Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 août 2015, Mme B...A..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 2 juillet 2015 ;
2°) d'annuler la décision du 1er février 2013 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal administratif n'a pas examiné le moyen tiré de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui lui était soumis ;
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a méconnu les dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation dans la mesure où le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a accordé le bénéfice du regroupement familial ;
- la commission s'est bornée à reprendre les arguments des autorités consulaires françaises sans produire aucun écrit pouvant attester de la véracité des vérifications effectuées alors qu'elle-même a produit de nouveaux documents devant le tribunal administratif ;
- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- cette décision est contraire aux dispositions du 1° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le règlement n° 810 du 13 juillet 2009 établissant un code communautaire des visas ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Gélard a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que Mme B...A..., ressortissante bangladaise, relève appel du jugement du 2 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er février 2013 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre une décision du 18 septembre 2012 des autorités consulaires françaises à Dacca refusant de lui délivrer, ainsi qu'aux enfants I... et J..., un visa de long séjour en France ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'après avoir indiqué que par une décision du 19 décembre 2011 le préfet de Seine-Saint-Denis avait fait droit à la demande de regroupement familial présentée par M. G...A...au bénéfice de son épouse et de leurs deux enfants, I... et J..., les premiers juges ont précisé que cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France use de son pouvoir de refuser leur entrée en France en se fondant sur des motifs d'ordre public ; qu'ils ont par ailleurs répondu au moyen tiré de la méconnaissance du 1° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation ; qu'ils n'étaient pas tenus de répondre à chacun des arguments développés par Mme A...à l'appui de ces moyens, ni de se référer à chaque document produit par elle ; que par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé ou entaché d'une omission à statuer ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
3. Considérant que la décision contestée est fondée sur le fait que, d'une part, la vérification effectuée auprès des autorités locales compétentes avait révélé que l'acte de mariage ainsi que l'acte de naissance et le certificat de décès de Mme C...A..., première épouse de M. A..., lesquels avaient été fournis à l'appui de la demande de visa présentée par Mme B...A...étaient de faux documents et que, d'autre part, l'identité de l'intéressée et des enfants I... et J... et donc leur lien allégué avec M. G...A...n'étaient pas établis ;
4. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et fait sur lesquelles elle se fonde ; que par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'elle serait insuffisamment motivée ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. " ; qu'aux termes de l'article L. 411-2 du même code : " Le regroupement familial peut également être sollicité pour les enfants mineurs de dix-huit ans du demandeur et ceux de son conjoint dont, au jour de la demande, la filiation n'est établie qu'à l'égard du demandeur ou de son conjoint ou dont l'autre parent est décédé ou déchu de ses droits parentaux. " ; que lorsque la venue d'une personne en France a été autorisée au titre du regroupement familial, l'autorité consulaire n'est en droit de rejeter la demande de visa dont elle est saisie à cette fin que pour un motif d'ordre public ; que figure au nombre de ces motifs l'absence de caractère authentique des actes d'état-civil produits ; que par suite et eu égard à ce qui a été dit au point 3, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée serait contraire aux dispositions précitées des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et entachée d'une erreur de droit à raison de ce motif ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : 1° A l'étranger dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou entrant dans les prévisions de l'article L. 311-3, dont l'un des parents au moins est titulaire de la carte de séjour temporaire ou de la carte de résident, ainsi qu'à l'étranger entré en France régulièrement dont le conjoint est titulaire de l'une ou de l'autre de ces cartes, s'ils ont été autorisés à séjourner en France au titre du regroupement familial dans les conditions prévues au livre IV (...) " ;
7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de celles produites par le ministre de l'intérieur en appel, qu'un avocat accrédité auprès de la Cour suprême du Bangladesh a diligenté une enquête locale à l'issue de laquelle il s'est avéré que M. G...A...s'appelait en réalité M. F... et que l'acte de mariage produit à l'appui de la demande de visa de Mme B... A...ne pouvait être regardé comme authentique en l'absence de certaines mentions, comme le numéro d'arrondissement et le nom de l'officiant religieux qui l'avait signé, lequel en outre n'avait pu être identifié ; que par ailleurs, les actes de naissance et de décès de Mme C...A..., présentée comme la première épouse de M.A..., ont été déclaré irréguliers par un officier d'état-civil de la municipalité n°4 de Ramnagar au Bangladesh ; que les pièces produites en première instance par Mme B...A...ne sont pas de nature à contredire sérieusement ces éléments ; que dans ces conditions, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a pu estimer que les justificatifs produits par l'intéressée à l'appui de sa demande de visa ne présentaient pas de caractère authentique et ne permettaient d'établir ni le lien matrimonial qui l'unirait à M. G...A..., ni le lien de filiation qui existerait entre ce dernier et les enfants I... et J... ; que dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en rejetant la demande de visa long séjour qu'elle avait présentée à raison de ce motif la commission aurait méconnu les dispositions précitées du 1° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou entaché sa décision d'une erreur de droit ;
8. Considérant, enfin, qu'en l'absence d'établissement du lien matrimonial et de filiation entre la requérante, les enfants I... et J..., et M. G...A..., la décision contestée n'a pas méconnu le droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur leur situation personnelle ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 7 mars 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Pérez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 mars 2017
Le rapporteur,
V. GELARDLe président,
A. PEREZ
Le greffier,
S. BOYERE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°15NT02670