Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 10 janvier 2019, M. C...A..., représenté par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 25 septembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mai 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit ;
3°) d'enjoindre au préfet du Doubs, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) d'enjoindre au préfet du Doubs, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier et complet de sa situation en se bornant à constater que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) n'avait émis aucun avis sur son contrat de travail ;
- il ne constitue pas une menace à l'ordre public ;
- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le tribunal ne pouvait pas procéder à une substitution de motif dès lors que le nouveau motif invoqué résulte de ce que la DIRECCTE lui a opposé à tort la situation de l'emploi.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2019, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 18 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Barteaux a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.A..., ressortissant malien, né le 20 novembre 1997, est entré irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en 2014. En sa qualité de mineur isolé, il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance. Il a effectué un apprentissage dans le domaine de la boulangerie du 14 décembre 2015 au 19 mai 2017. A ce titre, il a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " salarié " dont il a sollicité le renouvellement le 14 avril 2017. Par un arrêté du 6 décembre 2017, le préfet du Doubs a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit. Le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté par un jugement du 25 septembre 2018, dont M. A...fait appel.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, M. A...soutient que le préfet du Doubs, compétent en application de l'article R. 5221-17 du code du travail pour statuer sur une demande d'autorisation de travail, n'a pas procédé à un examen particulier et complet de sa demande de renouvellement de titre de séjour dès lors qu'il s'est borné à constater l'absence d'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) en raison de l'inertie de l'employeur. Toutefois, le préfet du Doubs soutient, sans être contredit, que M. A...a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en se prévalant d'un contrat de travail à durée déterminée en qualité de boulanger et qu'aucune demande d'autorisation de travail n'a été adressée à ses services par l'employeur. En outre, il ressort des pièces du dossier et des motifs même de l'arrêté litigieux que, dans le cadre de l'instruction de la demande de M.A..., le préfet du Doubs a non seulement sollicité l'avis de la DIRECCTE, qui n'a pas été en mesure de le lui fournir du fait de l'absence de réponse de l'employeur antérieurement au prononcé de l'arrêté en litige, mais a également procédé à un examen de l'ensemble des éléments en sa possession pour apprécier les suites à donner à la demande de titre de séjour sollicité par M. A...sur le fondement du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que sur d'autres fondements de ce même code. Par suite, le moyen doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)/7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
4. M. A...se prévaut de son entrée en France à l'âge de dix-sept ans et fait valoir qu'il a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance de Vesoul en qualité de mineur isolé. Il indique également avoir bénéficié d'un contrat d'apprentissage dans le secteur de la boulangerie du 29 octobre 2015 au 31 août 2017, avoir obtenu son certificat d'aptitude professionnelle le 4 juillet 2017 et partager une communauté de vie avec une ressortissante française depuis le mois de mai 2016. Il fait également valoir qu'il a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention " salarié " valable du 14 juin 2016 au 13 juin 2017. Toutefois, la relation de l'intéressé avec une ressortissante française, datant de décembre 2015, est très récente à la date de la décision contestée. Il en est de même du contrat à durée indéterminée conclu le 10 juillet 2017. Par ailleurs, s'il allègue être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, notamment en raison de l'absence de contact avec sa mère qui y réside encore, il ne l'établit pas alors qu'il y a vécu l'essentiel de sa vie. Enfin, il est constant que l'intéressé avait récemment commis une infraction pénale. Dans ces conditions, nonobstant les louables efforts d'insertion de l'intéressé, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Doubs aurait, en rejetant sa demande de titre de séjour, porté une atteinte excessive à son droit au respect de la vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, M. A...n'est pas davantage fondé à soutenir que le préfet du Doubs a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.
5. En troisième lieu, si le préfet du Doubs a relevé dans l'arrêté contesté que le comportement de M. A...constitue une menace à l'ordre public en raison du vol qu'il a commis pour lequel il a fait l'objet d'un rappel à la loi alors qu'il s'agissait à la date de cet arrêté de l'unique fait qui pouvait lui être reproché, il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision de refus de séjour en se fondant sur les autres motifs. Par suite, la contestation du motif fondé sur la menace à l'ordre public doit ainsi, en tout état de cause, être écartée.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : /1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention "salarié". (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ;/ 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ".
7. M. A...soutient que le tribunal ne pouvait pas substituer au motif tiré de la situation de l'emploi celui tiré de l'absence de contrat de travail visé. Cependant, s'il est vrai que la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ne pouvait pas lui opposer la situation de l'emploi pour refuser d'émettre un avis favorable sur sa demande de renouvellement de titre de séjour sollicitée sur le fondement des dispositions précitées, dès lors que, comme l'a relevé le tribunal, l'emploi concerné était le même et se situait dans la même zone géographique, il n'en demeure pas moins que l'intéressé ne bénéficiait pas d'un contrat de travail visé par la DIRECCTE. Il est en outre constant qu'il n'avait pas sollicité et obtenu d'autorisation de travail. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal ne pouvait pas procéder à cette substitution de motif qui est de nature à justifier le refus qui lui a été opposé et qui ne l'a privé d'aucune garantie.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Doubs.
N° 19NC00058 2