Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 octobre 2020, Mme B... A..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 27 février 2020 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2019 par lequel le préfet de
Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travailler et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé en droit et en fait et dépourvu d'éléments relatifs à sa situation personnelle ;
- l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnait l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 17 mars 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 août 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante monténégrine, née en 1977, est entrée en France, en 2018, accompagnée de sa fille mineure. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 juillet 2017, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 29 janvier 2019. Elle a ensuite sollicité un titre de séjour en se prévalant de son état de santé. Cette demande a été rejetée pour irrecevabilité par une décision du préfet de Meurthe-et-Moselle du 4 juin 2019. A la suite de l'interpellation de l'intéressée par les services de police, le préfet de Meurthe-et-Moselle, par arrêté du 25 septembre 2019, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite. Par un jugement du 27 février 2020, dont Mme A... fait appel, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Lorsque, dans l'hypothèse mentionnée à l'article L. 311-6, un refus de séjour a été opposé à l'étranger, la mesure peut être prise sur le seul fondement du présent 6° ; (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...)".
3. La décision en litige vise les textes dont elle fait application, notamment les dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, puis mentionne qu'interpellée par les services de la police aux frontières au cours de contrôle aléatoires d'identité, Mme A... n'a pas été en mesure de justifier de la régularité de son séjour en France, que sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA, qu'elle avait présenté une demande de titre de séjour pour raison de santé qui a été déclarée irrecevable par un courrier du 4 juin 2019, que la présence de son enfant mineur ne l'autorise pas à séjourner clandestinement sur le territoire et qu'ayant vécu la majeure partie de sa vie au Monténégro où résident ses frères et soeurs, elle ne justifie pas d'une ancienneté significative en France. Elle ajoute que l'intéressée n'entre pas dans l'un des cas dans lesquels l'étranger ne peut pas faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il n'y a pas lieu de faire usage du pouvoir discrétionnaire dont dispose le préfet pour prononcer une mesure d'éloignement. Cette décision est ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, suffisamment motivée en droit et en fait, nonobstant la circonstance qu'elle ne mentionne pas tous les éléments relatifs sa situation personnelle. Par suite, le moyen tiré de ce que la motivation est insuffisante et stéréotypée doit être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 5114 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".
5. Le certificat médical du 28 septembre 2019 produit par Mme A... se borne à énoncer la nécessité de soins et le traitement prescrit à l'intéressée constitué d'un antidépresseur et d'un anxiolytique, sans établir, d'une part, que ce traitement ne pourrait pas lui être dispensé dans son pays d'origine et, d'autre part, qu'un défaut de traitement aurait pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. En outre, si elle fait valoir qu'elle souffre d'un état dépressif, associé à de fortes anxiétés et crises d'angoisses en lien avec les évènements qu'elle a vécus dans son pays d'origine, elle n'établit pas que cet état serait lié à des évènements effectivement subis au Monténégro. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée en France en 2018, soit depuis moins d'un an à la date de la décision en litige. Si l'intéressée se prévaut de la présence sur le territoire français de membres de sa famille, dont deux soeurs, il n'en demeure pas moins qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Monténégro où elle a vécu jusqu'à l'âge de quarante-et-un ans et où résident encore sa mère et d'autres frères et soeurs. Elle ne fait, par ailleurs, état d'aucun élément qui s'opposerait à ce que sa fille, née en 2012, poursuive sa scolarité dans son pays d'origine. Enfin, la requérante n'apporte aucun élément de nature à démontrer une insertion particulière en France. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
8. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
9. Si Mme A... soutient qu'elle a quitté le Monténégro pour échapper aux poursuites du père de sa fille qui voulait récupérer cette dernière, elle n'apporte aucun élément probant pour démontrer un risque actuel et personnel en cas de retour dans son pays d'origine. Au demeurant tant l'OFPRA que la CNDA ont rejeté sa demande d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par la requérante à fin d'injonction ainsi que celles sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me D... pour Mme B... A... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de Meurthe-et-Moselle.
N° 20NC02926 2