2°) de condamner le centre hospitalier Nord Franche-Comté et le centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser une somme de 15 000 euros chacun en réparation du préjudice subi lors de la prise en charge de sa fille, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 janvier 2015 ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier Nord Franche-Comté et du centre hospitalier universitaire de Nancy la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il y a eu un retard de diagnostic commis par le centre hospitalier Nord Franche-Comté qui a réduit les chances de traitement de sa fille ;
- le choix thérapeutique fait par le centre hospitalier universitaire de Nancy n'a pas été suffisant pour donner une chance de survie à sa fille ;
- les deux établissements hospitaliers ont manqué à l'obligation d'information prévue par l'article L. 1111-2 du code de la santé publique ;
- elle a subi un préjudice d'impréparation ainsi qu'un préjudice moral et d'affection ; le préjudice moral est présumé en cas d'impréparation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mai 2018, le centre hospitalier Nord Franche-Comté et le centre hospitalier universitaire de Nancy, représentés par Me D..., concluent au rejet de la requête.
Ils soutiennent que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barteaux,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me E...pour MmeC....
Une note en délibéré enregistrée le 27 juin 2019 a été présentée par MmeC....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C...a accouché, le 30 août 2007, au terme d'une grossesse normale, d'une fille, prénomméeA.... Le 4 avril 2012, la jeune A...a été examinée par un neuropédiatre du centre hospitalier Nord Franche-Comté qui lui a diagnostiqué un syndrome pyramidal hémi-corporel droit associé à une absence de l'abduction de l'oeil gauche et a programmé des examens complémentaires, notamment une imagerie par résonnance magnétique (IRM) cérébrale prévue au cours du mois de juillet 2012. En raison de l'aggravation de son état de santé, la fille de Mme C...a été hospitalisée le 28 avril 2012 au centre hospitalier. Le 30 avril 2012, une IRM a révélé que la jeune A...était atteinte d'une tumeur au niveau du tronc cérébral. Le même jour, la fillette a été transférée, en urgence, au centre hospitalier universitaire (CHU) de Nancy où elle a été prise en charge. L'enfant est décédée le 2 août 2012. Mme C...fait appel du jugement du tribunal administratif de Besançon du 19 septembre 2017 qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Nord Franche-Comté et du CHU de Nancy à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait des fautes commises par ces établissements dans la prise en charge de sa filleA....
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
3. Mme C...fait tout d'abord valoir que le service de neurologie infantile du centre hospitalier Nord Franche-Comté, qu'elle a consulté le 4 avril 2012, n'a programmé une IRM qu'en juillet 2012 et que si celle-ci a pu être réalisée plus tôt, il en est tout de même résulté un retard de diagnostic qui a réduit les chances de guérison de sa fille. S'il est vrai qu'au regard du diagnostic posé le 4 avril 2012, l'IRM n'a pas été programmée en urgence, il n'en demeure pas moins qu'elle a été effectuée le 30 avril 2012, soit dans un délai qui peut être regardé, selon l'expert, comme satisfaisant. En outre, l'expert a clairement mentionné que même si cette IRM avait été réalisée plus tôt, l'évolution de l'état de santé de A...n'aurait pas été différent, compte tenu du caractère malin du gliome dont elle était atteinte. Par suite, aucun retard fautif n'est imputable au centre hospitalier Nord Franche-Comté.
4. Il résulte ensuite de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la jeune A...a été prise en charge par le CHU de Nancy, le 30 avril 2012. A la suite d'une réunion de concertation pluridisciplinaire qui s'est tenue le 7 mai 2012, les médecins ont posé le diagnostic d'une " tumeur du système nerveux central d'évolution imprévisible, sous-tentorielle, indéterminée ou d'évolution imprévisible en l'absence de biopsie ", et décidé de commencer un traitement consistant en une trentaine de séances de radiothérapie qui se sont déroulées du 18 mai au 28 juin 2012, associées à une corticothérapie et à la prise d'antalgiques. L'expert a relevé que ce choix thérapeutique était adapté à la pathologie diagnostiquée. Par ailleurs, si Mme C...soutient que la limitation du traitement à une radiothérapie n'était pas suffisante pour donner à A...de meilleures chances de guérison, il ressort du rapport d'expertise que la survie médiane des enfants atteints d'un gliome malin, dont la radiothérapie n'a entraîné qu'une amélioration transitoire avant une reprise évolutive, n'est que de dix mois, précisant que ni la chimiothérapie, ni l'irradiation ne permettent, en l'état actuel des données scientifiques, d'améliorer ce pronostic. Par suite, en décidant de ne réaliser que des séances de radiothérapie, le CHU de Nancy n'a pas commis de faute.
