Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 décembre 2019, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 22 novembre 2019 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler la décision du 15 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Aube a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de délivrer un titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article L. 313-14 et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'illégalité par voie d'exception ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2021, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 avril 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B..., présidente assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant centrafricain né le 26 juin 1988, est entré régulièrement en France sous couvert d'un visa de court séjour, le 15 mai 2016. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français pour la protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), le 23 juin 2016. Il a relevé appel de cette décision devant la Cour nationale du droit d'asile. Il a également sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par une décision du 15 mai 2019, le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de titre de séjour. Par un jugement du 22 novembre 2019, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2019.
2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision litigieuse doit être écarté par adoption des motifs du point 3 du jugement attaqué.
3. En deuxième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ".
4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, M. D... résidait en France depuis trois ans seulement. S'il a conclu un pacte civil de solidarité, le 28 février 2019, avec une ressortissante centrafricaine qui réside régulièrement en France, avec laquelle il aurait eu une relation en Centrafrique en 2011 et qu'il a reconnu, le 17 mai 2016, deux jours après son entrée en France, être le père de l'enfant de cette dernière, né le 20 octobre 2013, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des attestations émanant principalement de la famille de sa compagne, que leur relation soit stable et ancienne sur le territoire français et qu'il aurait, de quelle que manière que ce soit, contribué à l'entretien et à l'éducation de cet enfant. Dans ces conditions, au regard du caractère récent de la relation de M. D... avec sa compagne, à la date à laquelle la décision contestée a été prise, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en lui refusant le séjour, le préfet aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels a été prise la décision attaquée. Il n'a, par suite, méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'exécution de la décision contestée sur sa situation personnelle.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".
6. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de ces dispositions par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a demandé son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. Cependant, ainsi qu'il est dit au point 4 du présent arrêt, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... ferait état de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant qu'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " lui soit délivrée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
8. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
9. La décision contestée qui a pour unique objet de refuser au requérant le séjour ne fait pas obstacle à ce que M. D... puisse continuer à s'occuper de l'éducation de sa fille et n'a pas pour effet de séparer l'enfant de son père. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.
10. En dernier lieu, le requérant ne peut utilement soulever des moyens tirés de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination, à l'appui de la contestation d'une décision qui porte exclusivement refus de titre de séjour.
11. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 2019 par laquelle le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de titre de séjour. Ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, en conséquence, être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Aube.
2
N° 19NC03759