Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 avril 2021, Mme B..., représentée par Me Le Floch, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté du 10 juin 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Vendée de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de
10 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros qui devra être versée à son avocate en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
sur l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision n'est pas suffisamment motivée, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- elle a été prise en méconnaissance des articles L. 743-1 et R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
sur la décision fixant le pays de destination :
- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité dès lors qu'il n'a pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 mai 2021, le préfet de la Vendée conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens dirigés contre l'arrêté du 10 juin 2020 en tant qu'il fixe le pays de destination et tirés de ce que la décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant sont inopérants et que les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés et doivent être écartés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Picquet,
- et les observations de Me Le Floch, représentant Mme B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante camerounaise née en 1986, est entrée sur le territoire français le 13 février 2018 et a obtenu, le 28 février 2018, l'enregistrement de sa demande d'asile et la délivrance d'une attestation de demandeur d'asile. Cette demande a été rejetée le 21 novembre 2018 par le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Mme B... a formé un recours contre ce rejet devant la Cour nationale du droit d'asile. Ce recours a lui-même été rejeté par la Cour le 27 mai 2020. Aussi, le préfet de la Vendée, par un arrêté pris le 10 juin 2020 sur le fondement du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a abrogé l'attestation de demande d'asile délivrée à Mme B..., fait obligation à celle-ci de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et désigné le Cameroun comme pays de destination. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de cet arrêté. Par un jugement du
11 mars 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande. Mme B... fait appel de ce jugement.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge les moyens tirés de ce que la décision n'est pas suffisamment motivée et du défaut d'examen particulier de la situation de la requérante.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Aux termes de l'article R. 733-31 du même code : " Les décisions de la cour sont lues en audience publique. Leur sens est affiché dans les locaux de la cour le jour de leur lecture. ". Aux termes de l'article R. 733-32 de ce code alors en vigueur : " Le secrétaire général de la cour notifie la décision de la cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article R. 213-6. Il la notifie également au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides. (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que le relevé des informations de la base de données " Telemofpra ", produit en première instance par le préfet de la Vendée, indique que la décision de la Cour nationale du droit d'asile rejetant le recours de Mme B... a été lue en audience publique le 27 mai 2020, soit antérieurement à l'arrêté contesté. La requérante n'a produit aucun élément de nature à remettre en cause l'exactitude des mentions portées sur ce document qui, en vertu des dispositions du III de l'article R. 723-19 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait foi jusqu'à preuve du contraire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 743-1 et de l'article
R. 733-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En troisième et dernier lieu, Mme B... est entrée en France le 13 février 2018, soit deux ans seulement avant l'arrêté du 10 juin 2020. Elle a sollicité l'asile, qui lui a été définitivement refusé. Si les quatre enfants A... la requérante sont arrivés avec elle en France et y sont scolarisés, il n'est pas établi que leurs scolarités ne pourraient pas se poursuivre dans leur pays d'origine. Dans ces conditions, la décision contestée ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Sur la décision fixant le pays de destination :
6. En premier lieu, le magistrat désigné a visé le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dirigé contre la décision fixant le pays de destination. S'il n'y a pas répondu dans les motifs du jugement attaqué, ce moyen, dirigé contre la décision fixant le pays de destination, était inopérant. Dès lors, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité pour défaut de réponse à ce moyen.
7. En deuxième lieu, il résulte des points 2 à 5 que le moyen tiré de ce que la décision doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
8. En troisième lieu, pour les motifs indiqués aux points 5 et 9, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit, en tout état de cause, être écarté.
9. En quatrième et dernier lieu, en se bornant à produire des rapports d'organismes internationaux ayant trait à la situation des femmes au Cameroun, Mme B..., qui fait valoir qu'elle craint d'être victime de violences de la part du père de ses premiers enfants, n'établit pas être exposée personnellement, en cas de retour dans son pays d'origine, à des risques de traitements inhumains et dégradants. Au demeurant, sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile. Par conséquent, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 octobre 2021.
La rapporteure,
P. Picquet
Le président,
F. Bataille
La greffière,
A. Marchais
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21NT01003