5. Enfin, le CHU de Nancy n'a pas davantage commis de faute en procédant à une anesthésie générale de la jeuneA..., le 26 juillet 2012, en vue de la pose d'un cathéter central, dès lors que cette anesthésie, ainsi que l'a relevé l'expert, n'a été qu'un facteur d'aggravation transitoire de l'état de santé de l'enfant sur le plan respiratoire d'origine neurologique qui a été pallié par un séjour en réanimation pédiatrique. L'expert a également indiqué qu'il n'était pas certain que la pose d'un cathéter central, nécessaire notamment pour les soins palliatifs apportés à l'enfant, ait précipité le décès de cette dernière.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. / (...)/. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. (...) / Les droits des mineurs ou des majeurs sous tutelle mentionnés au présent article sont exercés, selon les cas, par les titulaires de l'autorité parentale ou par le tuteur. (...)".
7. Mme C...soutient que le centre hospitalier Nord Franche-Comté et le CHU de Nancy ont manqué à leur obligation d'information, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique, dès lors qu'elle n'a été informée du caractère malin de la tumeur de sa fille que le 24 juillet 2012, la privant de la possibilité de solliciter un deuxième avis médical et de se préparer à son décès. S'il est vrai qu'à la suite de l'IRM du 30 avril 2012, ni les médecins du centre hospitalier Nord Franche-Comté, ni ceux du CHU de Nancy n'ont affirmé le caractère malin de la tumeur cérébrale dont souffrait sa fille, il n'en demeure pas moins, comme l'a reconnu l'intéressée lors des opérations d'expertise, que les médecins n'ont pas exclu ce type de pronostic, qui ne pouvait être avancé avec certitude en l'absence de biopsie. L'expert a d'ailleurs relevé que le contenu de cette information, portée à la connaissance de la famille le 4 mai 2012 selon le dossier médical de l'enfant, pouvait être considéré, en l'absence de certitude absolue, comme prudent, mesuré et conforme à la réalité du moment où elle a été donnée. Par ailleurs, le 24 juillet 2012, constatant l'échec de la thérapie et la dégradation de l'état de santé de l'enfant, les médecins du CHU de Nancy ont informé la requérante de la gravité de la tumeur de sa fille, du pronostic vital défavorable et de la possibilité de solliciter un second avis. A cet égard, un médecin de l'institut Gustave Roussy, à Villejuif, a confirmé le pronostic d'un gliome malin. Ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que les praticiens de ces deux établissements ont commis une faute en ne l'informant que le 24 juillet 2012 de la gravité de la pathologie de sa fille.
8. L'expert a relevé dans son rapport qu'il ressortait du dossier médical de l'enfant que les médecins ont discuté avec Mme C...de la nécessité, en raison du pronostic très défavorable, de mettre en place une chambre implantable pour permettre les prélèvements et l'injection de corticoïdes. Ces éléments suffisent à établir, contrairement à ce que soutient la requérante, qu'elle a été informée de la mise en place de soins palliatifs. Dans ces conditions, Mme C...n'est pas fondée à rechercher la responsabilité du centre hospitalier Nord-Franche-Comté et du CHU de Nancy à raison d'un manquement au devoir d'information.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier Nord Franche-Comté et du CHU de Nancy, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais liés au litige.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C..., au centre hospitalier Nord Franche-Comté et au centre hospitalier universitaire de Nancy.
N° 17NC02763 2