Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 juillet 2018, Mme B..., représentée par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 11 février 2018 en tant qu'il lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français, en mentionnant que compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée à sa vie familiale, n'est pas suffisamment motivée ;
- le préfet de la Haute-Savoie n'a pas procédé à un examen de sa situation avant de prendre sa décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- le préfet aurait dû saisir le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
- sa situation personnelle fait obstacle au prononcé de la décision portant obligation de quitter le territoire français dès lors que, ayant transité par l'Espagne, elle relève du champ d'application des stipulations de l'accord franco-espagnol du 26 novembre 2002 relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière et est donc susceptible de faire l'objet d'une réadmission vers ce pays ; le préfet de la Haute-Savoie, en prononçant la mesure d'éloignement vers le pays dont elle a la nationalité, a méconnu ces stipulations ;
- la décision fixant le pays de destination n'est pas suffisamment motivée et porte atteinte à sa vie privée et familiale ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation avant de prendre sa décision fixant le pays de destination ; il s'est abstenu d'examiner son éventuelle réadmission vers l'Espagne.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 juillet 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
- l'accord franco-espagnol du 26 novembre 2002 relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Geffray.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 11 février 2018, le préfet de la Haute-Savoie a obligé Mme B...épouseA..., de nationalité marocaine, née le 1er mai 1965, à quitter le territoire français, sans délai, a fixé son pays d'origine comme pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ou tout autre pays pour lequel elle établit être admissible et lui a interdit de retourner sur le territoire français durant un an. Le même jour, le préfet de la Loire-Atlantique a assigné l'intéressée à résidence dans le département pour une durée de quarante-cinq jours. Par deux requêtes distinctes, Mme B...épouse A...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de ces deux arrêtés. Par un jugement du 15 février 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie en tant qu'il a refusé d'accorder un délai de départ volontaire à Mme B...épouse A...et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant un délai d'un an (article 1er) et l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique portant assignation à résidence de l'intéressée (article 2), enjoint au préfet de la Haute-Savoie de procéder au réexamen de sa situation s'agissant du délai dans lequel celle-ci doit exécuter l'obligation de quitter le territoire français (article 3), mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais liés au litige (article 4) et rejeté le surplus de ses demandes (article 5). Mme B...épouse A...relève appel de l'article 5 du jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie en tant qu'il porte obligation de quitter le territoire français et fixe le pays de destination.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. La décision contestée qui mentionne que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée à sa vie familiale, est suffisamment motivée. Il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Savoie a examiné l'ensemble des éléments particuliers de la situation personnelle et familiale de l'intéressée.
3. Le moyen tiré du défaut de saisine du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est inopérant à l'égard d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dès lors que ce collège est seulement consulté en vue de délivrer ou de refuser un titre de séjour pour raisons médicales.
4. La requérante soutient que sa situation personnelle fait obstacle au prononcé de la décision portant obligation de quitter le territoire français dès lors que, ayant transité par l'Espagne, elle relève du champ d'application des stipulations de l'accord franco-espagnol du 26 novembre 2002 relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière et est susceptible de faire l'objet d'une réadmission vers ce pays de sorte que le préfet de la Haute-Savoie, en prononçant sa mesure d'éloignement vers le pays dont elle a la nationalité, a méconnu ces stipulations. Toutefois, ces mêmes stipulations n'imposent pas, en tout état de cause, aux autorités françaises de demander la réadmission en Espagne d'un étranger en situation irrégulière qui a précédemment séjourné dans ce pays. Ainsi, le moyen doit être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
5. Compte tenu de ce qui a été dit au point 4 du présent arrêt, le préfet de la Haute-Savoie n'était pas tenu de motiver sa décision fixant le pays de destination au regard des stipulations de l'accord franco-espagnol du 26 novembre 2002. Par ailleurs, cette décision est suffisamment motivée en fait et en droit.
6. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4 du présent arrêt, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Savoie n'a pas examiné sa situation personnelle avant de prendre la décision fixant le pays de destination du seul fait qu'il s'est abstenu d'examiner son éventuelle réadmission vers l'Espagne.
7. Mme B...épouse A...reprend en appel, sans apporter des éléments de fait ou de droit nouveau, son moyen invoqué en première instance et tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné, d'écarter ce moyen.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B...épouse A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Savoie en tant qu'il fait obligation de quitter le territoire français et fixe le pays de destination. Par voie de conséquence, ses conclusions relatives aux frais liés au litige doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B...épouse A...et au ministre de l'intérieur. Une copie sera transmise aux préfets de la Haute-Savoie et de la Loire-Atlantique.
Délibéré après l'audience du 13 juin 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- M. Geffray, président assesseur,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 juin 2019.
Le rapporteur,
J.-E. GeffrayLe président,
F. Bataille
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18NT02934