Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 février 2016 Mme C..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 25 novembre 2015 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2015 du préfet de la Sarthe ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour dans le même délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros au bénéfice de son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de sa renonciation à la contribution versée par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle, ce qui est à l'origine d'une erreur manifeste dans l'appréciation de cette situation ;
- elle est entachée d'une erreur de fait ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination n'a pas été précédée de l'examen de sa situation personnelle, ce qui est à l'origine d'une erreur manifeste dans l'appréciation de cette situation ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2016, le préfet de la Sarthe conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 janvier 2016.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Delesalle.
1. Considérant que Mme C..., ressortissante turque née en 1991, est entrée irrégulièrement en France le 23 décembre 2013 ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 30 septembre 2014 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision du 18 mai 2015 de la Cour nationale du droit d'asile ; que, par un arrêté du 7 août 2015, le préfet de la Sarthe a pris à son encontre un arrêté portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation de son pays de renvoi d'office éventuel ; que Mme C... relève appel du jugement du 25 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant que l'OFPRA et la Cour nationale du droit d'asile ayant refusé à Mme C...le bénéfice de l'asile, le préfet de la Sarthe était tenu de rejeter sa demande tendant à la délivrance du titre de séjour prévu par le 8° de l'article L. 314-11 ou l'article L. 313-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, les moyens tirés de l'erreur de fait relative à sa situation familiale, du défaut d'examen de sa situation et de l'erreur manifeste commise dans l'appréciation de cette situation sont inopérants ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
3. Considérant que le préfet de la Sarthe fait valoir sans être contredit que le compagnon et père de l'enfant de Mme C..., qui est également de nationalité turque, séjourne irrégulièrement en France ; que si ce dernier est en cours de procédure de divorce, cette seule circonstance ne fait pas obstacle à ce que l'unité de la cellule familiale puisse être maintenue dans un pays autre que la France, et notamment en Turquie ; qu'en outre, Mme C...séjournait en France depuis moins de deux ans à la date de la décision contestée ; que, dans ces conditions, cette décision n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que pour les mêmes motifs, la décision n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
4. Considérant que pour fixer le pays de renvoi de MmeC..., le préfet de la Sarthe n'a fait état, même succinctement, d'aucun motif propre à la situation de l'intéressée et à l'absence de risques encourus en cas de retour en Turquie ; qu'il s'est borné à mentionner les décisions de l'OFPRA et de la Cour nationale du droit d'asile rejetant la demande d'asile qu'elle avait présentée, alors qu'il n'était pas lié par ces décisions pour l'appréciation de ces risques, sans en tirer aucune conséquence quant à la détermination du pays de destination ; que, dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle de Mme C...est fondé ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens dirigés contre la décision du préfet de la Sarthe du 7 août 2015 fixant le pays de destination, que Mme C...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Considérant que le présent arrêt, qui se borne à annuler la décision fixant le pays de renvoi de MmeC..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par la requérante doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La décision du 7 août 2015 du préfet de Sarthe fixant le pays de renvoi d'office de Mme C...est annulée.
Article 2 : Le jugement du 25 novembre 2015 du tribunal administratif de Nantes est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus de la requête de Mme C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Aubert, président de chambre,
- M. Delesalle, premier conseiller,
- Mme Bougrine, conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2016.
Le rapporteur,
H. DelesalleLe président,
S. Aubert
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 16NT00561