Par un jugement no 1601909-1601910 du 15 janvier 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté ces demandes.
Ce jugement a été rectifié par une ordonnance du 16 janvier 2019.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 mars 2019 et le 29 septembre 2020, la communauté de communes du Val d'Amour et la commune d'Arc-et-Senans, représentées par Me C..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 15 janvier 2019, rectifié par l'ordonnance du 16 janvier 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2016 par lequel le préfet du Doubs a créé la communauté de communes Loue-Lison en tant qu'il intègre dans le périmètre de cet établissement public la commune d'Arc-et-Senans ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la demande présentée par la commune d'Arc-et-Senans était recevable ;
- la communauté de communes du Val d'Amour justifie d'un intérêt à agir ;
- l'arrêté contesté méconnaît l'article L. 5214-1 du code général des collectivités territoriales ;
- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il méconnaît les orientations de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales ;
- l'arrêté contesté porte atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales et d'autonomie locale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2020, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- la requête de la commune d'Arc-et-Senans est tardive et, par suite, irrecevable ;
- la communauté de communes du Val d'Amour ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester l'arrêté du 22 septembre 2016 ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,
- et les observations de Me B... pour la commune d'Arc-et-Senans et la communauté de communes du Val d'Amour.
1. Dans le cadre de la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale prévue par les dispositions du II de l'article 33 de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, la commune d'Arc-et-Senans, membre de la communauté de communes du canton de Quingey (Doubs), a déposé auprès de la commission départementale de la coopération intercommunale du Doubs deux amendements tendant à son rattachement à la communauté de communes du Val d'Amour (Jura) que cette commission a rejetés.
2. Parallèlement, la communauté de communes du Val d'Amour a déposé auprès de la commission départementale de la coopération intercommunale du Jura un amendement en vue de l'extension de son périmètre à trois communes du Doubs, dont celle d'Arc-et-Senans, qui a été adopté à la majorité des deux tiers de ses membres.
3. Par un arrêté du 29 mars 2016, le préfet du Doubs a adopté le schéma départemental de coopération intercommunale du Doubs prévoyant la fusion des communautés de communes du Pays d'Ornans, d'Amancey Loue-Lison et du canton de Quingey et l'extension de ce périmètre aux communes d'Abbans-Dessus et d'Abbans-Dessous. De son côté, le préfet du Jura a adopté, à cette même date, le schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI) du Jura intégrant la commune d'Arc-et-Senans à la communauté de communes du Val d'Amour.
4. Pour la mise en oeuvre de ce schéma, le préfet du Doubs a ensuite adopté, en application des dispositions transitoires de l'article 35 de la loi du 7 août 2015, un arrêté du 22 septembre 2016 portant création de la communauté de communes Loue-Lison, issue de la fusion des trois communautés de communes précitées, intégrant la commune d'Arc-et-Senans, malgré son opposition.
5. La commune d'Arc-et-Senans et la communauté de communes du Val d'Amour ont chacune contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Besançon. Par un jugement du 15 janvier 2019, dont la commune d'Arc-et-Senans et la communauté de communes du Val d'Amour font appel, le tribunal a rejeté leurs demandes.
Sur le bien-fondé du jugement :
6. D'une part, aux termes de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Dans chaque département, il est établi, au vu d'une évaluation de la cohérence des périmètres et d'un état des lieux de la répartition des compétences des groupements existants et de leur exercice, un schéma départemental de coopération intercommunale prévoyant une couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et la suppression des enclaves et discontinuités territoriales. / (...) III. - Le schéma prend en compte les orientations suivantes : / 1° La constitution d'établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant au moins 15 000 habitants ; toutefois, ce seuil est adapté, sans pouvoir être inférieur à 5 000 habitants pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (...) / ; (...) 2° La cohérence spatiale des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre au regard notamment du périmètre des unités urbaines au sens de l'Institut national de la statistique et des études économiques, des bassins de vie et des schémas de cohérence territoriale ; / 3° L'accroissement de la solidarité financière et de la solidarité territoriale ; (...)". Aux termes de l'article L. 5214-1 du même code : " La communauté de communes est un établissement public de coopération intercommunale regroupant plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave. / Elle a pour objet d'associer des communes au sein d'un espace de solidarité, en vue de l'élaboration d'un projet commun de développement et d'aménagement de l'espace. (...) ".
