Par un jugement n° 1800871,1800872 du 9 mai 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I.) Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2018 sous le numéro 18NC02728, M. C..., représenté par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800871,1800872 du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mai 2018 en tant qu'il a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de cent euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur le refus de séjour :
- le médecin qui a établi le rapport médical ne l'a pas convoqué, ni sollicité des renseignements complémentaires de son médecin traitant ;
- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, puisqu'il souffre de graves problèmes psychiatriques qui nécessitent une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui ne peut être dispensée dans son pays d'origine ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;
- le préfet du Bas-Rhin a méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
II.) Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2018 sous le numéro 18NC02731, MmeC..., représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800871,1800872 du tribunal administratif de Strasbourg du 9 mai 2018 en tant qu'il a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 janvier 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de cent euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de cent euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient les mêmes moyens que son conjoint.
M. et Mme C...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nancy du 11 septembre 2018.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes susvisées n° 18NC02728 et 18NC02731 concernent la situation de M. et Mme C...au regard de leur droit au séjour en France et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
2. M. et MmeC..., ressortissants albanais nés respectivement les 7 juillet 1986 et 12 juin 1989, déclarent être entrés en France le 14 octobre 2014. Ils ont déposé des demandes d'asile qui ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 27 janvier 2015 et par la Cour nationale du droit d'asile le 17 juillet 2015. M. et Mme C...ont été autorisés à séjourner en France le 19 avril 2016 en raison de l'état de santé du requérant. Par deux arrêtés du 3 janvier 2018 le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler leurs titres de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Les requérants relèvent appel du jugement du 9 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
Sur les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour :
3. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article (...) ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'établissement de son rapport médical, le médecin de l'office peut demander, dans le respect du secret médical, tout complément d'information auprès du médecin ayant renseigné le certificat médical et faire procéder à des examens complémentaires. Le médecin de l'office, s'il décide, pour l'établissement du rapport médical, de solliciter un complément d'information auprès du médecin qui a renseigné le certificat médical, en informe le demandeur. Il peut convoquer, le cas échéant, le demandeur auprès du service médical de la délégation territoriale compétente (...) ". Aux termes de l'article 6 de cet arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure (...) ".
4. En premier lieu, il ressort des dispositions législatives et réglementaires précitées que le médecin qui a établi le rapport médical transmis au collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) n'était pas tenu de convoquer M.C..., ni de solliciter des renseignements complémentaires de son médecin traitant. Par suite, le moyen tiré du défaut d'accomplissement de ces formalités doit être écarté comme inopérant.
5. Pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions précitées, le préfet du Bas-Rhin s'est notamment fondé sur l'avis rendu le 22 octobre 2017 par le collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, produit à l'appui du mémoire en défense de première instance, qui a estimé que l'état de santé de M. C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si les documents médicaux produits par le requérant indiquent qu'il est atteint d'une symptomatologie anxio dépressive sévère dans un contexte traumatique, ils ne permettent pas de conclure que l'arrêt des traitements qui lui sont administrés pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, ces documents, dont la plupart est postérieure à la date de la décision attaquée, ne permettent pas d'établir que l'appréciation faite par le préfet du Bas-Rhin serait erronée. Ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet du Bas-Rhin aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de délivrer un titre de séjour pour raisons de santé à M. C...doit être écarté. Mme C...ne peut, en tout état de cause, se prévaloir de ces dispositions qui n'impliquent pas la délivrance d'un titre de séjour au conjoint d'un étranger dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale en France.
Sur les décisions obligeant M. et Mme C...à quitter le territoire français :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...)10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Pour les motifs exposés au point 5, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
7. En deuxième lieu, pour les motifs exposés au point 5, le moyen tiré de ce que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de M. et Mme C...doit être écarté.
8. En troisième lieu, les moyens dirigés contre la décision portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C...sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., à Mme E...C...née D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 18NC02728,18NC02731