Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 août 2021, le préfet de la Vendée demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de A... B... épouse C... présentée devant le tribunal administratif de Nantes.
Il soutient que :
- il n'est pas établi que les enfants mineurs D... A... B... épouse C... ne puissent pas poursuivre leur scolarité hors de France ; c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant pour annuler l'arrêté contesté ;
- les risques d'excision avaient été écartés par l'Office français de prospection des réfugiés et apatrides ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise par son auteur compétemment désigné et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de cette convention est inopérant ;
- la décision fixant le pays de destination ne méconnaît pas les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2021, A... B... épouse C..., représentée par Me Rodrigues Devesas, conclut au rejet de la requête, d'enjoindre au préfet de la Vendée, sous astreinte de 75 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que les moyens soulevés par le préfet de la Vendée ne sont pas fondés.
A... C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 décembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du doit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Geffray a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. A la suite du rejet de la demande d'asile de A... B... épouse C..., ressortissante ivoirienne, née le 28 décembre 1973, par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 31 août 2017 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 5 octobre 2020, le préfet de la Vendée, par un arrêté du 22 octobre 2020, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours sur le fondement des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a fixé le pays de destination. Le préfet relève appel du jugement du 19 juillet 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté (article 1er), enjoint au préfet de procéder à un nouvel examen de la demande de titre de séjour de A... B... épouse C... dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement (article 2) et mis à la charge de l'Etat le versement au conseil de A... B... épouse C..., de la somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 (article 3).
2. Pour annuler la décision contestée, et, par voie de conséquence, celle fixant le pays de destination, le magistrat désigné s'est fondé sur la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant au motif que le préfet de la Vendée n'a pas pris en compte les circonstances que les deux enfants mineurs D... A... B... épouse C..., nés en 2006 et 2010 et entrés en France respectivement à l'âge de 9 ans et 5 ans, y sont scolarisés depuis plusieurs années et que l'aînée a accompli l'ensemble du premier cycle de collège à Luçon. Il résulte toutefois des pièces du dossier que ni ces circonstances ni aucun autre élément du dossier ne permettent de faire obstacle à ce que les enfants puissent suivre leur mère hors de France et notamment être scolarisés en Côte d'Ivoire. Dès lors, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné s'est fondé, pour annuler l'obligation de quitter le territoire français, sur le moyen tiré de ce qu'il a méconnu ces stipulations.
3. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par A... C... devant le tribunal administratif de Nantes et la cour.
4. L'arrêté contesté été signé par M. Anne Tagand, secrétaire général de la préfecture de la Vendée, qui disposait, par un arrêté du 9 octobre 2020 régulièrement publié le 12 octobre 2020 au recueil des actes administratifs de la préfecture, d'une délégation du préfet du département à l'effet de signer notamment tous arrêtés, décisions, circulaires et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Vendée à l'exception de quelques actes qui ne sont pas relatifs à la législation sur le séjour et l'éloignement des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés en litige manque en fait.
5. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être utilement invoqué au soutien des conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français dès lors que celle-ci n'a ni pour objet ni pour effet de fixer le pays à destination duquel la requérante devra être reconduite d'office.
6. Il est constant que A... B... épouse C... est entrée récemment en France le
13 septembre 2015 et que son conjoint et une de ses filles, majeure, résident en Côte d'Ivoire. Compte tenu des conditions d'entrée et de séjour en France, et de ce qui a été dit au point 2, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de A... B... épouse C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Vendée est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 22 octobre 2020 et non du 20 octobre 2021, comme il a été indiqué par erreur dans le jugement. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 19 juillet 2021 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par A... B... épouse C... devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions en appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à A... E... B... épouse C... et au ministre de l'intérieur.
Une copie sera transmise au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 3 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Geffray, président,
- M. Giraud, premier conseiller,
- M. Brasnu, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mars 2022.
Le président-rapporteur,
J.-E. Geffray
L'assesseur le plus ancien
dans l'ordre du tableau
T. Giraud
Le greffier,
A. Marchais
La République mande et ordonne au ministre de de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21NT02244