Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 mai 2019, la SARL Jardins de Mémoire, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté la demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2014 ;
2°) de prononcer cette décharge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée pour la vente d'arbres ;
- son activité est semblable à celle d'un paysagiste qui facture la vente d'arbres à taux réduit et les prestations d'entretien à taux normal ;
- le client conserve la propriété de l'arbre qu'il a acquis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2019, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la SARL Jardins de Mémoire ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Chollet, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) Jardins de Mémoire a fait
l'objet d'une vérification de comptabilité au cours de l'année 2015 portant sur la période
1er octobre 2011 au 30 septembre 2014. A l'issue de ce contrôle, le service notamment a remis en cause l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée sur la vente d'arbres et a procédé aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui en découlent. Après mise en recouvrement et rejet de sa réclamation, la société a notamment demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er octobre 2011 au 30 septembre 2014 ainsi que des intérêts de retard afférents. Par un jugement nos 1703365, 1703381 du 27 mars 2019, le tribunal administratif a rejeté sa demande. La société relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté la demande relative à la taxe sur la valeur ajoutée.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts, dans la rédaction applicable au litige : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. (...). ". L'article 278 bis du même code dispose par ailleurs que la taxe grevant les opérations d'achat, d'importation, d'acquisition intracommunautaire, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon portant les produits d'origine agricole, de la pêche, de la pisciculture et de l'aviculture n'ayant subi aucune transformation,
est perçue au taux réduit, lequel était de 5,5 % jusqu'au 16 mars 2012, de 7 % jusqu'au
1er janvier 2014, puis de 10 % à compter de cette date.
3. Il résulte des dispositions de la directive 2006/112/CE relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée, telles qu'interprétées par la Cour de justice de l'Union européenne, que, lorsqu'une opération économique soumise à la taxe sur la valeur ajoutée est constituée par un faisceau d'éléments et d'actes, il y a lieu de prendre en compte toutes les circonstances dans lesquelles elle se déroule aux fins de déterminer si l'on se trouve en présence de plusieurs prestations ou livraisons distinctes ou d'une prestation ou d'une livraison complexe unique. Chaque prestation ou livraison doit en principe être regardée comme distincte et indépendante. Toutefois, l'opération constituée d'une seule prestation sur le plan économique ne doit pas être artificiellement décomposée pour ne pas altérer la fonctionnalité du système de la taxe sur la valeur ajoutée. De même, dans certaines circonstances, plusieurs opérations formellement distinctes, qui pourraient être fournies et taxées séparément, doivent être regardées comme une opération unique lorsqu'elles ne sont pas indépendantes.
4. La société soutient qu'elle propose uniquement une vente d'arbre, qui doit être soumise au taux réduit, et une prestation d'entretien de cet arbre qui relève du taux normal. Il résulte toutefois l'instruction que la SARL Jardins de Mémoire, qui a pour objet, selon ses statuts, la location d'emplacements dans les parcs, forêts ou jardins et les prestations annexes, propose à ses clients des contrats " de culture et d'entretien " dont l'objectif final est en réalité de mettre à disposition un emplacement, sur lequel est planté un arbre, destiné à constituer un lieu de souvenir pour un défunt, cet espace pouvant éventuellement accueillir les cendres du défunt dans une urne biodégradable. Si la société facture de manière distincte la vente de l'arbre, d'une part, au demeurant à un prix moyen de 3 000 euros très supérieur au prix proposé par un paysagiste, et la prestation annuelle d'entretien de l'espace paysagé mis à disposition, d'autre part, cette décomposition présente un caractère artificiel dès lors que les deux opérations constituent en réalité une seule et même prestation sur le plan économique qui consiste, ainsi qu'il vient d'être dit, à mettre à disposition un lieu de souvenir et à l'entretenir. Par suite, c'est à bon droit que le service a remis en cause l'application du taux réduit sur les produits d'origine agricole et a appliqué, à l'ensemble de l'opération, le taux normal de taxe sur la valeur ajoutée.
5. Enfin, à supposer que la société ait entendu se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 70 de l'instruction administrative référencée BOI-TVA-LIQ-30-20, ce moyen doit en tout état de cause être écarté dès lors que cette instruction ne comporte pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.
6. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Jardins de Mémoire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande. Par conséquent, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Jardins de Mémoire est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Jardins de Mémoire et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 25 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Geffray, président,
- M. A..., premier conseiller,
- Mme Picquet, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2021.
Le rapporteur,
H. A...Le président,
J.-E. Geffray
La greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
No 19NT020662