7. D'autre part, aux termes de l'article 35 de la loi du 7 août 2015 : " III.- Dès la publication du schéma départemental de coopération intercommunale prévu au II de l'article 33 de la présente loi et jusqu'au 15 juin 2016, le représentant de l'Etat dans le département définit par arrêté, pour la mise en oeuvre du schéma, la fusion d'établissements publics de coopération intercommunale dont l'un au moins est à fiscalité propre. / Le représentant de l'Etat dans le département peut également proposer un périmètre de fusion ne figurant pas dans le schéma, dans les mêmes conditions et sous réserve de respecter les objectifs mentionnés aux I et II de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et de prendre en compte les orientations définies au III du même article L. 5210-1-1, après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale. La commission départementale dispose d'un délai d'un mois à compter de sa saisine pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. Le projet de périmètre intègre les propositions de modification du périmètre adoptées par la commission départementale dans les conditions de majorité prévues au quatrième alinéa du IV dudit article L. 5210-1-1. / L'arrêté portant projet de fusion dresse la liste des établissements publics de coopération intercommunale appelés à fusionner, ainsi que des communes, appartenant ou non à un autre établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, incluses dans le périmètre du nouvel établissement public. / Cet arrêté est notifié par le représentant de l'Etat dans le département aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre intéressés afin de recueillir l'avis de l'organe délibérant et, concomitamment, au maire de chaque commune incluse dans le projet de périmètre afin de recueillir l'accord de chaque conseil municipal. A compter de la notification de l'arrêté de projet de périmètre, les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale et les conseils municipaux disposent d'un délai de soixante-quinze jours pour se prononcer. A défaut de délibération dans ce délai, l'avis est réputé favorable. / La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements concernés après accord des conseils municipaux des communes incluses dans le projet de périmètre. L'accord des communes doit être exprimé par la moitié au moins des conseils municipaux des communes intéressées, représentant la moitié au moins de la population totale de celles-ci, y compris le conseil municipal de la commune dont la population est la plus nombreuse si cette dernière représente au moins le tiers de la population totale. (...) / La fusion est prononcée par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements intéressés, avant le 31 décembre 2016. / L'arrêté de fusion emporte, le cas échéant, retrait des communes des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elles sont membres et qui ne sont pas intégralement inclus dans le périmètre. / L'arrêté de fusion fixe également le nom, le siège et les compétences du nouvel établissement public. (...)".
8. Les requérantes soutiennent que l'arrêté contesté du 22 septembre 2016 portant création de la communauté de communes de Loue-Lison et extension de son périmètre, notamment à la commune d'Arc-et-Senans, méconnait les orientations définies au III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, notamment la cohérence spatiale des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et l'objectif de solidarité spatiale énoncé à l'article L. 5214-1 du même code.
9. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier que la commune d'Arc-et-Senans appartient au bassin de vie de la commune de Salins-les-Bains, dans le département voisin du Jura, et que les habitants de la communauté de communes du Val d'Amour, dont le territoire jouxte celui de la commune d'Arc-et-Senans, fréquentent notamment les commerces, services médicaux et structures associatives et sportives de cette dernière, ces circonstances ne sont pas, par elles-mêmes, de nature à démontrer que le périmètre retenu par le préfet du Doubs manquerait de cohérence et ne tendrait pas à assurer la solidarité entre les communes membres de la communauté de communes Loue-Lison dès lors que les dispositions de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales n'imposent pas au préfet de faire coïncider le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale avec les limites d'un bassin de vie, mais seulement de tenir compte de ce critère parmi d'autres au nombre desquels figurent notamment les unités urbaines et les schémas de cohérence territoriale. En outre, il n'est pas contesté que les communes intégrées à la nouvelle communauté de communes Loue-Lison relèvent de plusieurs bassins de vie, dont majoritairement de celui d'Ornans puis de celui de Salins-les-Bains et, enfin, du bassin de vie de Besançon, si bien qu'il était impossible pour le préfet de s'attacher à la seule notion de bassin de vie pour satisfaire aux orientations de l'article L. 5210-1-1. De plus, la commune de Salins-les-Bains n'appartenant pas à la communauté de communes du Val d'Amour, les liens entre cette commune et celle d'Arc-et-Senans ne sont pas davantage de nature à justifier un rattachement de cette dernière à la communauté de communes du Val d'Amour plutôt qu'à la communauté de communes Loue-Lison.
