Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 4 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Jura du 31 janvier 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Jura de lui délivrer, à titre principal, un certificat de résident algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, un récépissé avec droit au travail, dans un délai de huit jours suivant notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à renouveler dans l'attente du réexamen du droit au séjour et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me C... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 311-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration en refusant de lui communiquer les éléments prouvant les violences conjugales qu'elle avait remis aux services préfectoraux lors de sa demande de renouvellement de titre de séjour ;
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situations personnelle, faute de mentionner les violences conjugales dont elle a été victime ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a pas tenu compte des violences psychologiques qu'elle a subies et de son intégration au sein de la société française.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2020, le préfet du Jura conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 1er octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Stenger, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante algérienne, née en 1980, est entrée régulièrement en France le 25 novembre 2017 sous couvert d'un visa de long séjour, valable du 10 novembre 2017 au 5 mai 2018. Un premier certificat de résidence algérien, valable du 22 décembre 2017 au 21 décembre 2018, lui a été délivré sur le fondement de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien précité, en raison de son mariage, le 22 mai 2017, avec un ressortissant français, M. E... B.... Elle a sollicité, le 7 décembre 2018, le renouvellement de son certificat de résidence algérien. Toutefois, par un arrêté du 31 janvier 2019, le préfet du Jura a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, au motif de la rupture de la vie commune, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai. Mme B... relève appel du jugement du 4 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 31 janvier 2019 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Sous réserve des dispositions des articles L. 311-5 et L. 311-6, les administrations mentionnées à l'article L. 300-2 sont tenues de publier en ligne ou de communiquer les documents administratifs qu'elles détiennent aux personnes qui en font la demande, dans les conditions prévues par le présent livre ".
3. Si Mme B... soutient que les services préfectoraux ont refusé de lui communiquer les " éléments " qu'elle leur aurait remis lors de sa demande de renouvellement de titre de séjour, prouvant les violences conjugales dont elle aurait été victime, elle n'apporte toutefois aucune justification probante au soutien de cette allégation. La circonstance que le courrier du 6 décembre 2018, qu'elle a elle-même rédigé, porte le tampon de la préfecture à la date de sa demande ne saurait être regardée comme justifiant la remise à l'administration d'autres documents prouvant qu'elle aurait été victime de violences psychologiques que le préfet devait lui communiquer, en application des dispositions précitées de l'article L. 311-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, ce moyen doit être écarté.
4. En deuxième lieu, l'arrêté contesté, qui énonce de manière précise et circonstanciée les motifs de droit et de fait sur lesquels s'est fondé le préfet pour refuser d'admettre au séjour Mme B... est régulièrement motivé, en dépit de l'absence de référence aux violences psychologiques dont la requérante aurait été victime, lesquelles ne sont au demeurant pas prouvées par les pièces produites. Par suite, le moyen tiré du vice de forme doit être écarté comme manquant en fait.
5. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté contesté que le préfet n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de Mme B.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté comme manquant en fait.
6. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) ". Aux termes de l'article 6 du même accord : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ". Ces stipulations régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, ainsi que les conditions dans lesquelles leurs conjoints et leurs enfants mineurs peuvent s'installer en France. Si une ressortissante algérienne ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour lorsque l'étranger a subi des violences conjugales et que la communauté de vie a été rompue, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée.
7. Il est en l'espèce constant que la communauté de vie entre les époux B... est rompue. Mme B... soutient que le préfet du Jura, qui a refusé de lui délivré un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " en raison de la rupture de la communauté de vie avec son époux, aurait dû faire usage de son pouvoir de régularisation et tenir compte de sa situation particulière résultant des violences psychologiques que son conjoint lui faisait subir depuis son arrivée sur le territoire français ainsi que de son intégration dans la société française. Toutefois, en se bornant à produire le courrier du 6 décembre 2018 qu'elle a elle-même rédigé, un certificat médical du centre hospitalier de Saint-Claude, établi le 2 février 2018, attestant de douleurs épigastriques et abdominales ainsi qu'une attestation du centre communal d'action sociale de Saint-Claude indiquant que Mme B... avait déclaré ne pas être au courant de la fin du bail du logement qu'elle occupait avec son époux et attestant que le bail était au seul nom de M. B..., la requérante n'établit pas la réalité des violences psychologiques conjugales dont elle allègue avoir été victime. En outre, les attestations de formation produites ainsi que les contrats à durée déterminée à temps partiel en qualité d'agent d'entretien pour la période du 18 septembre 2018 au 31 mars 2019 ne sont pas de nature à caractériser une insertion particulière au sein de la société française. Enfin, l'intéressée, qui n'est entrée en France que le 25 novembre 2017, ne justifie pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans. Par suite, le moyen tiré d'une erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de la décision attaquée sur sa situation personnelle doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Jura du 31 janvier 2019. Ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Jura de lui délivrer, à titre principal, un certificat de résident algérien portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, un récépissé avec droit au travail, dans un délai de huit jours suivant notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, à renouveler en l'attente du réexamen du droit au séjour et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de Mme B... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D EC I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... épouse B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Jura.
N° 19NC03390 2