Procédure devant la cour :
B... une requête, enregistrée le 4 juin 2021, Mme F..., représentée B... Me Dravigny, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 4 janvier 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 23 juin 2020 ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente de lui délivrer, dans le délai de cinq jours, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Doubs de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler dans un délai de huit jours ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- le tribunal a commis une erreur d'appréciation et a écarté à tort les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- c'est à tort que le tribunal a écarté les moyens tirés de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour et de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales soulevés au soutien de la contestation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
B... un mémoire en défense, enregistré le 5 août 2021, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés B... la requérante ne sont pas fondés.
Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale B... une décision du 3 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Stenger, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., ressortissante arménienne née en 1944, est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, le 23 novembre 2011. Elle a présenté une demande d'asile qui a été successivement rejetée B... l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) respectivement les 20 juin 2013 et 10 janvier 2014. Le 12 juillet 2013, elle a présenté une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet du Doubs lui a alors délivré trois titres de séjour entre 2014 et 2017 sur ce fondement. Le 29 mai 2017, Mme F... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Le préfet du Doubs a rejeté sa demande B... un arrêté du 16 février 2018, lequel était assorti d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, dont la légalité a été confirmée B... un jugement du tribunal administratif de Besançon du 25 juillet 2018 et un arrêt rendu B... la cour administrative d'appel de Nancy le 25 juin 2019. Le 24 septembre 2019, l'intéressée, qui n'avait pas déféré à la précédente mesure d'éloignement, a présenté une demande d'admission exceptionnelle au séjour en indiquant se trouver à la charge complète de son fils. B... un arrêté du 23 juin 2020, le préfet du Doubs a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme F... fait appel du jugement du 4 janvier 2021 B... lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Il ressort des pièces du dossier que Mme F..., âgée de soixante-seize ans au jour du dépôt de sa demande de titre de séjour, est entrée en France au moins en 2013, année du rejet de sa demande d'asile B... l'OFPRA, et réside depuis cette date chez son fils, M. D... F..., qui a acquis la nationalité française, et son épouse, tous deux parents de trois enfants. A... ressort des pièces médicales produites, notamment des certificats médicaux rédigés B... le Dr G..., médecin généraliste de la requérante, que cette dernière " a besoin de son entourage familial pour l'assister dans sa vie quotidienne. Elle se déplace très difficilement en raison d'une polyarthrite et d'une cardiopathie hypertensive ". Le Dr C..., rhumatologue qui suit l'intéressée, évoque une fibromyalgie et indique que Mme F... " ne peut pas se déplacer seule et est assistée B... sa famille ". Il est B... ailleurs constant que le mari de Mme F... est décédé. Dans ces conditions, eu égard aux circonstances très particulières de l'espèce, notamment en raison de l'âge et de l'état de santé de Mme F... et de la circonstance qu'elle bénéficie de la part de son fils, de nationalité française, de l'assistance quotidienne nécessitée B... ses difficultés de santé, le préfet du Doubs, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation.
3. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme F... est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Besançon a, B... le jugement attaqué, rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Doubs du 23 juin 2020.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, B... la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".
5. L'annulation ci-dessus prononcée implique nécessairement que le préfet du Doubs délivre à Mme F... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, B... suite, de l'enjoindre d'y procéder selon les modalités figurant au dispositif du présent arrêt.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Mme F... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. B... suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dravigny, avocate de Mme F..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dravigny de la somme de 1 500 euros.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2001457 du 4 janvier 2021 du tribunal administratif de Besançon et l'arrêté du 23 juin 2020 du préfet du Doubs sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Doubs de délivrer à Mme F... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Dravigny une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Dravigny renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Doubs.
Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Martinez, président,
- M. Agnel, président assesseur,
- Mme Stenger, première conseillère.
Rendu public B... mise à disposition au greffe, le 3 février 2022.
La rapporteure,
Signé : L. STENGERLe président,
Signé : J. MARTINEZ
La greffière,
Signé : C. SCHRAMM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. SCHRAMM
N° 21NC01612 2