10. Il est constant, par ailleurs, que la commune d'Arc-et-Senans, qui appartenait à la communauté de communes du canton de Quingey, dont toutes les communes membres ont été rattachées à la communauté de communes Loue-Lison, constitue, depuis 2002, avec les communes des deux autres établissements publics fusionnés, un pays au sens de la loi du 25 juin 1999 d'orientation de l'aménagement durable du territoire. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, le préfet du Doubs, qui ne s'est d'ailleurs pas cru tenu de faire coïncider le périmètre de la communauté de communes Loue-Lison avec les contours du pays, a pu prendre en compte le Pays Loue-Lison pour apprécier l'existence d'un espace de solidarité et de coopération. D'ailleurs, il n'est pas contesté que les communes, qui sont membres de la nouvelle communauté de communes, s'étaient engagées dans l'élaboration d'une charte de pays, révélant ainsi une dynamique de projet.
11. Il n'est, en outre, pas contesté que la commune d'Arc-et-Senans, à l'instar des autres communes de la communauté de communes Loue-Lison, appartient au syndicat mixte de la Loue chargé de la valorisation du milieu aquatique, au syndicat mixte de Besançon et de sa région pour le traitement des déchets (SYBERT), au syndicat mixte d'énergie du Doubs (SYDED) et, enfin, à la zone Natura 2000, vallée de la Loue et du Lison, créée par un arrêté ministériel du 11 avril 2006. Il est également constant que ces communes se sont engagées dans un programme européen " liaison entre actions de développement de l'économie rurale (LEADER) ", notamment en matière d'économie d'énergie. L'ensemble de ces éléments démontre ainsi l'existence d'un espace de coopération et de solidarité qui répond à l'une des orientations prévues au 3° du III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales.
12. De plus, il est constant que la commune d'Arc-et-Senans, sur le territoire de laquelle se situe la Saline royale, qui constituait le premier bourg de la communauté de communes du canton de Quingey, a vocation à constituer l'un des principaux pôles touristiques de la communauté de communes Loue-Lison, compétente en matière de tourisme. A cet égard, la circonstance qu'un projet touristique pourrait être opportunément développé avec la commune de Salins-les-Bains, qui comporte également une saline, n'est pas de nature à établir que le périmètre retenu serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
13. S'il est vrai que l'inclusion de la commune d'Arc-et-Senans ne s'imposait pas pour permettre à la nouvelle communauté de communes issue de la fusion d'atteindre le seuil minimal d'habitants prévu par le 1° du III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, cette circonstance ne suffit pas à établir que le périmètre retenu pour la communauté de commune de Loue-Lison serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
14. De la même manière, l'éloignement du siège de la communauté de communes de Loue-Lison, situé à Ornans, du territoire de la commune d'Arc-et-Senans n'est pas de nature à révéler l'incohérence du périmètre retenu par le préfet.
15. Par suite, l'ensemble de ces circonstances ne suffit pas à caractériser une erreur manifeste d'appréciation au regard des orientations définies au III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et de l'objectif fixé à l'article L. 5214-1 du même code.
16. Les requérantes soutiennent que l'arrêté en litige méconnaît le principe de libre administration des collectivités territoriales dès lors qu'il inclut la commune d'Arc-et-Senans dans le périmètre de la communauté de communes Loue-Lison sans tenir compte des orientations définies à l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, notamment celle relative à la cohérence spatiale, et l'objectif de solidarité territoriale, qu'il préjudice gravement et immédiatement à ses conditions de fonctionnement et d'exercice de ses compétences et enfin qu'elle a été contrainte de rendre un avis dans un délai très court sans avoir bénéficié d'une information suffisante pour lui permettre d'appréhender les conséquences de son choix. Toutefois, l'arrêté contesté a été pris en application de l'article 35 de la loi du 7 août 2015 et de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales. Par ces dispositions relatives à la création, la fusion et l'extension des établissements publics de coopération intercommunale, le législateur a permis au préfet d'imposer le rattachement d'une commune à un autre établissement public de coopération intercommunale que celui auquel elle souhaitait adhérer en vue de favoriser la rationalisation de la carte de l'intercommunalité et le renforcement de l'intercommunalité. Ainsi, l'arrêté en litige ne saurait être regardé comme portant, par lui-même, atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales. En outre, l'arrêté en litige respecte les objectifs et les orientations définies au III de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales et l'objectif de solidarité territoriale énoncé à l'article L. 5214-1 du même code ainsi qu'il a été indiqué aux points 9 à 15. Par suite, le moyen doit être écarté.
17. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que la commune d'Arc-et-Senans et la communauté de communes du Val d'Amour ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes. Dès lors, leurs conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune d'Arc-et-Senans et de la communauté de communes du Val d'Amour est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Arc-et-Senans, à la communauté de communes du Val d'Amour, à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la communauté de communes Loue-Lison.
N° 19NC00795 2