Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 avril 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Airiau, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 mars 2021 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions à fin d'annulation des décisions ordonnant leur transfert aux autorités italiennes ;
2°) d'annuler les décisions du 23 février 2021 par lesquelles la préfète du Bas-Rhin a ordonné leur transfert aux autorités italiennes ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de réexaminer leur situation dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil de la somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que :
- les décisions méconnaissent les dispositions de l'article 25 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;
- elles méconnaissent les dispositions de l'article 17 du même règlement et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur leurs situations.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 octobre 2021, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que la requête est irrecevable en l'absence d'éléments nouveaux et que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
M. et Mme A... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions en date du 14 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Marchal a été entendu au cours de l'audience publique.
1. M. B... A..., né le 15 mai 1975, et Mme D... C... épouse A..., née le 27 octobre 1982, tous deux de nationalité turque, sont entrés irrégulièrement en France et y ont sollicité l'asile. Par deux arrêtés du 23 février 2021, la préfète du Bas-Rhin a ordonné leur transfert aux autorités italiennes. Par deux arrêtés du même jour, la préfète du Bas-Rhin les a également assignés à résidence. Par un jugement nos 2101295, 2101296, la magistrate désignée a, d'une part, annulé les décisions de la préfète du Bas-Rhin assignant M. et Mme A... a résidence en tant qu'elles prévoient que leurs enfants doivent les accompagner lors de leurs obligations de présentation auprès des services de la police aux frontières de l'aéroport de Strasbourg-Entzheim et a, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation. M. et Mme A... font appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs demandes à fin d'annulation des décisions ordonnant leur transfert aux autorités italiennes.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 25 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée. ". Aux termes de l'article 42 du même règlement : " Les délais prévus dans le présent règlement sont calculés de la façon suivante: / a) si un délai exprimé en jours, en semaines ou en mois est à compter à partir du moment où survient un événement ou s'effectue un acte, le jour au cours duquel survient cet événement ou se situe cet acte n'est pas compté dans le délai; / b) un délai exprimé en semaines ou en mois prend fin à l'expiration du jour qui, dans la dernière semaine ou dans le dernier mois, porte la même dénomination ou le même chiffre que le jour au cours duquel est survenu l'événement ou a été effectué l'acte à partir duquel le délai est à compter. Si, dans un délai exprimé en mois, le jour déterminé pour son expiration fait défaut dans le dernier mois, le délai prend fin à l'expiration du dernier jour de ce mois; / c) les délais comprennent les samedis, les dimanches et les jours fériés légaux de chacun des États membres concernés. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que les autorités italiennes ont été saisies le vendredi 23 octobre 2020 d'une demande de reprise en charge fondée sur des données obtenues par le système Eurodac. Le délai de réponse de deux semaines applicables en vertu des dispositions précitées de l'article 25 du règlement (UE) n°604/2013 débutait donc, ainsi que le prévoit le a) de l'article 42 du même règlement, au lendemain de cet évènement, soit le samedi 24 octobre 2020, pour une durée de deux semaines. En admettant même, ainsi que le soutiennent les requérants, que le préfet s'est mépris en estimant que l'accord implicite des autorités italiennes était intervenu le dimanche 8 novembre 2020, alors qu'il serait, selon eux, né la veille, cette erreur purement matérielle n'a pu que demeurer sans incidence sur la légalité des décisions de transfert litigieuses, dès lors qu'il est constant que les autorités italiennes ne se sont pas opposées, dans le délai de deux semaines qui leur était imparti, à la reprise de M. et Mme A.... Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 25 précité du règlement (UE) n° 604/2013 est né le 8 novembre 2020, la préfète du Bas-Rhin doit être écarté.
4. En second lieu, M. et Mme A... reprennent en appel les moyens tirés de ce que les décisions litigieuses méconnaissent les dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 et seraient entachés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de leurs situations personnelles. Il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par la magistrate désignée du tribunal administratif de Strasbourg.
5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir invoquée par la préfète du Bas-Rhin, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs conclusions à fin d'annulation des décisions ordonnant leur transfert aux autorités italiennes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... C... épouse A..., à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
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N° 21NC01063