1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 8 octobre 2019 ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Orne de délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et dans cette attente, de la munir d'un récépissé de demande de titre l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à Me F... en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique.
Elle soutient que :
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article L. 313-14 du même code ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences portées à sa vie personnelle ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour entache d'illégalité la décision portant obligation de quitter le territoire ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît le 6° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Sur la décision fixant le pays de destination :
- la décision n'est pas suffisamment motivée, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire entache d'illégalité la décision fixant le pays de destination ;
Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :
- la décision n'est pas suffisamment motivée ;
- l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire entache d'illégalité la décision portant interdiction de retour ;
- elle méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences portées à sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 octobre 2020, la préfète de l'Orne conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant et que les autres moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 11 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les observations de Me F..., représentant la requérante.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G... C..., ressortissante nigériane, a déclaré être entrée irrégulièrement en France le 8 juin 2014. Sa demande d'asile a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 25 novembre 2015. Elle a bénéficié de deux titres de séjour du 11 octobre 2016 au 10 octobre 2017 en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 4 septembre 2018, elle a fait l'objet d'un refus de séjour et d'une obligation de quitter le territoire français. Elle a sollicité, le 17 septembre 2019, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 8 octobre 2019, la préfète de l'Orne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office à la frontière lorsque le délai sera expiré et lui a interdit de revenir sur le territoire français pendant deux ans. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Par un jugement du 16 janvier 2020, le tribunal a rejeté sa demande. Mme C... fait appel de ce jugement.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision de refus de titre de séjour, qui n'a pas à mentionner l'ensemble des éléments de la situation de la demanderesse mais seulement ceux sur lesquels le préfet entend fonder sa décision, comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme inopérant, dès lors qu'il ressort de la demande de titre de séjour déposée le 16 septembre 2019 que cette dernière n'était fondée que sur l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".
5. Mme C... est entrée en France le 8 juin 2014 avec son fils A... né en 2011. Elle a accouché en France de jumeaux, Taye et Kehinde, le 7 juillet 2014. Elle a ensuite eu une fille, B..., née en 2016. Elle a bénéficié de deux titres de séjour du 11 octobre 2016 au 10 octobre 2017 en qualité d'étranger malade. Il est constant qu'elle est célibataire et sans emploi. Si ses enfants sont scolarisés en France et que l'intéressée a suivi des formations, notamment en langue française, ces circonstances ne peuvent être regardées comme des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, si la requérante soutient que ces dispositions auraient dû être appliquées au regard des dispositions de la circulaire dite " Valls " du 28 novembre 2012, elle ne peut toutefois utilement se prévaloir des orientations de cette circulaire qui sont dépourvues de caractère réglementaire. Dès lors, le moyen tiré de ce que la préfète de l'Orne a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
6. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
7. Il n'est pas établi que les enfants de Mme C... ne pourraient pas poursuivre leur scolarité au Nigéria. Si Mme C... soutient que le père de sa fille B... réside à Paris et est de nationalité française, il n'est pas établi ni même allégué qu'il entretiendrait des liens avec sa fille depuis sa naissance, Mme C... se bornant à soutenir qu'il a assisté à l'accouchement et a reconnu sa fille. Dès lors et pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 5, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et de ce que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ne peuvent qu'être écartés.
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, la décision de refus de titre de séjour n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence doit être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions que le législateur a subordonné cette interdiction à la condition, notamment, que l'enfant réside en France. Ce faisant, le législateur n'a pas requis la simple présence de l'enfant sur le territoire français, mais a exigé que l'enfant réside en France, c'est-à-dire qu'il y demeure effectivement de façon stable et durable. Il appartient dès lors, pour l'application de ces dispositions, à l'autorité administrative d'apprécier dans chaque cas sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des justifications produites, où se situe la résidence de l'enfant, entendue comme le lieu où il demeure effectivement de façon stable et durable à la date de la décision contestée.
10. Il est constant que Mme C... contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille depuis sa naissance. Il ressort des pièces du dossier que le père de l'enfant B... est de nationalité française. Cependant, comme il a été dit au point 7, il n'est pas établi ni même allégué qu'il entretiendrait des liens avec sa fille. Dès lors et pour les motifs indiqués aux points 5 et 7, l'enfant B... ne peut être regardée comme disposant d'une résidence en France au sens de ces dispositions.
11. En troisième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 et 7, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ne peuvent qu'être écartés.
Sur la décision fixant le pays de destination :
12. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elle se réfère notamment à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'absence de justification par l'intéressée de l'existence d'une menace personnelle en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, cette décision est suffisamment motivée et ne révèle pas de défaut d'examen particulier de la situation de la requérante.
13. En second lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence doit être écarté.
Sur l'interdiction de retour en France :
14. En premier lieu, la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet.
15. Il ressort des pièces du dossier que la décision contestée prononçant une interdiction de retour sur le territoire français, qui vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne la durée de la présence en France de Mme C... ainsi que l'absence de liens intenses, stables et anciens sur le territoire français et la circonstance que l'intéressée n'a pas déféré aux deux précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre. Cette décision comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.
16. En deuxième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulée, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour en France doit être annulée par voie de conséquence doit être écarté.
17. En troisième et dernier lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
18. Mme C... ayant déjà fait l'objet d'une mesure d'éloignement en date du 4 septembre 2018 et pour les motifs indiqués aux points 5 et 7, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de ce que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ne peuvent qu'être écartés.
19. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi sur l'aide juridique doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de l'Orne.
Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 février 2021.
La rapporteure,
P. E...
Le président,
F. Bataille
La greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT00604