Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 juillet et 20 décembre 2019, M. A... D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 28 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions implicites de refus de séjour nées du silence gardé par le préfet de Meurthe-et-Moselle sur ses demandes des 25 juillet 2016 et 22 septembre 2017 ;
2°) d'annuler ces décisions implicites ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant l'instruction de son dossier ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les décisions sont entachées d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les décisions ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il s'en remet à ses écritures de première instance.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 octobre 2019.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., né en 1996 à Rome, et de nationalité marocaine, est entré régulièrement en France le 15 octobre 2007 à l'âge de onze ans accompagné de ses parents, muni d'un visa " visiteur ". Un document de circulation pour étranger mineur lui a été délivré pour une durée de cinq ans. Il est incarcéré depuis le 18 décembre 2013 et a été condamné les 6 mai 2014 et 27 juillet 2015 à des peines d'emprisonnement respectivement de trois mois et huit ans. Les 25 juillet 2016 et 22 septembre 2017, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale en France. Ses demandes ont été rejetées par des décisions implicites. M. D... relève appel du jugement du 28 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions implicites de rejet de ses demandes de titre de séjour.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que le requérant résidait en France depuis six ans avant d'être incarcéré le 18 décembre 2013. Ses parents, qui vivent en France, sont titulaires d'une carte de séjour pluriannuelle en qualité de commerçant. Le requérant n'apporte aucune pièce établissant le lien qu'il aurait conservé avec ses parents durant sa détention. M. D... a été condamné le 6 mai 2014 par le tribunal pour enfant près le tribunal de grande instance de Mulhouse, à une peine de trois mois d'emprisonnement dont un avec sursis pour embuscade dans le but de commettre des violences avec usage ou menace d'une arme et violence sur une personne dépositaire de l'autorité publique. Il a ensuite été condamné à une peine de huit ans d'emprisonnement pour vol avec arme, par la cour d'assises du Haut-Rhin, le 27 juillet 2015. Si l'intéressé se prévaut des efforts de réinsertion qu'il aurait démontrés durant sa détention en occupant un emploi en prison et en remboursant les parties civiles, ces seuls éléments ne suffisent pas à garantir une insertion sociale à sa libération, M. D... ne démontrant pas notamment avoir travaillé sur un projet professionnel. Enfin, M. D... se prévaut de l'absence d'attache familiale au Maroc, étant né en Italie. Les refus implicites de titre de séjour attaqués n'ont ni pour objet, ni pour effet, de contraindre l'intéressé à retourner dans le pays dont il a la nationalité. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la gravité des faits reprochés à M. D..., compte tenu de son âge au moment de leur commission et à leur caractère répété, en dépit de son arrivée très jeune en France, la décision litigieuse n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fondamentales doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. ".
5. Eu égard à ce qui a été dit au point 3, M. D... ne justifie d'aucun motif exceptionnel ou humanitaire, au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance desdites dispositions doit être écarté. Pour les mêmes motifs, les décisions attaquées ne sont pas entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. Il résulte de tout ce qui précède, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 19NC02399