Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 1er juin 2018, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que l'arrêté contesté avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes ne sont pas fondés ;
- il s'en remet, s'agissant de ces moyens, à ses écritures de première instance ;
- Mme C... n'a séjourné légalement en France que pour une courte période, dans l'attente qu'il soit statué sur sa demande d'asile ainsi que sur sa demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., ressortissante russe née le 7 mars 1979, déclare être entrée en France le 13 octobre 2015. Sa demande de reconnaissance du statut de réfugié a été rejetée par une décision du 27 avril 2016 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par un arrêt du 11 mai 2016 de la Cour nationale du droit d'asile. Sa demande de réexamen a également été rejetée. Elle a sollicité du préfet de Maine-et-Loire la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé. Par un arrêté du 12 janvier 2018, le préfet a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination, et l'a astreinte à se présenter aux services de la préfecture de Maine-et-Loire afin d'indiquer les diligences accomplies dans la préparation de son départ. Par un jugement du 2 mai 2018, le tribunal administratif de Nantes a annulé cet arrêté. Le préfet de Maine-et-Loire relève appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) "
3. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer qu'un défaut de prise en charge de l'état de santé de l'étranger ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, la possibilité ou l'impossibilité pour lui de bénéficier effectivement de ce traitement dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
4. En l'espèce, le collège de médecins de l'OFII a estimé, dans son avis du 21 novembre 2017, que si l'état de santé de l'intéressée nécessitait un suivi médical, l'absence d'une telle prise en charge ne devait pas entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour contredire l'appréciation émise par ce collège de médecins, Mme C... a produit devant les premiers juges une convocation pour une artériographie cérébrale le 27 février 2018, un courrier du docteur Catar du 31 octobre 2017, un certificat de ce même médecin du 27 mars 2018, un certificat médical du 12 avril 2018 du docteur Berthier ainsi qu'un bulletin de situation du 2 mars 2018. D'une part, il n'est pas contesté que le courrier du docteur Catar du 31 octobre 2017 a été porté à la connaissance du collège de médecins de l'OFII. D'autre part, ni ce courrier, ni les autres éléments médicaux produits ne font état de la gravité de cette pathologie et des conséquences que pourrait entraîner un défaut de prise en charge. En effet, le certificat du 20 mars 2018 mentionne seulement l'existence d'une pathologie complexe nécessitant un traitement de pointe et un suivi évolutif, sans préciser la nature ni les conséquences de cette pathologie. La circonstance que ce certificat indique que la patiente devra résider en France pour bénéficier d'un suivi radiologique convenable ne saurait en outre remettre en cause l'avis du collège de médecins. De même, si le certificat du 12 avril 2018 indique que l'état de santé de Mme C... nécessite un traitement endovasculaire dans les plus brefs délais ainsi qu'un suivi régulier pendant plusieurs années, ces mentions sont trop imprécises pour connaître la nature de la pathologie de l'intéressée. Elles ne permettent pas non plus au préfet de Maine-et-Loire de contester, le cas échéant, la gravité de l'état de santé de Mme C.... Dans ces conditions, il n'est pas établi que l'état de santé de C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ainsi, le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes s'est fondé sur ce motif pour annuler son arrêté du 12 janvier 2018.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes.
Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :
6. En premier lieu, il ressort de la lecture de l'avis du collège de médecins de l'OFII que celui-ci a été signé par chacun des trois médecins membres du collège, conformément à ce que prévoit l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En outre, cet avis fait apparaître les noms et prénoms de ces médecins. Il suit de là que Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'il ne serait pas possible d'identifier les auteurs de cet avis.
7. En second lieu, le préfet de Maine-et-Loire a visé, dans l'arrêté contesté, l'avis du collège de médecins de l'OFII et a ensuite considéré que son état de santé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Contrairement à ce que soutient Mme C..., le préfet, par cette formulation, a porté sa propre appréciation sur la situation médicale de l'intéressée. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le préfet aurait entaché son arrêté d'un défaut de motivation.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
8. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; ".
9. Ainsi qu'il a été exposé au point 4 du présent arrêt, il n'est pas établi que le défaut de prise en charge médicale de Mme C... pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, elle n'est pas fondée à invoquer le bénéfice de ces dispositions.
10. En deuxième lieu, si Mme C... soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, elle n'apporte aucune précision sur sa situation privée et familiale. Au demeurant, Mme C..., qui est célibataire et sans enfants, est récemment entrée en France, soit en octobre 2015. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
11. En dernier lieu, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'étant pas annulée, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
12. La décision refusant la délivrance d'un titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas annulées, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence.
13. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé son arrêté du 12 janvier 2018.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 2 mai 2018 du tribunal administratif de Nantes est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme A... C....
Copie sera adressée, pour information, au préfet de Maine-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 14 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Geffray, président,
- M. B..., premier conseiller,
- Mme Malingue, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.
Le rapporteur,
H. B...Le président,
J-E. Geffray
Le greffier,
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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No 18NT021922