Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 5 juin 2015, 30 mars et 26 mai 2016, la SA GL Consulting SA, représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer cette décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que sans lui avoir permis de solliciter la saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit l'administration fiscale écarte, comme fictive l'existence de la société marocaine LGA Consulting et comme fictif le contrat conclu le 1er mars 2003 avec la Sarl GL Consulting ;
- l'administration fiscale a violé l'article L. 51 du livre des procédures fiscales dès lors que la SARL GL Consulting avait déjà fait l'objet d'une vérification de comptabilité ;
- le droit de communication exercé par l'administration fiscale auprès de l'établissement bancaire CIAL de Forbach est irrégulier dès lors que la société requérante, qui est établie au Luxembourg, ne pouvait pas faire l'objet d'un contrôle fiscal ;
- c'est à tort que l'administration fiscale a estimé que les prestations services à ses clients français l'avaient été par un établissement stable situé en France.
Par des mémoires, enregistrés les 1er mars et 24 mai 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre,
- les conclusions de Mme Guidi, rapporteur public.
- et les observations de M.B..., gérant de la société GL Consulting SA, lequel a été autorisé par le président de la formation de jugement à s'exprimer sur certains éléments de fait.
1. Considérant que la société de droit luxembourgeois GL Consulting SA a été informée, le 26 septembre 2007, de l'engagement d'une vérification de comptabilité de son activité exercée par son établissement stable en France ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a estimé que les prestations servies à ses clients français du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 l'avaient été par un établissement stable au sens de l'article 259 du code général des impôts et a, à défaut pour la société requérante d'avoir déposé ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée dans les délais légaux, notifié les rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents aux prestations concernées, selon la procédure de taxation d'office ; que la société GL Consulting SA relève appel du jugement du 7 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle est en conséquence redevable au titre de la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2006 ainsi que des pénalités dont ces rappels ont été assortis ;
Sur les conclusions aux fins de décharge :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : a) Qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière moins élevés ; b) Ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé de la rectification " ;
3. Considérant qu'en estimant que la SA GL Consulting SA exerçait une activité d'expertise comptable à partir de ses deux établissements stables situés en France, l'administration s'est bornée à apprécier une situation de fait dont elle a tiré les conséquences en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sans remettre en cause, ni le contrat de location du fonds libéral conclu le 1er mars 2003 avec la Sarl GL Consulting, ni l'existence de la société marocaine LGA Consulting ; que dans ces conditions, l'administration fiscale, qui n'a pas implicitement cherché à réprimer un abus de droit, n'avait pas à saisir le comité consultatif prévu par les dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales : " Lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou de taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période. Toutefois, il est fait exception à cette règle lorsque la vérification a été limitée à des opérations déterminées ainsi que dans les cas prévus aux articles L. 176 en matière de taxes sur le chiffre d'affaires et L. 187 en cas d'agissements frauduleux ainsi que dans les cas où l'administration a dressé un procès-verbal de flagrance fiscale dans les conditions prévues à l'article L. 16-0 BA, au titre d'une période postérieure, ainsi que dans les cas de vérification de la comptabilité des sociétés mères qui ont opté pour le régime prévu à l'article 223 A du code général des impôts et dans les cas prévus à l'article L. 188 A après l'intervention de la réponse de l'autorité compétente de l'autre Etat ou territoire. " ;
5. Considérant que la société requérante soutient que la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet l'a été en violation de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales dès lors que la société à responsabilité limitée (SARL) GL Consulting avait déjà fait l'objet, du 30 juin 2005 au 12 juillet 2006, d'une précédente vérification de comptabilité portant sur les années 2004 et 2005 ;
6. Considérant toutefois, qu'ainsi que le relève le ministre, la vérification de comptabilité litigieuse n'a aucunement concerné la SARL GL Consulting mais a seulement eu pour objet de contrôler l'activité exercée en France, par la société requérante, personne morale juridiquement distincte, par l'intermédiaire d'un établissement stable ; que le moyen tiré de la violation de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales doit être dès lors écarté ;
7. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante soutient que l'administration fiscale ne pouvait pas user du droit de communication prévu aux articles L. 81, L. 83 et L. 85 du livre des procédures fiscales pour obtenir auprès de l'établissement bancaire CIAL de Forbach des renseignements la concernant alors qu'elle est établie au Luxembourg et ne pouvait pas faire l'objet d'un contrôle fiscal ;
