Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 août 2017, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 6 avril 2017 ;
2°) d'annuler cet arrêté du 26 septembre 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer son dossier dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me B..., d'une somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier, en ce que son mémoire complémentaire et des pièces enregistrés le 2 et 13 mars 2017 n'ont pas été pris en compte, postérieurement à la clôture de l'instruction ;
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale, dès lors qu'elle peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour et que sa présence ne constitue pas une menace à l'ordre public ;
- cette dernière décision porte une atteinte grave et disproportionnée à sa vie privée et familiale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2017, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 8 août 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Degommier.
Considérant ce qui suit :
1. MmeA..., ressortissant chinoise, relève appel du jugement du 6 avril 2017 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 septembre 2016, par lequel le préfet d'Indre-et-Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ". Aux termes de l'article R. 313-21 de ce code, " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ".
3. Mme A...réside en France depuis en 2008, date à laquelle elle y a rejoint à l'âge de 21 ans sa mère, son beau-père et son demi-frère né en 2003 sur le territoire national, tous les trois de nationalité française. Bien qu'elle ne réside pas avec ses derniers, leur proximité est avérée par un soutien constant. Par ailleurs, si le renouvellement de son titre de séjour en 2012 était justifié par ses échecs dans ses études de droit, sa réorientation lui a permis d'obtenir une licence professionnelle en communication visuelle en 2015. De plus, la requérante justifie d'une bonne insertion dans la société française. Ainsi, compte tenu de l'intensité, de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, la décision contestée porte au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles elle a été prise, alors même qu'elle dispose toujours d'attaches familiales avec son pays d'origine. Elle méconnaît par suite les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ".
6. Il y a lieu, sous réserve d'un changement dans la situation de droit ou de fait de l'intéressée, par application de ces dispositions, d'enjoindre à l'administration de délivrer à la requérante un titre de séjour, sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés au litige :
7. La requérante a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros à verser à Me B...dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°1700082 du 6 avril 2017 du tribunal administratif d'Orléans et l'arrêté du 26 septembre 2016 du préfet d'Indre-et-Loire portant refus de lui délivrer un titre de séjour à MmeA..., obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant la Chine comme pays de destination sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet d'Indre-et-Loire de délivrer à Mme A...une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt sous réserve d'un changement dans les circonstances de fait et de droit de l'intéressée.
Article 3 : L'Etat versera à Me B...la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, dans les conditions fixées à l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et à l'article 108 du décret du 19 décembre 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée au préfet d'Indre-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Degommier, président assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er juin 2018.
Le rapporteur,
S. DEGOMMIERLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 17NT02648