Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 16 juillet et 18 septembre 2015, M. B...E..., représenté par Me Malabre, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 janvier 2015 ;
2°) d'annuler les décisions des 11 février et 25 avril 2013 ainsi que la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
4°) d'écarter des débats la pièce n° 6 produite par le ministre de l'intérieur ainsi que les passages de son mémoire y faisant référence.
Il soutient que :
- les décisions contestées sont entachées d'une erreur de fait, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation sur ses ressources et moyens de subsistance ;
- ces décisions qui ont pour effet de le priver de soins vitaux et urgents porte une atteinte à sa vie privée et méconnaissent tant le préambule de la Constitution de 1946, l'article 23 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles sont également contraires aux stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui garantissent le droit à la vie et à l'intégrité physique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 août 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le préambule de la Constitution de 1946 ;
- le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B... E..., ressortissant syrien domicilié au Libanà la date de sa demande de visa, relève appel du jugement du 7 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 février 2013 par laquelle les autorités consulaires françaises à Beyrouth ont rejeté sa demande de visa de court séjour, de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France et de la décision explicite de cette commission du 26 avril 2013 ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 11 février 2013 des autorités consulaires et la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :
2. Considérant que la décision du 26 avril 2013 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, prise en vertu des dispositions des articles D. 211-5 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est substituée à la décision implicite intervenue sur recours administratif préalable obligatoire de M. B... E...du 15 février 2013, qui elle-même s'était substituée à la décision initiale de refus prise le 11 février 2013 par le consul général de France à Beyrouth ; qu'il suit de là, que les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 11 février 2013 ainsi que de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, sont irrecevables et ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées
Sur les conclusions dirigées contre la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France du 26 avril 2013 :
3. Considérant que pour rejeter la demande de visa de court séjour de M. B... E..., la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le fait qu'il ne justifiait pas de revenus réguliers suffisants pour faire face de manière autonome aux frais de toute nature liés à son séjour en France et à son retour à son lieu de résidence habituelle et que la personne qui se proposait de l'héberger n'avait pas davantage justifié de moyens financiers et matériels suffisants pour assumer l'accueil et l'entretien d'une personne supplémentaire dans son foyer et enfin, qu'il existait un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires ;
4. Considérant, en premier lieu, que pour justifier de ses ressources, M. B... E...se borne à fournir des relevés bancaires attestant qu'il possède des comptes à la Banque Postale, lesquels étaient provisionnés à hauteur d'environ 20 000 euros au début de l'année 2013, ainsi qu'un coupon de dépôt en espèce mentionnant qu'il détenait une somme d'un million huit cent mille livres syriennes dans une banque syrienne à la date du 29 mai 2012 et une attestation du 8 mai 2012 du président de l'ordre des avocats d'Idled en Syrie, indiquant qu'il était inscrit au barreau des avocats depuis le 18 septembre 2008, qu'il exerçait toujours cette profession à cette date et bénéficiait de revenus de l'ordre de 100 000 livres syriennes par mois ; qu'il est constant par ailleurs, que M. B... E...est divorcé et sans enfant à charge, que sa mère séjourne régulièrement en France sous couvert d'une carte de résident valable jusqu'au 19 août 2023 et que l'un de ses frères disposait également, ainsi que son épouse, d'un titre de séjour français en cours de validité à la date de la décision contestée ; que si M. B... E...produit également plusieurs certificats médicaux indiquant que son état de santé, qui semble se détériorer, nécessite un suivi régulier, il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le Liban possède un plateau technique et un niveau médical qui permettent un diagnostic et un suivi médical pour presque toutes les pathologies ; que par suite, les premiers juges ont pu estimer à juste titre qu'en dépit de la circonstance que M.D..., qui devait accueillir M. B... E...à son domicile, ne pouvait être regardé comme ne disposant pas des ressources suffisantes pour financer le séjour en France de l'intéressé, il existait néanmoins un risque de détournement de l'objet du visa à des fins migratoires et que la décision contestée aurait pu être prise pour ce seul motif ; que dès lors, les moyens tirés de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur de fait, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ne peuvent qu'être écartés ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que si l'état de santé de M. B... E...nécessite un suivi et des soins réguliers, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa situation présentait un caractère d'urgence particulier qui n'aurait pu être traité au Liban ; que dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée le priverait de soins vitaux et porterait une atteinte à sa vie privée en méconnaissance tant du préambule de la Constitution de 1946, de l'article 23 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 que des articles 2 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
6. Considérant, enfin, que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être utilement invoqué à l'encontre d'un refus de visa ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se référer à la décision lui accordant le bénéfice de l'aide juridictionnelle, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ; que dès lors, l'ensemble de ses conclusions y compris celles tendant à ce que certains passages du mémoire du ministre de l'intérieur soient supprimés, doit être rejeté ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. E...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- Mme Gélard, premier conseiller,
- M.L'hirondel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 décembre 2016.
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15NT02158