Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 janvier 2019, M. D..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour d'un an ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, la somme de 1 200 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 34 et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- le préfet du Calvados ne pouvait se prononcer sur la base d'un avis du collège de médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, sa demande ayant été déposée avant le 1er janvier 2017 ; le préfet devait se fonder sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; en se fondant sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le préfet du Calvados l'a privé d'une garantie ;
- la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 mars 2019, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par une décision du 6 février 2019, M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
La rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant arménien né le 19 janvier 1976, est entré en France, selon ses déclarations, le 13 mars 2005. Une carte de séjour temporaire pour raison de santé lui a été délivrée le 19 octobre 2009. Cette carte a été renouvelée jusqu'au 26 mai 2012. Le 26 février 2015, il a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 août 2018, le préfet du Calvados a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. D... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Il relève appel du jugement n° 1802521 du 28 décembre 2018 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
Sur la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour :
2. L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue du 3° de l'article 13 de la loi du 7 mars 2016, prévoit que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Le VI de l'article 67 de la loi du 7 mars 2016 dispose que : " le 3° de l'article 13 (...) s'applique aux demandes présentées après son entrée en vigueur ", soit après le 1er janvier 2017.
3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 26 février 2015. Le préfet du Calvados a alors saisi le médecin de l'agence régionale de santé qui a estimé, dans son avis du 20 mars 2015, que le défaut de prise en charge de la pathologie de M. D... était susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans le pays d'origine. A la suite de cet avis, le préfet du Calvados n'a pas délivré à l'intéressé de titre de séjour et l'a maintenu sous récépissé. Après avoir adressé à M. D..., le 31 mars 2017, un courrier lui demandant d'actualiser sa situation, le préfet a saisi pour avis le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Celui-ci a, dans son avis émis le 25 octobre 2017, estimé que le défaut de prise en charge médicale de M. D... pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que l'intéressé pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour refuser de délivrer à M. D... le titre de séjour sollicité, le préfet du Calvados s'est fondé, sans son arrêté du 7 août 2018, sur cet avis du collège de médecins de l'OFII. M. D... soutient que le préfet du Calvados aurait dû se fonder sur l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, sa demande ayant été déposée avant le 1er janvier 2017. Toutefois, le préfet du Calvados fait valoir, sans être contredit, que M. D... a rempli un nouveau dossier de demande de titre de séjour pour étranger malade à la suite de la demande d'actualisation qui lui a été adressée le 31 mars 2017. En tout état de cause, l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII présente des garanties procédurales équivalentes à celles de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé. Il suit de là que cette irrégularité, à la supposer établie, n'a ni privé M. D... d'une garantie ni eu une incidence sur le sens de la décision relative à la demande de titre de séjour.
5. En second lieu, le motif tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que M. D... reprend en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, cette décision ne méconnaît pas le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
7. En second lieu, si M. D... fait valoir qu'il réside en France depuis 13 ans, il ne fait état d'aucune attache privée ou familiale en France. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
8. Si M. D... soutient que cette décision méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne précise pas la nature de ses craintes et ne produit aucun élément au soutien de ses allégations. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 24 septembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président-assesseur,
- M. B..., premier conseiller.
Lu en audience publique le 8 octobre 2020.
Le rapporteur,
H. B...Le président,
F. Bataille
La greffière,
A. Rivoal
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19NT00501