Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 mars 2015, la SAS Etablissements Mathis, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 15 janvier 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des suppléments d'imposition contestés et de lui accorder le bénéfice des intérêts moratoires ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le bâtiment A constituant une unité foncière distincte des bâtiments B et C, selon la définition de cette notion par l'article 324 A de l'annexe III au code général des impôts et par les instructions 6-M-2313 du 21 juin 1971 et 6-C-2134 du 15 décembre 1988, sa valeur locative doit être déterminée au regard de la seule activité qui y est exercée ;
- la valeur locative de ce bâtiment doit être calculée selon la méthode des termes de comparaison et non selon la méthode comptable, compte tenu de la nature artisanale de l'activité qui y est exercée, du caractère prépondérant de la masse salariale dans les charges d'exploitation et du caractère non prépondérant de l'outillage ;
- il ne peut être regardé comme étant un bâtiment industriel au sens que l'administration donne de cette notion dans son instruction 6-C-251 du 15 décembre 1988 ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 septembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.
1. Considérant que la société par actions simplifiée (SAS) Etablissement Mathis relève appel du jugement du 15 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle dues au titre des années 2007 à 2009 et de la cotisation foncière des entreprises supplémentaire due au titre de l'année 2010 résultant de l'évaluation selon la méthode comptable d'un bâtiment qu'elle utilise pour son activité de conception et de confection de produits orthopédiques et qu'elle avait omis de mentionner dans ses déclarations ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années 2007 à 2009 : " La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) " ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code dans sa rédaction applicable aux années 2007 à 2009 : " La valeur locative est déterminée comme suit : 1° Pour les biens passibles d'une taxe foncière, elle est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe (...) " ; qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année 2010 : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France, à l'exclusion des biens exonérés de taxe foncière sur les propriétés bâties en vertu des 11° et 12° de l'article 1382, dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...). La valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. (...) Pour le calcul de l'impôt, la valeur locative des immobilisations industrielles définie à l'article 1499 est diminuée de 30 %. " ; qu'aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) " ; que revêtent un caractère industriel, au sens de cet article, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ;
3. Considérant que la SAS Etablissements Mathis exerce son activité de production de produits orthopédiques sur un site comportant un bâtiment A de 838 m² affecté à la fabrication des prothèses, aux bureaux et à l'accueil des clients, un bâtiment B de 700 m² utilisé pour la conception des prothèses et leur stockage et un bâtiment C de 50 m² également à usage de stockage ; que les locaux à usage d'accueil des clients, de bureaux et de stockage situés dans ces trois bâtiments concourent à la même exploitation que les locaux à usage de fabrication des prothèses ; qu'il suit de là que l'administration pouvait apprécier l'importance du matériel et de l'outillage mis en oeuvre sans distinguer les matériels et outillages installés dans le bâtiment A pour la confection des prothèses des autres moyens techniques dont dispose la société ; qu'en tout état de cause, la quasi-totalité des moyens techniques pris en compte par le service se trouve dans ce bâtiment ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour fabriquer les prothèses sur mesure qui lui sont commandées, la SAS Etablissement Mathis utilise notamment des équipements pour creuser la mousse, des pompes à vide, des matériels à moulage à dépression, des machines à fraiser numériques, des machines à coudre, des perceuses, des raboteuses dégauchisseuses, des fours, des scies, des compresseurs, une cabine de peinture et un logiciel ; que ces moyens techniques sont utilisés à chaque étape du processus de production auquel ils apportent une contribution majeure ; qu'au cours des trois années en litige, ils ont d'ailleurs représenté 34, 40 % et 53 % des équipements et biens mobiliers inscrits à l'actif du bilan de la société ; qu'il suit de là qu'ils ont joué un rôle prépondérant alors même que la masse salariale a représenté 53 à 54 % des charges d'exploitation au cours des exercices clos les 31 juillet 2007 à 2010 ; que la double circonstance que les prothèses sont fabriquées sur mesure et que l'activité de la société serait artisanale est sans incidence sur l'appréciation de l'existence d'un établissement industriel au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts ;
5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties (...) est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte. " ; qu'aux termes de l'article 324 A de l'annexe III à ce code : " Pour l'application de l'article 1494 du code général des impôts, on entend : 1° Par propriété normalement destinée à une utilisation distincte : (...) b. En ce qui concerne les établissements industriels, l'ensemble des sols, terrains, bâtiments et installations qui concourent à une même exploitation et font partie du même groupement topographique (...) 2° Par fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte, lorsqu'ils sont situés dans un immeuble collectif ou un ensemble immobilier (...) b. L'établissement industriel dont les éléments concourent à une même exploitation (...) " ; que seule la valeur locative du bâtiment A de 838 m² ayant été calculée selon la méthode comptable, la SAS Etablissement Mathis n'est pas fondée à se prévaloir de ces dispositions subordonnant le calcul de la valeur locative de plusieurs bâtiments à la condition de leur appartenance au même groupement topographique ; qu'en tout état de cause, les trois bâtiments qu'elle utilise pour les besoins de son activité font partie du même groupement topographique ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Etablissement Mathis n'est pas fondée à soutenir, sur le fondement de la loi, que la valeur locative du bâtiment A ne pouvait pas être calculée selon la méthode comptable prévue par l'article 1499 du code général des impôts ;
En ce qui concerne l'interprétation administrative de la loi :
7. Considérant, d'une part, que les extraits des paragraphes 2, 4 et 5 de l'instruction 6-C-251 du 15 décembre 1988 dont la société requérante se prévaut ne donnent pas de la notion d'établissement industriel une définition différente de celle dont il vient d'être fait application sur le fondement de la loi ;
8. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit au point 7 du présent arrêt que la définition de la notion de groupement topographique figurant aux paragraphes 13 et 14 de l'instruction 6-C-2134 du 15 décembre 1988 et au n° 1 note 2 d'une instruction 6-M-2313 du 21 juin 1971 dont la société cite des extraits n'est pas utilement invoquée ;
Sur les intérêts moratoires :
9. Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel relatif aux intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, les conclusions de la SAS Etablissements Mathis tendant à l'application de ces dispositions sont dépourvues d'objet et ne peuvent être accueillies ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Etablissements Mathis n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SAS Etablissements Mathis demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Etablissements Mathis est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiée Etablissements Mathis et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Bougrine, conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00944 2
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