Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 juillet 2020, M. B..., représentée par Me Ndiaye, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'ordonner au préfet du Calvados de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif et le préfet du Calvados se sont fondés sur les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; sa situation est régie par les stipulations de l'article 9 de la convention franco-gabonaise ;
- c'est à tort que le préfet du Calvados a estimé qu'il ne justifiait pas du caractère réel et sérieux de ses études ; il justifie également du caractère suffisant de ses revenus.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 janvier 2021, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés et s'en rapporte, pour l'essentiel, à ses écritures de première instance.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République gabonaise relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Paris le 2 décembre 1992, approuvée par la loi n° 94-531 du 28 juin 1994 et publiée par le décret n° 2003-963 du 3 octobre 2003 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... D... B..., ressortissant gabonais né le 24 avril 1998, entré régulièrement en France le 24 août 2015 s'est vu délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant " le 23 mars 2017 qui a été régulièrement renouvelé. Le 18 juillet 2019 il a sollicité le renouvellement de ce titre de séjour. Par un arrêté du 7 novembre 2019, le préfet du Calvados a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. B... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Par un jugement n° 1902794 du 11 juin 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. M. B... relève appel de ce jugement.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. M. B... soutient que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen s'est fondé sur les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'étaient applicables les stipulations de l'article 9 de la convention franco-gabonaise du 2 décembre 1992. A supposer que M. B... ait entendu par ce moyen invoquer l'irrégularité du jugement attaqué, ce moyen relève, en tout état de cause, du bien-fondé du jugement et doit, par suite, être écarté comme étant sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". Aux termes de l'article 12 de la convention franco-gabonaise du 2 décembre 1992 : " Les dispositions de la présente convention ne font pas obstacle à l'application des législations respectives des deux Parties contractantes sur l'entrée et le séjour des étrangers sur tous les points non traités par la convention. ". Aux termes de l'article 9 de cette convention : " Les ressortissants de chacune des Parties contractantes désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation de niveau supérieur sur le territoire de l'autre doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement où s'effectue le stage, ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. Ces dispositions ne font pas obstacle à la possibilité d'effectuer dans l'autre Etat d'autres types d'études ou de stages de formation dans les conditions prévues par la législation applicable. ". L'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention "étudiant". (...) / II. - Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte mentionnée au I est accordée de plein droit : / (...) 5° A l'étranger ressortissant d'un pays ayant signé avec la France un accord de réciprocité relatif à l'admission au séjour des étudiants (...) ".
4. Il résulte des stipulations précitées de l'article 12 de la convention franco-gabonaise que l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas applicable aux ressortissants gabonais désireux de poursuivre leurs études supérieures en France, dont la situation est régie par l'article 9 de cette convention. Par suite, l'arrêté contesté du préfet du Calvados ne pouvait être pris sur le fondement de l'article
L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. Toutefois, lorsque le requérant a lui-même évoqué dans ses écritures la possibilité d'une telle substitution, le juge n'est pas tenu d'informer les parties de l'éventualité qu'il y procède.
6. En l'espèce, la décision de refus de délivrance du titre de séjour portant la mention " étudiant " en litige trouve son fondement légal dans les stipulations de l'article 9 de la convention franco-gabonaise. Ces stipulations, qui ont été mentionnées par le requérant dans ses écritures d'appel, peuvent être substituées à celles de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que cette substitution de base légale n'a pas pour effet de priver M. B... d'une garantie et que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'un ou l'autre de ces deux textes. Par conséquent, il y a lieu de procéder à cette substitution de base légale.
7. Pour l'application des stipulations de la convention franco-gabonaise dont l'objet et la portée sont équivalentes à celles des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'administration, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant, de rechercher, à partir de l'ensemble des pièces du dossier et sous le contrôle du juge, si l'intéressé peut être raisonnablement regardé comme poursuivant effectivement des études sur le territoire français et d'apprécier la réalité et le sérieux des études poursuivies.
8. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., après deux années de terminale économique et sociale, s'est inscrit en licence 1 de droit à l'université de Caen. Il a été ajourné pour l'année 2017/2018 ainsi que pour l'année 2018/2019. A la date de l'arrêté contesté, il était inscrit pour une troisième année consécutive en licence 1 de droit. M. B... fait valoir que son échec en terminale est dû à une intervention chirurgicale, qu'il a eu du mal à s'adapter au fonctionnement de l'université lors de la première année, et que l'échec de l'année 2018/2019 s'explique par le décès de son cousin le 20 avril 2019, avec lequel il était très proche. Toutefois, le fait que M. B... a eu du mal à s'adapter au fonctionnement de l'université ne saurait être regardé comme une circonstance exceptionnelle justifiant le redoublement. S'agissant, enfin, de l'année 2018/2019, M. B... n'avait pas validé son premier semestre avant que n'intervienne le décès de son cousin. Dans ces conditions, c'est sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet du Calvados a estimé que M. B... ne justifiait pas du caractère réel et sérieux de ses études. Il ressort également des pièces du dossier que le préfet du Calvados aurait pris la même décision s'il s'était fondé seulement sur ce motif pour refuser de délivrer un titre de séjour portant la mention " étudiant ", de sorte que si le requérant soutient qu'il justifie du caractère suffisant de ses revenus, une telle circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
9. Il résulte de tout ce qui précède M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Calvados.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Couvert-Castéra, président de la cour,
- M. Geffray, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mai 2021.
Le rapporteur,
H. A...
Le président,
O. Couvert-CastéraLa greffière,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 20NT02353