8. Considérant, toutefois, que l'exercice du droit de communication est régulier dès lors qu'il est effectué à l'égard des personnes et dans les conditions prévues au livre des procédures fiscales ; que la société requérante ne soutient pas que tel n'ait pas été le cas ; qu'aucune disposition n'impose, par ailleurs, à l'administration fiscale de démontrer avant d'exercer ce droit de communication que la contribuable concernée soit imposable en France ; que la société requérante n'est en conséquence pas fondée à soutenir que l'administration fiscale a fait irrégulièrement usage du droit de communication ;
9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 259 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " Le lieu des prestations est réputé se situer en France lorsque le prestataire a en France le siège de son activité ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle. " ;
10. Considérant que, pour l'application de ces dispositions, un établissement stable est caractérisé par la disposition personnelle et permanente d'une installation comportant les moyens humains et techniques nécessaires aux prestations de services ; qu'alors même qu'un contribuable a régulièrement fait l'objet d'une procédure de taxation d'office, il appartient au juge de l'impôt de se fonder sur les résultats de l'instruction, compte tenu, le cas échéant, de l'abstention des parties à produire les éléments qu'elles sont seules en mesure d'apporter, pour estimer si des prestations de services doivent être assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée, en application de l'article 259 du code général des impôts ;
11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a, à l'occasion des visites domiciliaires effectuées le 4 mai 2006 dans les locaux occupés 5 place du Corbeau à Strasbourg et 22 rue des Ecoles à Forbach par la Sarl GL Consulting, filiale à 100 % de la société GL Consulting SA, et dont il n'est pas contesté que la société requérante était la seule cliente, saisi divers documents tels que notamment les courriers transmis par M. A... B..., administrateur délégué de la société GL Consulting SA, les, 21 juin 2004, 12 juillet 2004, 2 mai 2005, 11 avril 2006 à la Sarl Beverly Pizza, M.F..., MmeE..., M.C..., clients établis en France, d'où il ressort en particulier que la société GL Consulting SA a réalisé, au cours de la période litigieuse, des travaux d'expertise comptable, de facturation et de suivi des paiements excédant ceux confiés, en sous-traitance, à la Sarl GL Consulting ; qu'il n'est par ailleurs pas contesté que M. B...disposait de bureaux dans les locaux occupés par la Sarl GL Consulting SA et situés 5 place du Corbeau à Strasbourg et 22 rue des Ecoles à Forbach ; que la société requérante n'avance aucune raison valable pour expliquer la mise à disposition de ces bureaux et leur utilisation par M.B... ; qu'il n'est pas davantage contesté que deux clients français de la société GL Consulting SA, la Sarl Nouvelle La Couronne, dont le siège est à Strasbourg, et la Sarl Division incendie de l'Est, dont le siège est à Ilkirch, ont, à l'occasion de contrôles fiscaux en 2005 et 2006, demandé au service vérificateur que les opérations de contrôle se déroulent dans les locaux de leur comptable 5 place du Corbeau à Strasbourg et 22 rue des Ecoles à Forbach ; qu'il n'est pas plus contesté que la visite domiciliaire effectuée le 4 mai 2006 a révélé la présence, dans les locaux situés 5 place du Corbeau à Strasbourg, de trois chéquiers libellés au nom de la société requérante et mis à sa disposition par l'établissement bancaire CIAL titulaire du compte qu'elle détient à Forbach ; que la nécessité pour la société requérante de procéder à des opérations de sauvegarde ne justifie par ailleurs pas la présence de l'intégralité de la comptabilité sur disque dur de tous ses clients français dans les locaux de Forbach et Strasbourg ; qu'au vu de ces différents éléments, et nonobstant le fait que M. B...n'aurait pas été déclaré coupable par la cour d'appel de Colmar de l'exercice illégal en France de l'activité d'expert comptable, la société GL Consulting SA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a estimé qu'elle avait disposé, au cours de la période litigieuse, de manière personnelle et permanente d'une installation comportant les moyens humains et techniques nécessaires à la délivrance des prestations servies à ses clients français caractérisant ainsi un établissement stable au sens de l'article 259 du code général des impôts et que le lieu de ces prestations était en conséquence réputé se situer en France ;
12. Considérant, en dernier lieu, qu'en se bornant à soutenir qu'en cas de maintien des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux, elle serait en droit de refacturer à ses clients français la taxe sur la valeur ajoutée que ceux-ci pourraient déduire, la société requérante n'établit pas l'existence d'une double imposition ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GL Consulting SA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la société GL Consulting SA demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société GL Consulting SA est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA GL Consulting et au ministre des finances et des comptes publics.
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N° 15NC01225