d'une contravention de grande voirie réprimée par les articles L. 2122-1 et L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques ;
- M.B..., informé du caractère précaire et révocable de sa convention d'occupation temporaire du domaine public fluvial, s'est engagé, dans le cadre de celle-ci, à enlever rapidement son bateau ;
- la contravention en litige n'a pas pour effet d'expulser le contrevenant de son bateau ;
- aucune violation du code civil ne peut être retenue ;
- est inopérante la circonstance que le bateau soit amarré en dehors du chenal navigable.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M.B..., propriétaire du bateau " Lotus " dans lequel il résidait, a été autorisé par convention d'occupation temporaire du domaine public du 8 janvier 2010 à stationner sa péniche à Thionville, sur la rive droite de la Moselle canalisée. La demande de renouvellement de cette concession a été refusée par Voies Navigables de France (VNF) le 22 avril 2015 en raison de l'absence d'accord du maire de Thionville, nécessaire en vertu de l'article L. 2121-13 du code général de la propriété des personnes publiques.
2. A la suite de procès-verbaux de contraventions de grande voirie de novembre 2015 et de la saisine du tribunal administratif par Voies Navigables de France, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné M. B...à payer une amende de 500 euros et lui a enjoint sous astreinte de procéder à l'enlèvement de son bateau dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. M. B...forme appel de ce jugement en soutenant qu'il n'est plus propriétaire du bateau et ne peut pas être poursuivi au titre de l'action publique comme de l'action domaniale.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
3. M. B...soutient pour la première fois en appel qu'il ne peut pas être poursuivi, dès lors qu'il a vendu son bateau le 1er juillet 2015, avant d'être verbalisé pour contravention de grande voirie. Il produit devant la cour un acte de vente pour un euro symbolique comportant une condition suspensive tenant à ce que l'acheteur s'engage à garder M. B...comme gardien de la péniche et à ce que le " Lotus " ne puisse être vendu si la condition tenant à ce que le requérant reste gardien du bateau n'était pas respectée.
4. Toutefois, la personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait la chose qui a été la cause du dommage. Il est constant que M. B...a continué à habiter le bateau " Lotus " après la date de l'acte de vente qu'il produit. Ainsi, dès lors que le requérant utilisait ce bateau à son profit, il devait nécessairement participer à son entretien et le surveiller. Dans ces conditions, il avait la qualité de gardien de ce bateau, alors même que l'acte de vente ne stipulait pas qu'il conservait les responsabilités civiles et pénales attachées à une telle occupation. Au surplus, il résulte des documents produits par Voies Navigables de France que le 4 juillet 2018, M. B... était toujours considéré comme propriétaire officiel du bateau par le service de la direction départementale des territoires chargé des immatriculations et qu'un jugement du tribunal d'instance de Thionville, rendu dans un contentieux de surendettement, mentionnait que l'appelant était propriétaire du bateau " Lotus ". De plus, M. B...ne conteste pas que sa péniche fait partie des bateaux dont le transfert de propriété doit être rendu public par une inscription sur un registre tenu au tribunal de commerce pour être opposable aux tiers, formalité qui n'a pas été effectuée. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Strasbourg a condamné M. B...à payer une amende de 500 euros dont le montant n'est pas contesté et lui a enjoint de déplacer le bateau.
5. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg l'a condamné à payer une amende et à déplacer sous astreinte le bateau " Lotus ".
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de mettre à la charge de M. B...la somme de 1 000 euros que Voies Navigables de France demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera à Voies Navigables de France une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à Voies Navigables de France.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 17NC02926