Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 novembre 2019 et un mémoire enregistré le 14 octobre 2020 M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de cent euros par jour de retard ; subsidiairement enjoindre cette même autorité de procéder au réexamen de sa situation sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour viole le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire : est insuffisamment motivée ; est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation et de ses conséquences sur sa situation ;
- la décision fixant le pays de destination : repose sur une appréciation manifestement erronée de ses conséquences sur sa situation personnelle.
Le préfet de Bas-Rhin a produit un mémoire en défense enregistré le 14 octobre 2020 par lequel il conclut au rejet de la requête et soutient que les moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 11 mars 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1405 du 18 novembre 2020,
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant arménien, né le 22 mai 1953, est entré en France le 3 janvier 2010, selon ses déclarations, et y a déposé une demande d'asile laquelle a été rejetée définitivement à la suite d'une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 15 novembre 2012. M. D... a également demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Un titre de séjour lui a été délivré sur ce fondement le 8 février 2011 qui a été renouvelé jusqu'au 7 février 2013. L'intéressé a alors fait l'objet d'un arrêté de refus de renouvellement de son titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire dont la légalité a été définitivement confirmée par arrêt de la cour du 30 octobre 2014. M. D... a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour soins médicaux qui lui a été refusée par une décision du 21 janvier 2015. M. D... a alors demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 29 avril 2019 le préfet de Bas-Rhin a rejeté cette demande et fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire dans un délai de trente jours. Par le jugement attaqué du 15 octobre 2019, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit :/ 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
3. Le requérant a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code est inopérant.
4. Si M. D... se prévaut de la durée de sa présence en France, il ne s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français pendant cette période qu'en se dissimulant frauduleusement sous une fausse identité et en refusant d'exécuter la mesure d'éloignement prise à son encontre. Si le requérant évoque une liaison avec une compatriote, il est constant, en tout état de cause, qu'ils n'ont aucune vie commune. Par ailleurs, M. D... n'est pas dépourvu d'attaches hors de France, dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 57 ans, et en Russie où résident ses deux enfants. La seule circonstance qu'il ait des activités associatives ne suffit pas à démontrer, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à ses conditions de séjour, qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet du Bas-Rhin a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, la décision attaquée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
En ce qui concerne la légalité externe :
5. Aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : [...] 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; [...] La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III... ".
6. L'arrêté attaqué, qui refuse la délivrance d'un titre de séjour à M. D..., entre dès lors dans le champ d'application du 3° précité du I de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, qu'il vise. Il résulte des dispositions précitées que l'obligation de quitter le territoire français opposée à un étranger n'a pas dans ce cas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision de refus de titre de séjour. Il ne ressort pas des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas même allégué, que la décision refusant de renouveler le titre de séjour du requérant ne serait pas suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'absence de motivation de l'obligation de quitter le territoire français ne peut pas être accueilli.
En ce qui concerne la légalité interne :
7. D'abord, il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 4 que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour, ne peut qu'être écarté.
8. Ensuite, pour les motifs exposés au point 4 ci-dessus, M. D... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle.
Sur la décision fixant le pays de destination :
9. Pour les motifs exposés au point 4 ci-dessus, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur sa situation personnelle.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 15 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Bas-Rhin.
N° 19NC03275 2